Paul-Émile Jean s’éteint à l’âge de 98 ans

Par Charlotte Paquet 24 mai 2016
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Baie-Comeau – Baie-Comeau vient de perdre l’un de ses grands bâtisseurs avec le décès de Paul-Émile Jean, premier directeur général de l’ex-ville de Hauterive et auteur de deux ouvrages intimement liés à l’histoire baie-comoise.

Celui que certains surnommaient affectueusement Ti-Père Jean s’est éteint le 12 mai à Québec, où il habitait depuis son départ de Baie-Comeau, il y a deux ans. Il était âgé de 98 ans.

Ingénieur forestier et arpenteur- géomètre de formation, M. Jean s’est installé dans la Manicouagan en 1952. Il arrivait de Noranda en Abitibi. Il avait été transféré sur la Côte-Nord pour occuper le poste de chef de district au ministère des Terres et Forêts.

En 1961, il quitte son emploi et devient le premier directeur général de la nouvelle ville de Hauterive, fondée une dizaine d’années auparavant. Il occupera son poste jusqu’à sa retraite en 1982, année marquée par la fusion des ex-villes de Hauterive et de Baie-Comeau.

Un héritage impressionnant

M. Jean laisse un héritage impressionnant dans la communauté. Sa fille Louiselle, qui réside à Forestville, insiste sur le fait que son père croyait énormément au développement de la Côte-Nord et énumère ses principaux faits d’armes.

Il a fait partie du comité de souscription pour la construction du Séminaire de Hauterive, aujourd’hui le Cégep de Baie-Comeau. « Il a parcouru le territoire pour convaincre les hommes d’affaires et par surcroît le ministère de l’Éducation de l’époque à implanter une institution sur la Côte-Nord et permettre aux jeunes étudiants de prolonger leurs études à Hauterive », souligne la dame dans un communiqué.

Le disparu a également fait sa marque sur le plan économique et social, notamment comme membre fondateur et président pendant quelques années de la Caisse populaire Desjardins de Hauterive. Il a aussi été membre de la Coopérative d’habitation de Hauterive ainsi que du club fondateur de la Radio Côte-Nord en 1962, aujourd’hui le FM 97,1. Il a aussi eu son mot à dire dans la fondation du Club 4H et dans les activités du Club Richelieu, dont il a fait partie pendant une quinzaine d’années.

Marguillier de la paroisse Saint-Jean-Eudes, M. Jean a été impliqué dans la construction de la cathédrale Saint-Jean-Eudes à la fin des années 50. Il a d’ailleurs été décoré de la médaille Pro Ecclésia et Pontifice, une importante distinction attribuée par le Saint-Siège en récompense des services rendus à l’Eglise et à la papauté. En 1994, il était aussi décoré de l’Ordre du mérite Nord-Côtier pour son dévouement et son engagement extraordinaires.

Retraite et écriture

À la retraite, le disparu a commencé à écrire. Féru d’histoire, ses recherches l’ont amené à publier en 1987 un ouvrage intitulé En 1999, il récidivait avec

Selon sa fille Louiselle, le grand souhait de son père était d’écrire sa biographie, mais il n’aura jamais terminé son projet.« Il tournait en rond. Il commençait, puis passait à autre chose. Il disait : “Il faudrait que je fasse ça et que je fasse ça“ », raconte en entrevue celle qui a perdu sa mère en 2008 à l’âge de 94 ans.

À Québec, M. Jean habitait une résidence pour aînés en perte d’autonomie. « Il n’était pas malade comme tel et il ne prenait pas de médicament. Il avait cependant des problèmes cognitifs, mais ce n’était pas l’Alzheimer. Il nous reconnaissait », ajoute Mme Jean.

Un peu « ratoureux »

Raymond D’Auteuil a bien connu le disparu. « Je l’ai connu dans les années 1957, 1958. On a fait pas mal de choses ensemble quand il a été à la présidence de la caisse et après aussi. Je lui parlais régulièrement dans les dernières années. Tant et aussi longtemps qu’il m’obstinait, je me disais : “ C’est correct, il est en santé “ », raconte-il en riant.

Il garde le souvenir d’un homme brillant, honnête et dévoué. Quand il s’engageait dans un projet, il allait jusqu’au bout. « Pour moi, M. Jean était aussi un peu ratoureux », ajoute encore M. D’Auteuil d’un ton léger. Il en parle comme d’un fin renard qui savait comment faire pour arriver à ses fins.

« Quand il avait des idées, ce n’était pas facile de le faire changer. Je l’aimais bien et j’avais du fun avec lui jusqu’à un certain point », ajoute l’ancien directeur général de la Caisse populaire de Hauterive.

Marques de sympathie

Les marques de sympathie ont afflué sur le site Internet de la Fédération des coopératives funéraires du Québec à la suite du décès de M. Jean. En voici quelques-unes.

– « J’ai eu le privilège de travailler avec lui à la Ville de Hauterive en 1965. Ce fût pour moi un vrai modèle… il était capable de défendre les intérêts des citoyens en premier lieu, peu importe l’opinion de certains échevins. » (Mario Poirier)

– « Étant le voisin de mes parents depuis plus de 50 ans, c’est avec tristesse que j’ai appris le décès de M. Jean. Je garde de bons souvenirs de nos discussions lors de mes séjours à Baie Comeau.

Toujours des propos et commentaires avertis, bien au courant de l’actualité, il était une véritable encyclopédie de Baie-Comeau. Au nom de la famille Banville, j’offre toutes nos sympathies à Yvette, Pauline, Daniel et Louiselle. » (Serge Banville)

– « Toute la communauté baie-comoise vous offre ses sympathies. Monsieur Jean a été l’un des pionniers de la Ville de Baie-Comeau et avec son départ, c’est une page de notre histoire que nous tournons. Il nous laisse, entre autres, son ouvrage , sa grande contribution à la Société historique de la Côte-Nord, et sa marque dans l’administration municipale. Nos emerciements à ce cultivateur de mémoire, à ce bâtisseur de fierté. Au revoir Monsieur Jean. » (La Ville de Baie-Comeau)

– « On le surnommait Ti-Père à Pointe-Paradis, je l’appelais M. Jean avec affection, ce petit homme qui ne cessait de m’étonner par sa vitalité, ses yeux malins et ses réparties tranchantes. Jeune freluquet, j’allais parfois le visiter seul, dans son chalet muséal. Une demi-journée, il m’avait entrepris sous prétexte de me montrer comment manier la scie à chaîne. Sous sa gouverne, j’ai fait à sa manière. En parcourant son livre sur la toponymie de Hauterive, j’ai découvert une plume cultivée. Fidèle en amitié, il était présent, avec les Boudreault, lorsque j’ai porté mon père en terre. Pour le petit gars que j’étais, le souvenir tenace restera toujours celui d’avoir été par lui retiré sur trois prises lors de ces matchs de balle-molle qu’il arbitrait en jubilant. Merci M. Jean. » (Denis Thibault)

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