24 avril 2024
Baie-Comeau – Dans l’imaginaire collectif, le bon docteur qui visite ses patients à la maison est un phénomène appartenant à une époque révolue. Pourtant, au Québec, des médecins se spécialisent dans les soins à domicile et dans la Manicouagan, le Dr Ivan Ubeda y consacre une pratique quasi exclusive.
Installé en région depuis janvier 2018, le médecin de 36 ans, né au Québec mais dont les origines sont chiliennes, a décidé que la prise en charge des patients à domicile occuperait la majeure partie de ses journées. « L’image du médecin à la petite mallette, ça ne me déplaît pas », précise-t-il avec le sourire, en référence à l’image du passé.
Celui qui a gradué en 2012 a développé de l’intérêt pour le domaine des soins palliatifs précoces dans la région de Québec. Une fois installé dans la Manicouagan, c’est tout naturellement qu’il s’est tourné vers les soins à domicile. « Je trouve que les soins à domicile sont moins développés à Baie-Comeau. Ce qui m’intéresse encore plus que d’être à l’hôpital, c’est de complémenter l’offre. J’ai essayé de mettre ma contribution où j’ai de l’intérêt », explique-t-il, en soulignant n’être qu’un maillon de l’équipe multidisciplinaire à l’œuvre dans ce secteur.
En perte d’autonomie
Les personnes âgées avec des pertes physiques et cognitives constituent la majeure partie de la clientèle du Dr Ubeda. Les gens aux prises avec des maladies cardiaques ou pulmonaires à un stade plus avancé et dont la tolérance à l’effort et aux déplacements est plus difficile bénéficient des soins à domicile.
La vulnérabilité de ces patients l’interpelle. « Pour la grande majorité, la sortie est laborieuse. Ça va prendre la demi-journée pour y aller (au rendez-vous en cabinet) et la demi-journée pour se reposer de cette sortie. Je vise cette niche-là », explique le médecin, qui traite parfois des gens qui ne sont pas sortis de chez eux depuis un an ou deux.
Le médecin se voit comme l’un des acteurs qui permettront aux gens de demeurer plus longtemps à la maison. Le dilemme éthique entre l’autonomie et la sécurité est omniprésent, mais, comme il le soulignera, « l’idée là-dedans, c’est d’aller jusqu’où la personne veut aller et la famille est d’accord ».
Le développement de la pratique médicale à domicile présente d’autres avantages. « À la blague, c’est moins plate (pour les patients) d’attendre chez eux que dans une salle d’attente. Quand je suis un peu en retard, c’est moins plate d’attendre dans son salon », lance le médecin en riant.
L’État y gagne également. Comme le souligne le Dr Ubeda, il est reconnu que de s’occuper d’un patient à domicile coûte moins cher qu’à l’urgence. « Un épisode de soins peut être moins coûteux à la maison, mais pour ça, il faut toute l’équipe », insiste-t-il.
Un retour
Interrogé sur le côté peut-être un peu moins sexy d’une pratique comme la sienne, par rapport à un médecin qui fait du bureau ou encore de l’hospitalisation ou de l’urgence, le Dr Ubeda répond que les choses sont en train de changer à ce chapitre.
« Je pense que ça commence à le redevenir. Plus on va en voir et plus ça va revenir », assure celui qui tente de recruter d’autres collègues à emprunter cette voie. Il fait de même auprès des résidents qui poursuivent leur formation au Groupe de médecine familiale de Manicouagan.
« C’est une nouvelle tendance. C’est comme le retour du balancier vers les soins à domicile dans plusieurs milieux au Québec », ajoute le médecin. Il va à la rencontre de ses patients avec un sac qui renferme ses instruments de travail, dont un petit ordinateur qui lui donne accès à leurs résultats d’examens de laboratoire ou d’imagerie médicale.
Les patients qu’il prend en charge lui sont référés par d’autres professionnels de la santé. Ce n’est donc pas à lui de décider si telle ou telle personne est candidate à obtenir des soins de santé à domicile.
Fait à noter, le Dr Ubeda n’est pas le seul à voir des patients à la maison dans la Manicouagan, mais il est le seul à s’y consacrer presque entièrement.
