Sœur Rose Dorr, tout un phénomène!

Par Charlotte Paquet 11 février 2017
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À 98 ans, sœur Rose Dorr est une véritable encyclopédie vivante. C’est après une carrière d’infirmière menée en parallèle avec ses rôles d’épouse et de mère qu’elle a été interpellée par Dieu. On l’aperçoit en compagnie de sœur Dominique Camirand. Photo Le Manic

À 98 ans, sœur Rose Dorr est une véritable encyclopédie vivante. C’est après une carrière d’infirmière menée en parallèle avec ses rôles d’épouse et de mère qu’elle a été interpellée par Dieu. On l’aperçoit en compagnie de sœur Dominique Camirand. Photo Le Manic

Baie-Comeau – Rose Dorr, qui vient de célébrer ses 98 ans le 10 février, est un phénomène. Ce petit bout de femme d’à peine quatre pieds et huit pouces a connu une vie hors du commun. Derrière ce visage rieur, cet esprit vif et cette démarche assurée, une petite sœur de la Famille Myriam Beth’lehem, qui a reçu l’appel de Dieu sur le tard après une carrière d’infirmière menée en parallèle à ses rôles d’épouse et de mère.

« Quatre-vingt-dix-huit ans, c’est beaucoup et je vous en souhaite autant. Vous reviendrez me voir pour mes 100 ans », lance avec bonne humeur la dame à la robe bleue typique des petites sœurs de Myriam à la journaliste du journal Le Manic en entrevue.

Rien ne laisse présager, aujourd’hui, qu’elle n’atteindra pas cet âge mythique. Mais comme on ne connait pas l’avenir, son 98e anniversaire de naissance est l’occasion de découvrir le parcours singulier de cette femme qui entretient encore son jardin, cuisine ses confitures à la rhubarbe et aux gadelles et fait de la couture.

Sœur Rose est heureuse. Son propos et son regard l’expriment. « J’ai été heureuse partout, car j’avais le caractère pour ça. Quand je suis décidée, je suis décidée. Quand c’est oui, c’est oui et quand c’est non, c’est non », martèle-t-elle.

Sa vieillesse, elle l’assume haut et fort. « Maintenant je suis une vieille. Je fais ma vie de vieillesse. J’ai dit oui à ma vieillesse et je suis capable pour encore plusieurs années. Il faut accepter le bon comme le mauvais, c’est la vie qui est comme ça », ajoute celle qui se dit en bonne santé, outre ses problèmes de surdité.

Véritable encyclopédie vivante, l’écouter se raconter, c’est plonger dans le monde des soins de santé à Baie-Comeau sur une période de trois décennies, des années 60 aux années 80. C’est entendre les noms de médecins que les plus vieux ont connus, comme le Dr Don Thurber, le Dr Jean-Yves Blackburn et le Dr Norman Poole. Il y a aussi le Dr Richard Nadeau (qui pratique toujours) dont le nom est glissé dans la conversation.

Infirmière, épouse et mère

Originaire de Saint-Cœur-de-Marie au Lac-Saint-Jean, Rose Tremblay (son nom de jeune fille) obtient son diplôme d’infirmière en 1947 et cinq ans plus tard, celui de technicienne de laboratoire.

En 1955, l’infirmière célibataire s’installe à Labrieville pour y travailler. C’est là qu’elle rencontre Roger Dorr qui deviendra son époux. Après avoir adopté un enfant, le couple emménagera à Baie-Comeau en 1965. Dix ans plus tard, un anévrisme emportera M. Dorr.

À son arrivée dans la Manicouagan, l’infirmière entre en poste à l’ancien hôpital Boisvert de la rue Carleton, aujourd’hui démoli. Par la suite, elle est transférée à l’Hôpital général (aujourd’hui le Centre d’hébergement Boisvert) de la rue Mance, inauguré en 1968. Elle y travaillera jusqu’à la fusion avec l’hôpital Hôtel-Dieu (aujourd’hui l’Hôpital Le Royer) de l’ex-ville de Hauterive, en 1980. Au cours des cinq années suivantes, Rose Tremblay Dorr aura la responsabilité de la salle de réveil au département de chirurgie.

« En 1985, à l’âge de 65 ans, j’ai pris ma retraite. Ils ne voulaient pas que j’arrête. Le Dr Nadeau me disait : « Reste avec nous autres, t’es encore en santé. » Aujourd’hui, le Dr Nadeau s’informe encore de moi quand il voit une robe bleue », raconte la nonagénaire d’un ton joyeux.

L’appel de Dieu

Quand Rose Tremblay Dorr a commencé sa retraite, rien ne laissait présager que sa route emprunterait un tel détour. « J’étais organisée pour faire une belle retraite. J’avais ma maison (rue Donald-Smith) et je venais de changer ma voiture. J’ai changé de direction parce que j’étais poussée à le faire par des interpellations », explique-t-elle.

C’est une session animée par sœur Jeanne Bizier, la fondatrice de la Famille Myriam Beth’lehem, au sein d’un groupe de prières dont la nouvelle retraitée faisait partie, qui a été l’élément déclencheur.

La parole «Ne viens pas à moi couverte de bijoux et sacrifie tes aromates », est venue chercher celle qui adorait justement les bijoux. « Ça revenait et ça revenait. Le Bon Dieu est drôle. Il a toutes sortes de trucs pour nous interpeller », note-t-elle, le sourire aux lèvres.

Qu’elle fasse le choix d’intégrer la communauté religieuse fondée à Baie-Comeau à un âge aussi avancé n’était d’ailleurs pas sans semer des inquiétudes chez la fondatrice qui craignait qu’elle trouve difficile la vie en groupe. « Sœur Bizier ne voulait pas que je rentre », avoue la petite sœur de Myriam, qui soutient n’avoir jamais eu à regretter son choix.

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