Soigner au détriment de sa propre santé

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L’infirmière Diane Dugas considère que ses dix dernières années ont été les pires en raison des mauvaises conditions de travail. Photo Le Nord-Côtier

L’infirmière Diane Dugas considère que ses dix dernières années ont été les pires en raison des mauvaises conditions de travail. Photo Le Nord-Côtier

Sept-Îles – Après plus de 25 ans de service, Diane Dugas, infirmière à l’hôpital de Sept-Îles, affirme que les dix dernières années de sa carrière ont été les plus difficiles, et de loin. Celle qui qualifie la réforme Barette de « véritable échec » a raconté la « détresse psychologique » dont elle aurait été témoin.

« J’ai vu plusieurs infirmières s’effondrer en pleurs. Elles étaient au désespoir et avaient peur de travailler parce qu’elles ne savaient pas si elles allaient pouvoir donner les soins de manière sécuritaire », se souvient-elle.

Selon Diane Dugas, l’hôpital de Sept-Îles aurait des centaines de postes non comblés, et ce, depuis plusieurs années. « Ces postes-là trainent depuis plusieurs années et ils ne sont jamais affichés. L’employeur offre beaucoup d’emplois de type « sept quarts par deux semaines » et nous dit que c’est ce que les gens veulent. Les gens, ce qu’ils veulent, c’est travailler dans des conditions respectables et ne pas avoir des heures supplémentaires obligatoires », insiste celle qui est aussi responsable du réseau et vice- présidente de la Côte-Nord au Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du nord-est québécois (SIISNEQ).

Couper les coins ronds

Le manque de personnel aurait pour effet de surcharger les infirmières. Diane Dugas avance que ses consœurs doivent quotidiennement couper les coins ronds pour arriver à soigner chaque patient. « On voit ça tous les jours », affirme l’infirmière de 53 ans.

La surcharge empêcherait même les infirmières de mettre les rapports et les suivis à jour. « Il peut y avoir des retards de plus d’un mois. S’il arrive quelque chose à l’infirmière demain matin, comment le secteur va-t-il faire pour s’en sortir sans ce suivi-là? », se demande-t-elle.

Même l’application des normes de l’Ordre professionnel des infirmières et infirmiers du Québec serait bâclée. « Les ordres professionnels nous imposent des normes qu’on ne peut pas remplir ou que pour lesquelles nous manquons de temps », estime-t-elle.

Otage au travail

L’infirmière se rappelle très bien de l’histoire de Francine, l’une de ses collègues qui s’était fait imposer quatre soirées d’heures supplémentaires obligatoires d’affilée, en raison d’un manque de personnel.

« Comment peut-on prévoir qu’une infirmière va rester pour faire des heures supplémentaires obligatoires? Si elle doit rester à la maison, ils vont aller la chercher chez elle?», lance-t-elle.

Aux yeux de Diane Dugas, les infirmières ont le devoir d’aviser leurs supérieurs si elles ne se sentent pas en mesure de continuer à travailler. Pourtant, elle-même aurait déjà été contrainte à faire des heures de travail supplémentaires même s’il elle ne s’en sentait pas apte.

Après avoir dénoncé la situation auprès de la direction, l’infirmière prétend avoir reçu une lettre dans son dossier dans laquelle elle était accusée « d’avoir manqué de professionnalisme et d’avoir chialé toute la nuit ».

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