Jean-Martin Aussant déboulonne les mythes de l’entrepreneuriat collectif

Par Charlotte Paquet 9 Décembre 2017
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Directeur général du Chantier de l’économie sociale, Jean-Martin Aussant a terminé à Baie-Comeau une tournée des régions du Québec qui l’aura occupé pendant deux ans. Photo Le Manic

Directeur général du Chantier de l’économie sociale, Jean-Martin Aussant a terminé à Baie-Comeau une tournée des régions du Québec qui l’aura occupé pendant deux ans. Photo Le Manic

Baie-Comeau – Les stéréotypes qui entourent l’entrepreneuriat collectif sont tenaces, mais ils tombent une fois que l’on a entendu le discours du directeur général du Chantier de l’économie sociale, Jean-Martin Aussant.

Jeudi midi, une soixantaine de gens d’affaires et de représentants de ce modèle de développement économique ont écouté l’ancien politicien, qui a fondé le parti Option nationale à son départ du Parti québécois, leur décrire la réalité et les mérites de l’entrepreneuriat collectif pour faire face aux enjeux de développement et de relève en affaires.

M. Aussant a terminé à Baie-Comeau une tournée du Québec enclenchée voilà deux ans afin de démystifier ce pan méconnu de l’économie qui doit pourtant tendre, selon lui, vers l’équilibre avec l’État et le privé en matière de développement.

« Il faut qu’on en vienne à considérer les trois piliers quand on développe des projets. On se questionne si ça relève du gouvernement ou du privé, mais on oublie le collectif », déplore le conférencier, en précisant que le Québec est pourtant un leader mondial dans le domaine et le seul gouvernement ayant adopté une loi sur l’économie sociale et solidaire.

Mythes à déboulonner

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le taux de survie du modèle collectif est supérieur au privé. Dans le premier, près de la moitié fermeront leurs portes après 10 ans, tandis que dans le second, c’est 8 sur 10 qui mettront la clé sur la porte. « C’est un autre stéréotype qui tombe. Ce n’est pas vrai que c’est de la petite économie dont personne ne veut s’occuper, car c’est une forme d’entrepreneuriat qui est plus solide que le privé », a assuré M. Aussant.

Parmi les autres mythes à déboulonner, il y a celui de la création d’emplois. « Proportionnellement, les entreprises collectives sont plus grandes que les privées », martèle le directeur général, rappelant que des coopératives à plus de 100, 200 ou même 300 employés, il y en a.

Autre facteur qui milite en faveur de l’économie sociale, selon M. Aussant, c’est qu’une fois installées dans une communauté, ces entreprises y établissent des racines. Les grands conglomérats, eux, fermeront boutique pour transférer leur production dans une partie du monde si la main-d’œuvre leur coute moins cher.

« Pour une municipalité, j’aimerais mieux qu’une grosse entreprise collective s’installe chez nous plutôt qu’un grand conglomérat qui amène 300 emplois et qui repart avec ses 300 emplois », prévient-il.

Jeunesse et promesse

Le directeur général du Chantier de l’économie sociale se réjouit lorsqu’il voit les jeunes gens d’affaires. « On voit chez eux une pensée collective très développée qu’on ne voyait pas chez les générations passées », affirme celui qui constate que les jeunes entrepreneurs se valorisent davantage par leur impact dans leur communauté que par leur grosse maison ou leur grosse voiture. Ils favorisent un meilleur partage de la richesse.

L’entrepreneuriat collectif est aussi un bon moyen de contourner le manque de relève au sein des entreprises. « Le problème actuellement, c’est de trouver une personne pour succéder à une personne. La reprise collective, c’est la relève des prochaines années », poursuit-il. De plus en plus, ce sont les travailleurs qui reprendront les rênes de leur entreprise.

Des distinctions

M. Aussant a tenu à distinguer les organismes communautaires de l’entrepreneuriat collectif qui, selon lui, confondent encore. Les deux ont beau faire partie du pilier collectif et avoir ainsi des valeurs de solidarité, l’activité économique n’est présente que dans le deuxième.

Dans la Manicouagan, les Vêtements Norfil, la Coop de solidarité Gaïa et le Parc Nature de Pointe-aux-Outardes sont au nombre de ces entreprises dont les modèles de développement sont basés sur la formule coopérative ou encore celle d’organisme à but non lucratif.

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Cinq municipalités de la Côte-Nord sont visitées

Baie-Comeau – Le directeur général du Chantier de l’économie sociale, Jean-Martin Aussant, et la représentante du Réseau d’investissement social du Québec, Nathalie Villemure, se sont arrêtés à Havre-Saint-Pierre, Sept-Îles, Port-Cartier, Baie-Comeau et Portneuf-sur-Mer dans le cadre de leur tournée de la région, réalisée la semaine dernière en compagnie de représentants du Pôle d’économie sociale de la Côte-Nord.

À Baie-Comeau, M. Aussant et Mme Villemure ont visité le centre de travail adapté des Vêtements Norfil.

Ils ont également participé à un panel de discussion au cégep de Baie-Comeau, au côté d’entrepreneurs collectifs et d’étudiants, ainsi qu’à un diner-conférence organisé par la Chambre de commerce de Manicouagan (lire autre texte).

Le développement d’entreprises et de richesse sociales (ou collectives, expression plus utilisée par M. Aussant) a été au menu de la tournée nord-côtière.

En excluant les services financiers comme Desjardins ou La Capitale, la région compte une centaine d’entreprises d’économie sociale qui donnent de l’emploi à près de 1 000 personnes.

Selon les plus récentes statistiques du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, de 2005 à 2010, « la hausse du nombre d’emplois attribuables aux coopératives s’élève à 241 et 20 nouvelles coopératives ont été créées sur la Côte-Nord », mentionne Adam Desbiens, du Pôle d’économie sociale de la Côte-Nord, dans un communiqué.

Fait à noter, le Pôle d’économie sociale de la région regroupe des entreprises collectives et des acteurs de soutien dont la mission est de maximiser la contribution de l’économie sociale au développement des collectivités.

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