Choisir la non-reconstruction de ses seins malgré tout

Par Charlotte Paquet 7:26 AM - 18 Décembre 2019
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Marie-Claude Belzile vient de publier Penser le sein féministe. La Baie-Comoise d’origine y aborde le choix de la non-reconstruction après une mastectomie et le « paternalisme médical » qui préconise le contraire et porte même des médecins à choisir pour leurs patientes. Photo courtoisie

Une trentenaire originaire de Baie-Comeau, Marie-Claude Belzile, vient de publier Penser le sein féministe, un livre dans lequel elle aborde un sujet qui lui est très cher, la non-reconstruction des seins après une ablation dans un contexte de cancer.

Penser le sein féministe a été lancé le 29 novembre à Montréal, où est installée l’auteure. Dans les 86 pages du bouquin, ce qui exclut la partie des références, elle y démystifie le choix de vivre avec une poitrine plate après une mastectomie alors que, raconte-t-elle, le milieu médical préconise le contraire et va même jusqu’à décider pour les patientes.

« J’ai écrit ce livre parce que j’ai moi-même eu une expérience choquante de la mastectomie », a-t-elle précisé lors du lancement. Des recherches lui ont permis ensuite de réaliser qu’elle était loin d’être seule dans sa situation.

Par son ouvrage, elle espère ouvrir le dialogue avec le monde médical, mais aussi avec les femmes sur la pression qu’elles peuvent avoir de leur médecin, de leur conjoint ou de la société sur l’option de reconstruction. Elle souhaite que les femmes qui choisissent une non-reconstruction vivent bien psychologiquement avec leur choix.

Diagnostic à 29 ans

Il faut dire que Marie-Claude Belzile sait de quoi elle parle. Diagnostiquée d’un cancer du sein agressif en 2016 à l’âge de 29 ans, la jeune femme a dû subir l’ablation de ses deux seins l’année suivante. « Je ne voulais pas de reconstruction. Ça avait été clair avec mon oncologue. »

Celle dont le cancer métastatique incurable l’oblige à de la chimiothérapie en continu avait, pour différentes raisons, choisi de « vivre poitrine plate », comme elle le dit si bien.

Or, il s’en est fallu de peu qu’elle ne se réveille de sa chirurgie avec des expanseurs en prévision d’une reconstruction à venir à l’aide de prothèses mammaires, car c’était ce qui avait été écrit sur la requête formulée par son médecin.

Paternalisme médical

En effet, en raison de ce qu’elle décrit comme du paternalisme médical, son choix n’avait pas été pris en compte, même si elle l’a mentionné à plusieurs reprises, et devant sa femme comme témoin. Son chirurgien oncologue avait jugé bon de choisir la reconstruction pour elle, dénonce-t-elle.

Heureusement, le hasard – elle parle de chance – a fait qu’elle a vu la requête d’opération dans les mains d’une infirmière. Il y était écrit pose d’expanseurs et reconstruction.

Une autre visite chez son chirurgien lui a permis de corriger le tir à temps. Le spécialiste invoquait son jeune âge comme motif à la reconstruction. « Dans sa tête, il était incapable de concevoir que je décide de vivre sans mes seins. Il décidait que la reconstruction serait mieux pour moi. Cette expérience est absolument ancrée dans une vision sexiste du corps des femmes et dans le paternalisme médical », déplore Marie-Claude Belzile.

D’autres cas

Après son expérience pour le moins traumatisante, l’auteure s’est lancée dans des recherches sur les réseaux sociaux pour essayer de trouver d’autres femmes qui ont vécu la même chose qu’elle.

Elle n’en a pas trouvé au Québec, mais s’est aperçue qu’ailleurs, des communautés existaient sur Facebook et Instagram. « Je me suis rendue compte que plein de femmes avaient eu de la difficulté à faire respecter leur choix. »

Certaines se sont même réveillées avec un excès de peau parce que leur chirurgien avait jugé bon qu’elles pourraient changer d’idée plus tard.

Comme aucun groupe n’existait au Québec, elle a décidé de le créer en 2017 avec la page Facebook Tout aussi femme. À partir de ce moment-là, plusieurs femmes lui ont écrit et elle a réalisé l’ampleur du problème.

« On n’est pas capable de concevoir qu’une femme peut être bien sans ses seins, alors que ça se peut », conclut l’auteure.

Publié aux éditions L’Esprit libre, Penser le sein féministe devrait être disponible à la Librairie A à Z à Baie-Comeau dans les prochaines semaines. Il est cependant déjà possible de se le procurer à la boutique en ligne de L’Esprit libre.

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