Les femmes ont-elles leur place dans le Plan Nord?

Par Steeve Paradis 28 octobre 2016
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Sylvie Ostigny, Micheline Anctil et Kathy Lévesque ont présenté le mémoire intitulé

Sylvie Ostigny, Micheline Anctil et Kathy Lévesque ont présenté le mémoire intitulé

Baie-Comeau – Sexisme, discrimination, harcèlement, horaires mal adaptés, prostitution. Décidément, le développement du Nord, et particulièrement la pratique du fly in fly out, n’a pas été pensé pour les femmes, à la lecture du mémoire sur Les femmes nord-côtières et le développement nordique.

Ce mémoire a été présenté à la Commission régionale femmes, créé en 2006 par la défunte Conférence régionale des élus de la Côte-Nord, qui vise l’amélioration des conditions de vie des Nord-Côtières. Et ces conditions de vie se dégraderaient pour les femmes qui sont touchées, de près ou de loin, par les grands chantiers. Pas nécessairement besoin d’y travailler pour être affectée.

« Le Plan Nord, c’est pas juste pour les hommes, mais ça creuse les inégalités entre les hommes et les femmes », déclare la coordonnatrice du Regroupement des femmes de la Côte-Nord (RFCN), Sylvie Ostigny. « On (les femmes) veut aussi en tirer des profits. »

Le mémoire, qui fait une revue de ce qui a été publié sur la planète à propos de ce phénomène, dresse un portrait guère flatteur de la situation des femmes en rapport avec le fly in fly out, ou navettage. Dans la liste des avantages et désavantages, ces derniers ont largement le dessus.

Augmentation du cout de la vie et du taux de pauvreté, familles chambardées, prostitution et hausse des problèmes sociaux sont au menu, sans oublier l’incontournable discrimination. « Les emplois dans les minières sont encore des emplois qui ont un sexe, masculin », a lancé la présidente de l’Assemblée des maires de la Côte-Nord, Micheline Anctil.

Faire pression

La Commission femmes entend maintenant faire pression sur le gouvernement pour la mise en œuvre des 20 recommandations émanant du mémoire. Ces recommandations vont, entre autres, d’un recours minimisé au navettage lorsqu’il y a une ville près du site d’exploitation à l’importance de mener des études supplémentaires sur ce phénomène, en passant par des services d’aide aux employés et leurs familles pour réduire les difficultés d’adaptation.

Le mémoire recommande également la mise en place d’un système de télécommunication « gratuit, efficace et privé » dans les chambres des travailleurs et travailleuses, l’adoption d’une politique de tolérance zéro à l’égard du harcèlement, de la discrimination, du sexisme et du racisme ainsi que des pratiques favorisant l’embauche locale et régionale.

Pour la Commission, un éventuel changement de cap doit passer par les élus, même si elle estime que l’industrie minière commence à être sensible aux impacts à long terme du navettage. « On peut s’asseoir avec eux (l’industrie minière) et leur proposer des choses, mais il va falloir que le gouvernement mette ses culottes et s’impose pour que tous les travailleurs, indépendamment du sexe, travaillent dans de bonnes conditions », poursuit Sylvie Ostigny.

La coordonnatrice du RFCN estime que Québec est déjà sensibilisé aux effets négatifs du fly in fly out. Le gouvernement écrit d’ailleurs dans son plan d’action 2015-2020 pour le Plan Nord que le développement nordique risque d’accroitre les inégalités entre les hommes et les femmes et entre les autochtones et les non-autochtones.

« S’il écrit ça, c’est qu’il en a conscience. Maintenant, je vais dire au gouvernement : « Qu’est-ce que tu fais avec ça ». On n’est pas contre le développement du Nord, il faut le faire intelligemment », conclut-elle.

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