Finie la menuiserie pour les ainés du 20, rue Carleton

Par Charlotte Paquet 12 avril 2017
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On aperçoit Martin Houde dans l'atelier de menuiserie quelques jours avant sa fermeture. Photo Le Manic

Baie-Comeau – Les ainés de l’édifice à loyer modique du 20, rue Carleton à Baie-Comeau doivent se faire une idée. Après 40 ans à l’utiliser, les locataires n’ont plus accès à l’atelier de menuiserie depuis le 3 avril. La raison invoquée par l’Office municipal d’habitation (OMH) : le respect du code national du bâtiment. Martin Houde, un résident âgé de 84 ans, ne le prend tout simplement pas et parle d’un droit acquis.

« Moi, ça m’affecte beaucoup. Je fais de la peinture là. Je fabrique des cadres. J’ai aussi beaucoup de commandes de plaquettes de porte », souligne l’artisan. Au lieu de se bercer pour tuer le temps, l’homme s’amusait à l’atelier, comme il le dit si bien. « Je me levais le matin et j’étais heureux », laisse-t-il tomber.

Il n’était pas le seul à utiliser l’atelier, très bien équipé d’ailleurs avec notamment une scie à ruban, un banc de scie et un planeur. Selon l’homme, quelques résidents s’y rendaient à l’occasion pour effectuer une réparation ou divers travaux. Le concierge s’en servait régulièrement.

« C’est nécessaire d’avoir ça pour un bloc de 50 logements », mentionne-t-il. Même que l’atelier servait aussi aux ainés de l’immeuble voisin du 10, rue Carleton puisque leur propre local de menuiserie est fermé depuis plusieurs années.

Après avoir perdu, voilà quelques années, l’accès internet fourni dans un petit salon équipé d’un ordinateur, c’est maintenant au tour de l’atelier de menuiserie de subir le couperet de la direction de l’OMH, déplore le résident.

Restes de bois

L’atelier, dont le plancher est en béton, renfermait des pièces de bois laissées sur place par les utilisateurs au fil des ans. Elles étaient stockées au fond du local. Il y en avait aussi qui appartenait à M. Houde. Il s’en servait pour fabriquer ses cadres photo et ses plaquettes de porte. On ne parle pas de gros madriers ou de grandes planches de contreplaqué. C’était des petites pièces, des retailles, comme il le souligne.

Voilà quelques mois, le directeur général de l’OMH de Baie-Comeau, Michel Deschênes, l’a averti de ne pas entreposer de biens personnels dans cet espace considéré comme un vide sanitaire, puisque le code national du bâtiment ne le permettait pas en raison des normes d’incendie.

« Je suis allé cinq fois à l’hôpital depuis l’automne et je devais être deux mois en repos », mentionne l’octogénaire pour expliquer les raisons pour lesquelles il n’a pas donné suite à l’avertissement.

Dans une lettre datée du 22 mars, il était avisé de la fermeture de l’atelier aux locataires à compter du 3 avril. Tous les biens personnels qui s’y trouvaient devaient être récupérés, sinon ils seraient mis au rebut. M. Houde a sorti ce qui lui appartenait, mais une visite des lieux effectuée par Le Manic quelques jours avant la date butoir a permis de constater que des restants de bois étaient encore sur place.

Le citoyen a recueilli une cinquantaine de signatures de résidents des deux HLM de la rue Carleton à une pétition demandant le maintien de l’accessibilité à l’atelier de menuiserie. Il la remettra sous peu au conseiller municipal Yves Montigny, représentant de la Ville de Baie-Comeau au conseil d’administration de l’OMH. « Moi, je ne lâche pas le morceau. Dans le moment, je ne sais plus ben ben quoi faire de ma peau », a-t-il confié vendredi dernier.

Si la décision est maintenue, il est clair dans l’esprit de M. Houde qu’il se trouvera un nouveau chez-soi. Il a d’ailleurs entrepris des démarches auprès de l’Oasis des Pionniers. Il a même déjà visité un appartement, mais il était trop petit pour ses besoins. La direction de la résidence de la rue Pie-XII lui a fait visiter l’atelier de menuiserie en place et l’a assuré qu’il pourrait l’utiliser à sa convenance.

Réaction de l’OMH

Du côté de l’OMH, la présidente de son conseil d’administration, Karine Otis, comprend que la fermeture de l’atelier de menuiserie brime ceux qui s’en servaient, mais c’était la décision à prendre dans les circonstances, affirme-t-elle, à la suite du passage de l’inspecteur du centre de services des OMH dans Manicouagan et en Haute-Côte-Nord.

« Ce n’est pas le seul édifice de notre parc immobilier où on a dû fermer des salles. Quand on se rend compte que le local n’est plus aux normes, on ferme. On ne peut pas laisser aller, car on est responsable. On a des édifices vieux qui ne correspondent plus aux normes d’aujourd’hui », mentionne-t-elle, rappelant que la sécurité de l’ensemble des locataires prime sur tout.

Directeur général de l’OMH, Michel Deschênes indique que M. Houde a été averti à quelques reprises de retirer le bois et les produits qu’il entreposait dans l’atelier, mais « il ne collaborait pas ».

Dans une correspondance datée de décembre 2014, le service des incendies de la ville de Baie-Comeau considérait d’ailleurs l’accumulation de matières combustibles dans le secteur de l’ancienne allée de pétanque et dans l’atelier de menuiserie de l’édifice du 20, rue Carleton comme une anomalie à corriger. La question du bois laissé sur place n’était cependant pas abordée.