Drogues sur la Côte-Nord : un appel à la prudence
Photo courtoisie
Dans les dernières semaines, notre région a été la scène de plusieurs épisodes inquiétants en lien avec la consommation de drogues chimiques. Des échantillons prélevés dans la drogue retrouvée ont permis de déceler des traces de fentanyl, un opiacé 100 fois plus puissant que la morphine. Dr Richard Fachehoun, directeur de la santé publique pour la Côte-Nord, s’est penché sur la problématique.
« Il faut d’abord comprendre que d’autres analyses plus poussées devront être effectuées pour confirmer la présence de fentanyl chez les patients hospitalisés des suites d’une surdose. Le test rapide de détection est fiable, mais ne fait pas foi de tout », lance d’entrée de jeu Dr Fachehoun.
Le puissant opiacé a été détecté dans des comprimés de méthamphétamine. Il faut toutefois rappeler qu’il peut se retrouver dans presque toutes les drogues de rue, au même titre que plusieurs autres produits potentiellement nocifs pour la santé.
Avec 16 intoxications au fentanyl pour 100 000 personnes depuis le début de l’année 2022, la Côte-Nord compte deux fois plus de cas que la moyenne provinciale pour le même ratio. Une statistique qui n’inquiète pas Dr Fachehoun outre mesure.
« Il s’agit encore de petits chiffres, c’est pourquoi nous sommes en mode vigilance pour l’instant », rassure-t-il.
Le spécialiste rappelle aussi que les surdoses de fentanyl ne sont pas toujours liées à la consommation de drogues de rue. En effet, cet opioïde est aussi utilisé médicalement, entre autres, dans les cas de douleurs intenses ou chroniques. Les usagers en souffrance sont donc aussi vulnérables aux surdoses.
Dr Fachehoun met l’emphase sur la réduction des méfaits dans son combat contre les effets dévastateurs du fentanyl.
« Pour les consommateurs de drogues de rues, la réduction des méfaits peut être de se procurer des bandelettes de tests rapides, afin de s’assurer que leur drogue ne contient pas de fentanyl, ou bien d’avoir en leur possession une trousse de naloxone en cas de surdose », explique-t-il.
La naloxone a la propriété d’arrêter l’action des morphiniques lors d’une intoxication aiguë. Pour les usagers du fentanyl sous ordonnance, Dr Fachehoun insiste sur le respect du dosage prescrit lors de la prise du produit, car même la plus petite des augmentations peut s’avérer fatale. Il conseille également aux détenteurs de prescription pour du fentanyl de ne pas partager cettedite prescription et de retourner les doses non utilisées à la pharmacie. Ces conseils s’appliquent à tous les médicaments d’ordonnance.
« Je conseille à tous les gens qui sont en contact avec le fentanyl de se procurer minimalement une trousse de naloxone », conclut Dr Fachehoun.
Des trousses de naloxone et de bandelettes de tests de détection sont disponibles dans les organismes communautaires, dans les centres de santé, dans les pharmacies ainsi qu’auprès des travailleurs de rue.
Le chef de Nutashkuan inquiet
M. Réal Tettaut, chef de bande de Nutashkuan, considère que le problème de consommation de drogues de rue dans sa communauté empire avec les années.
« De plus en plus de gens consomment, ils consomment de plus en plus et commencent de plus en plus jeunes », déplore-t-il. « Je pense qu’un colloque régional impliquant les forces de l’ordre, les services de santé et de services sociaux, le ministère de l’Éducation et les communautés serait nécessaire », ajoute-t-il.
M. Tettaut déplore le manque d’interventions policières en matière de stupéfiants sur sa communauté, mais comprend aussi la réalité des policiers affectés à Natashquan et Nutashkuan.
« C’est difficile pour les policiers de la SQ d’enquêter le trafic de stupéfiants ici. Pour débuter, la plupart d’entre eux viennent de l’extérieur et sont seulement présents pour une ou deux semaines avant de quitter, mais aussi, parce qu’il existe une composante très politique aux enquêtes de la SQ sur les communautés autochtones », explique le chef de bande.
M. Tettaut est tout de même sans équivoque en déclarant que les vendeurs de drogues ne sont pas les bienvenus sur la communauté.
« Des démarches sont en cours pour pouvoir expulser et bannir les vendeurs. Personne n’est ciblé pour le moment, mais lorsque nous en ciblerons un, nous voulons avoir le pouvoir de l’expulser le plus vite possible », déclare-t-il.
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