Natasha Kanapé, originaire de Pessamit, lance un mini-album en novembre

Par Colombe Jourdain 10:11 AM - 11 novembre 2021
Temps de lecture :

Natasha Kanapé sort son premier EP intitulé Nui Pimuten I le 19 novembre en version numérique.

L’artiste innue aux multiples talents, Natasha Kanapé, lance un premier EP comprenant six pièces issues de son spectacle Nui Pimuten – Je veux marcher qui sortira en version numérique le 19 novembre.

La native de Pessamit a choisi de faire un EP plutôt qu’un album complet parce qu’elle voulait fixer les textes les plus mûrs et dont elle est le plus fière. « Les gens qui sont venus voir le spectacle vont reconnaître les chansons, maintenant dans leur forme finale avec les arrangements musicaux de Manuel Gasse », affirme l’artiste.

Effectivement, ses chansons ont évolué au fil de sa tournée entreprise en 2018 et reprise en octobre dernier après un arrêt obligé dû à la COVID-19. « Maintenant qu’elles ne bougent plus vraiment, c’était le bon moment pour les enregistrer », ajoute-t-elle.

Avec son spectacle et ses chansons, Natasha espère créer des lieux, des instants de rencontre entre les peuples. « On manque d’occasions de vraiment partager les mêmes espaces, continuer les réflexions, les conversations, mais aussi bâtir des liens entre les communautés pour vivre ensemble dans le respect », soutient l’écrivaine-chanteuse.

La poète innue a la volonté de continuer à écrire dans sa langue, qu’elle a dû se réapproprier après l’avoir perdue. Elle espère contribuer à faire diminuer le racisme et un jour peut-être effacer la discrimination souvent vécue par les membres de sa communauté. « Plus on va être dans l’espace public, plus on va pouvoir cohabiter, tous ensemble », affirme Mme Kanapé.

Elle pense à la crise d’Oka, un moment charnière de l’histoire, où les Québécois ont appris à avoir peur des autochtones, cette peur qui a subsisté longtemps. Sa communauté a dû apprendre à vivre avec les conséquences de cette crise, mais ce qui se passe présentement, ça commence à effacer la distance.

En parlant de Joyce Echaquan, elle soutient avoir ressenti « un grand vent de solidarité, avec les marches, les manifs, mais c’est aussi au quotidien que les autochtones ont vu une différence dans l’accueil, d’être enfin accueillis avec le sourire et par des gens qui ont fait des efforts pour apprendre des mots pour les accueillir dans leur langue. Cet événement malheureux a permis de changer la perception des gens quand même rapidement ». 

Au sujet des pensionnats autochtones et les sépultures anonymes d’enfants autochtones, elle avance que « c’était dur à comprendre l’ampleur du génocide ». Elle est allée dernièrement à Vancouver pour l’écriture et devant la galerie d’art de Vancouver et raconte « qu’il y a un site de commémoration et il y avait une pancarte écrit it’s okay to cry here (c’est correct de pleurer ici), je me suis mis à brailler, comme si on m’avait donné la permission de me relâcher et d’accepter que je puisse encore ressentir ça devant un site comme ça », explique-t-elle.

De voir des gens, non autochtones, qui prenaient le temps de s’y arrêter, de prendre un moment de silence dans le brouhaha de la ville l’a émue. « Ces gens prennent la peine de venir se recueillir, ça nous prendrait ça ici aussi, un lieu où tout le monde aurait l’occasion de vivre ça avec nous autres », fait valoir l’artiste engagée.

Celle qui fait présentement une maîtrise en lettres se penche sur la spiritualité traditionnelle innue qu’elle voit plutôt comme une philosophie et elle tente, par ses gestes, ses écrits, de redonner l’essence de cette philosophie à son peuple et lui donner une valeur.

Elle vit maintenant à Montréal, mais rêve, au moins une fois par année, de retourner sur le Nitassinan, territoire qui lui manque, pour y faire une expédition, un portage pour se recentrer, se resituer dans son identité, mais aussi pour nourrir son inspiration. Quand elle écrit, elle s’imagine souvent à Pessamit ou « dans le bois », parce que c’est chez elle qu’elle se sent plus proche de la nature, de son identité et ça constitue pour elle un lieu de repos.

L’artiste multidisciplinaire continue sa tournée en 2021-2022 pour présenter son EP, mais aussi pour aller à la rencontre des gens. Natasha Kanapé sortira également un roman d’ici la fin du mois de novembre qu’elle lancera au Salon du livre de Montréal. Ce roman, c’est un peu son histoire à elle. Une fille qui a grandi en dehors de sa culture, qui part à Montréal et qui devra retourner à ses racines pour retrouver ce qui lui manque, son identité.

Partager cet article