Décès de sa grand-mère : Karyne Huard se raconte pour ne plus que ça arrive

Par Josianne Bérubé 6:00 AM - 3 août 2021
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Marie-Claire Duguay est décédée en avril 2020 dans des circonstances déplorables, soutient sa petite-fille, Karyne Huard, qui s’est confiée au Manic pour qu’une pareille situation ne se reproduise plus. Photo courtoisie

Karyne Huard a perdu sa grand-mère bien-aimée, le 20 avril 2020, dans des circonstances qui n’auraient pas dû se produire, selon elle, à l’Hôpital Le Royer de Baie-Comeau. Ses dénonciations en haut lieu ont porté fruit et avec ce résultat, elle souhaite maintenant que personne d’autre n’ait à vivre ce qu’elle a vécu.

Marie-Claire Duguay, la grand-mère de Mme Huard, est entrée à l’hôpital pour des difficultés respiratoires le 13 avril 2020. La petite-fille assure qu’elle ignore de quoi sa grand-mère est morte exactement. Une insuffisance respiratoire pourrait être l’une des causes de son décès. Mme Duguay souffrait de maladies chroniques connues, dont une « leucémie de personne âgée » et une maladie pulmonaire.

Karyne Huard a eu accès au dossier de sa grand-mère deux mois après en avoir fait la demande. La petite-fille de Mme Duguay indique avoir fait les dénonciations après avoir, notamment, pris connaissance du dossier et décelé des anomalies.

La femme affirme que ce qu’elle a vécu pendant l’hospitalisation de sa grand-mère, soit du 14 au 20 avril 2020, et dans les heures suivant le décès de cette dernière, est dû à une succession d’erreurs (voir autres textes page 4).

Elle a déposé officiellement le 9 septembre 2020 une plainte contre le premier médecin qui a traité sa grand-mère. Elle a ensuite fait une dénonciation contre le deuxième médecin le 27 octobre 2020. Les plaintes contre les médecins concernent les soins apportés à Marie-Claire Duguay.

Mme Huard soutient avoir eu peu d’appels de la part du personnel de l’hôpital pour la tenir au courant de l’état de santé de sa grand-mère, à partir du moment où cette dernière est rentrée à l’hôpital jusqu’à son décès. À ses dires, elle a même dû, à deux reprises, faire des publications sur Facebook, dont une afin de savoir comment allait sa grand-mère, et ça a fonctionné.

De plus, Marie-Claire Duguay a changé de chambre huit fois en six jours et 50 % des téléphones dans les chambres ne fonctionnaient pas, toujours selon sa petite-fille.

Trois options

Le 16 avril 2020, le médecin traitant a noté au dossier de sa patiente que si son état ne s’améliorait pas, les soins palliatifs étaient à considérer. Mme Duguay aurait donc pu terminer ses jours chez sa petite-fille, à la Vallée des Roseaux ou à l’hôpital et avoir des visites pour des motifs humanitaires, rappelle Karyne Huard.

« Moi ce qui m’enrage, c’est que le 16 avril, on avait trois possibilités qui s’offraient à nous. (…) En plus d’avoir vu tout ça, ils nous ont enlevé quatre jours », explique avec émotion la petite-fille.

Les deux médecins qui ont soigné Marie-Claire Duguay ont été réprimandés. Des suggestions et des demandes leur ont été faites de la part du Commissariat aux plaintes et à la qualité des services du CISSS de la Côte-Nord.

Ces suggestions sont à l’effet d’augmenter leurs communications avec les familles, d’utiliser des pistes d’explications claires concernant l’état de santé du patient ainsi que de réévaluer à chaque admission le niveau de soins avec le patient et d’impliquer la famille le plus souvent possible dans la décision. Pour ce qui est du deuxième médecin, il lui a aussi été suggéré de ne pas déléguer à un résident en médecine la tâche de communiquer avec la famille.

De plus, le Commissariat a suggéré aux départements d’urgence et de médecine générale de favoriser la communication avec les familles.

Il a aussi recommandé au département de médecine générale de favoriser la mise à jour des informations de ses membres sur les politiques de santé publique au sujet des visites humanitaires en temps de pandémie. Le Commissariat a finalement déposé une demande à la direction des soins infirmiers afin de réévaluer l’amélioration des habiletés de communication de ses membres.

