Une élection mal-aimée

Par Raphaël Hovington 6:00 AM - 1 octobre 2021
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Justin Trudeau a raté son pari de décrocher une majorité de sièges à la Chambre des communes.

Dans l’histoire du Canada, c’est même l’élection fédérale la plus mal-aimée. Pourquoi? Les Canadiens n’en voulaient tout simplement pas en plein été dans le contexte d’une quatrième vague de la pandémie de la COVID-19.

Le premier ministre Justin Trudeau réclamait un mandat clair à un moment charnière où il faut rebâtir l’avenir du pays sur des bases solides. En réalité, ne désirait-il pas « avoir les deux mains sur le volant », comme le claironnait si bien Mélanie Joly, en décrochant une majorité de sièges? Les Canadiens n’ont pas comblé son vœu, mais lui ont tout de même confié un troisième mandat aux commandes du pays dans un gouvernement minoritaire.

Les deux mots commençant par la lettre M, une lettre à faire frissonner les stratèges politiques. Minoritaire! Majoritaire! On dit que le gouvernement fonctionnait bien avant le déclenchement des élections. Tous les chefs politiques l’affirment; mais, on le sait, en coulisses, tous se préparaient à courtiser l’électorat canadien avec des programmes plus généreux les uns que les autres. Les affiches électorales étaient prêtes à polluer notre environnement. L’avenir de ce gouvernement ne tenait qu’à un fil, celui de la convoitise du pouvoir. Qui croire?

Les Canadiens manquaient d’enthousiasme en pleine crise covidienne. Le taux de participation le démontre, mais cette élection était, à mon avis, essentielle, même si elle occasionne une dépense de plus de 600 M$. La démocratie n’a pas de prix et ne doit pas se frapper à un mur parce qu’une épidémie s’abat sur un pays. L’élection de 2021 n’a guère influencé la position des partis politiques sur la scène canadienne. Mais Justin Trudeau a amélioré sa position avec des gains et ajouté un peu de couleur rouge dans l’ouest canadien.

Les commentateurs soutiennent que les chefs sont tous perdants à l’issue de ce scrutin. Je ne suis pas de cet avis, car cette élection fera comprendre aux Canadiens la nécessité d’apprendre à diriger leur pays dans un contexte où il ne sera peut-être plus possible à l’avenir d’obtenir de solides majorités à la Chambre des communes. Il faudra ainsi se faire à l’idée de gouverner en négociant des concessions, ce qui peut s’avérer très positif. Ainsi, les meilleures idées émanant des partis politiques pourraient contribuer à la mise en place de politiques plus réalistes et plus proches des préoccupations des citoyens.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur cette campagne, mais je crois que le message le plus clair que les électeurs ont envoyé aux hommes politiques est le suivant : soyez transparent et précis dans vos engagements. Erin O’Toole l’a compris sur le tard. Même s’il a remporté le vote populaire, ses tergiversations, ses faux-fuyants et ses lignes apprises par cœur ne lui ont pas permis de réaliser son désir de gouverner le pays. Sa carrière politique est terminée car, on ne doute pas, qu’il devra démissionner à court terme. Même chose pour celle de la cheffe du Parti vert qui a mordu la poussière en Ontario.

Quant à Yves-François Blanchet, il visait trop haut, mais son avenir politique n’est nullement remis en question. Pour ce qui est de François Legault, il aurait pu se garder une « petite gêne » en évitant de suggérer aux Québécois pour qui voter. Son attitude le place dans une mauvaise posture face à M. Trudeau, qui demeure au pouvoir grâce aux votes du Québec.

Cependant, qui pourrait lui reprocher de défendre les compétences et les valeurs des Québécois et des Québécoises, entre autres, l’avenir du français. Cette élection me suggère que le Québec, déjà minoritaire au Canada, est en train de le devenir sur son propre territoire.

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