Vaccination obligatoire : les usagers des ressources intermédiaires en paieront le prix

Par Charlotte Paquet 10:57 AM - 7 octobre 2021
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Gestionnaires de ressources intermédiaires, Isabelle Bouffard, Brigitte Fortin, Sylvie Thibeault et Geneviève Tremblay se préparent, bien malgré elles, à réduire les services à leurs usagers en raison de l’obligation pour leurs employées d’être adéquatement vaccinées le 15 octobre.

Des gestionnaires de ressources intermédiaires de Baie-Comeau tirent la sonnette d’alarme. Avec jusqu’à la moitié de leur personnel non vacciné, elles s’arrachent les cheveux à l’approche du 15 octobre et craignent le pire pour leur clientèle en déficience intellectuelle et en trouble du spectre de l’autisme, qui présente souvent des troubles du comportement et d’agressivité.

« Le 15 octobre, on a une rupture de services par manque de personnel, vu que le gouvernement nous oblige à suspendre sans solde nos intervenantes qui ne sont pas vaccinées avec les deux doses et on est déjà en sous-effectifs », déplore Isabelle Bouffard, gestionnaires des résidences Martel-de-Brouage et Labrie.

Mme Bouffard, elle-même en attente de sa deuxième dose de vaccin, ainsi que ses consoeurs sont inquiètes pour le sort qui attend leurs 44 usagers. « On ne sait pas ce qui va se passer avec eux autres, parce que les plans de contingence sont irréalistes », poursuit la dame en faisant référence notamment à la suggestion du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Côte-Nord de retourner les personnes dans leurs familles. « La plupart, ils n’ont plus de famille. C’est nous leur famille », enchaîne Sylvie Thibeault, de la résidence Moyac.

L’exclusion des employées non vaccinées entraînera le non-comblement de quelque 250 heures par quinzaine dans la plupart des résidences. Les gestionnaires soutiennent s’être fait dire que du personnel d’agence leur donnerait un coup de main, mais que la différence de salaire leur incomberait. On parle facilement du simple au double, ce qu’elles ne peuvent assumer.

Moins de bains

Avec ce qui s’en vient, il est évident que les services aux usagers écoperont, selon les gestionnaires. Geneviève Tremblay, de la résidence Genévrier, parle de devoir passer d’un bain aux deux jours à un bain par semaine et de ne pouvoir compter que sur une seule employée pour des tâches qui en nécessitent deux normalement.

« Qu’est-ce qui est important avant tout? D’avoir tout le personnel vacciné ou de donner des services? », questionne Brigitte Fortin, de la résidence Centre de l’amitié Nazareth, qui n’aura aucune employée pour faire les nuits à compter du 15 octobre.

Quelques employés ont déjà quitté le navire depuis l’annonce d’une date butoir pour obtenir les deux doses. Pour les gestionnaires, il est déjà difficile de garder leur monde qui passe parfois au réseau public ou change littéralement de domaine.

Une responsable s’est déjà fait dire par une employée qu’elle préférait « aller tourner des boulettes chez McDo pour le même salaire ». « On ne mange pas de claque dans le visage. On ne se fait pas cracher dessus. On a beaucoup moins de responsabilités », laisse tomber Isabelle Bouffard.

Solutions proposées

Pour éviter que les résidences intermédiaires frappent un mur le 15 octobre, leurs gestionnaires souhaitent que le gouvernement repousse la date butoir de manière à ce que certaines intervenantes puissent avoir leur deuxième dose.

L’autorisation de recourir à des tests de dépistage rapides pour les non-vaccinées, ce qui se fait déjà dans le réseau de la santé, pourrait aussi être une autre solution.

Enfin, les gestionnaires considèrent que la réalité épidémiologique encourageante de la Côte-Nord devrait être prise en compte par le gouvernement. D’ailleurs, le peu de cas et de décès survenus depuis le début de la pandémie pourrait expliquer l’hésitation de certaines à se faire vacciner, croit Isabelle Bouffard.

Du côté du CISSS, on souligne dans un courriel que la tenue de cliniques de vaccination dans certaines ressources intermédiaires a permis d’augmenter la couverture vaccinale. « Tout comme le CISSS, les différentes ressources doivent préparer un plan pour faire face à un possible manque de main-d’œuvre. Cela peut inclure par exemple une réorganisation des activités et des tâches et la participation des proches aidants », indique-t-on aussi.

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