Une autre plainte pour le traitement de la dépouille

Karyne Huard n’a pas seulement déploré les événements précédent le décès de sa grand-mère en avril 2020. Elle a aussi déposé une plainte concernant le traitement du corps de Marie-Claire Duguay après sa mort à l’hôpital de Baie-Comeau.

Après le décès de sa grand-mère, Mme Huard dit être allée à l’hôpital et avoir croisé une petite cousine. Elle indique qu’elles sont montées ensemble voir le corps de Mme Duguay. Karyne Huard affirme qu’elles ont vu le corps dans un état qu’elles n’auraient pas dû et qu’elles ont dû s’occuper du corps de la défunte. Elles ont, entre autres, enlevé les appareils qui y étaient raccordées.

C’est tous des trucs que je n’avais pas besoin de savoir, en plus de ce qu’on avait vécu dans la semaine

Karyne Huard

Selon Mme Huard, la dépouille de Mme Duguay est restée environ 16 heures dans une chambre d’hôpital. De plus, toujours d’après ses dires, une amie qui travaille au salon funéraire a dû expliquer au personnel en place au moment de l’appel la marche à suivre avec un corps en temps de pandémie.

Pourtant, Mme Huard affirme, après avoir eu des informations, que le 6 avril 2020, la Santé publique du Québec avait envoyé un pictogramme expliquant la façon de faire avec le corps d’une personne décédée de la COVID-19 ou non en temps de pandémie.

Pour ce qui est de la plainte entourant le traitement de la dépouille de Mme Duguay, Karyne Huard n’a toujours pas eu la lettre avec les recommandations, mais la commissaire aux plaintes et à la qualité des services lui a expliqué ce qu’il est en avec les recommandations. Au départ, elle visait le personnel soignant en poste lorsque Marie-Claire Duguay est décédée, puisque personne n’a touché à son corps à partir du moment où elle a succombé.

De plus, le personnel présent au poste d’infirmières lui a dit qu’il allait s’occuper d’appeler la maison funéraire en raison du changement presque constant des règles, ce qui n’a pas été fait.

Toutefois, la dénonciation est devenue générale, parce que les personnes concernées ne sont plus à l’emploi du CISSS de la Côte-Nord. Personne ne peut donc être réprimandé.

Les recommandations du Commissariat aux plaintes et à la qualité des services concernent, notamment, la formation, la communication et la transmission de l’information.

Des résultats à la hauteur pour Karyne Huard

Karyne Huard est satisfaite des résultats des plaintes qu’elle a faites en haut lieu. Par contre, elle n’est pas contente d’avoir dû se rendre jusque-là pour avoir le fin mot de l’histoire.

« Moi, j’ai le cœur sur la main. Donc, c’est sûr que de savoir que ça va aider du monde. Au moins, le but était là. Ça ne la ramènera pas, mais calvâsse que je suis contente d’avoir été jusqu’au bout pour d’autres personnes », lance Karyne Huard.

Mme Huard a un message pour les gens. « La première affaire, je veux dire au monde qu’il ne faut pas se gêner de pousser. Je veux que le monde arrête de se sentir mal d’appeler pour des nouvelles et de se renseigner, parce que c’est la famille qui est là pour le patient. (…) Le message c’est que je veux vraiment que le monde aille au bout de leur ressenti, de ce qu’il pense », dit-elle.

Karine Huard veut rendre sa situation publique, notamment, pour que les gens ne craignent pas de se lancer dans le processus de plainte, parce que, selon son expérience, les plaignants sont bien accueillis et que ça peut porter fruit.
« Toutes les personnes qui m’ont répondu, autres que le personnel soignant, c’était super. Mais on va à l’hôpital pour quoi? Pour se faire soigner », commente la femme.

Le processus de plainte a été long, puisque le processus s’est terminé il y a environ un mois. Cette situation est due, entre autres, à la pandémie.

Karyne Huard était l’aidante naturelle de sa grand-mère depuis 2015. Marie-Claire Duguay demeurait chez sa petite-fille. Mme Huard a été élevée par sa mère, décédée en 2015, et sa grand-mère.

Rappelons que Marie-Claire Duguay, une grande partisane du Drakkar de Baie-Comeau, est décédée à l’âge de 85 ans.

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