Adieu Monsieur le maire!

Par Raphaël Hovington 7:00 AM - 26 octobre 2022
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Roger Theriault, qu’on aperçoit ici à l’époque où il a été maire de la nouvelle ville fusionnée de Baie-Comeau, est décédé le 22 octobre. Photo Ville de Baie-Comeau

À Londres, les Anglais se souviennent toujours de leur Dame de fer, Margaret Thatcher. Qu’ils l’aient aimée ou non, elle demeure l’une de leur plus grande première ministre et une figure emblématique du XXe siècle. Chez nous, à Baie-Comeau, les citoyens devraient aussi se souvenir avec respect de leur ancien maire, Roger Theriault, décédé samedi après-midi, à 16 h 56, au CHSLD de Matane.

Plusieurs l’admiraient de son vivant et d’autres le détestaient parce qu’il fut le maire de la « fusion forcée ». M. Theriault est arrivé en politique municipale alors que le gouvernement du Québec venait d’unir deux villes jumelles, dont l’une résistait farouchement à ce mariage forcé. C’était en 1982. Quarante ans plus tard, on hésite toujours à en parler librement de crainte de heurter certaines sensibilités qui ont mené plusieurs citoyens au bord de la révolte civile.

L’histoire se chargera un jour de faire le bilan de cette période trouble, mais on ne saurait passer sous silence la contribution du maire Theriault à l’existence du Baie-Comeau d’aujourd’hui, dont la très grande majorité des citoyens des deux côtés de la rivière Amédée sont fiers. Né au Nouveau-Brunswick, à Ste-Anne, Roger Theriault est l’aîné d’une famille acadienne de dix enfants. En 1961, il entre au service d’Hydro-Québec et s’installe à Baie-Comeau en 1975.

Directeur de la Chambre de commerce de Baie-Comeau, il se fait vite remarquer pour l’intérêt qu’il porte au développement économique de notre région. Mettre fin à l’exode des capitaux vers d’autres régions l’incite très certainement à devenir président fondateur de la première campagne d’achat local en 1981. Encore aujourd’hui, cet enjeu continue de préoccuper nos développeurs. L’année suivante, il fonde l’exposition régionale, commerciale et industrielle de Baie-Comeau. Si on veut développer nos commerces et nos entreprises, il faut apprendre à les connaître, et quoi de mieux que de leur offrir une vitrine spectaculaire.

C’est aussi à cette époque qu’on parle de fusionner les ex-villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Roger Theriault ne faisait pas de politique et rien ne semblait le destiner à plonger de ce monde où n’entre pas qui veut. Mais au hasard de certains événements, il décide de faire le saut. Il est élu par la peau des dents dans un climat qu’on ne saurait qualifier d’amical. C’est à partir de ce moment qu’on commence à découvrir l’homme, sa détermination et sa vision de l’avenir de Baie-Comeau.

Les premières années comme les dernières ne furent pas faciles pour lui. Mais contre vents et marées, il a su résister aux pressions de toutes sortes durant 12 ans, aux « calamités » des premières heures et aux injures qui en feraient sans doute frémir plus d’un. Roger Theriault croyait au développement économique du nouveau Baie-Comeau.

Il s’appuyait sur les recommandations d’une étude (Major et Martin) commandée avant son arrivée en politique. Aujourd’hui, l’histoire lui donne raison avec la création récente du parc industriel Jean-Noël-Tessier. La chicane entre les deux villes en avait compromis la réalisation au milieu des années soixante-dix, même si le fédéral était prêt à s’impliquer financièrement.

Il a aussi très bien positionné Baie-Comeau lors de la première conférence socio-économique de la Côte-Nord. Ses visées n’ont pas toujours été retenues, mais Roger Theriault s’est avéré être un maire visionnaire. Il a eu à gérer plusieurs crises dont celle des fameux BPC de Saint-Basile-le-Grand débarqués sur le quai de Baie-Comeau en attendant leur transfert à Manic-2.

Le maire Theriault croyait que la diversification économique passait aussi par le développement touristique. Il a mis en place un Bureau des congrès et du tourisme, qui ne lui a pas survécu. Il a soutenu la création d’une Corporation d’aménagement et de protection de l’environnement (CAPE) qui ne lui a pas survécu non plus. Mais ce sont deux réalités toujours actuelles, bien qu’elles aient adopté des visages différents avec le temps.

On lui doit le premier programme d’assainissement des eaux ayant mené à la réfection de plusieurs rues, Champlain et Laval, ainsi que les boulevards Blanche et Jolliet. On lui doit surtout la construction de la salle de spectacles. La population l’espérait depuis 1969. Il aura fallu la crise des BPC pour qu’elle voit le jour sans coûter un denier aux contribuables de Baie-Comeau.

Mais le principal legs du maire Theriault, c’est d’avoir vu avant tout le monde que la nouvelle ville de Baie-Comeau était porteuse de grandes promesses d’avenir pourvu que tous travaillent dans l’unité et l’harmonie. Même s’il ne fut pas parfait, personne ne l’est, l’ancien maire Theriault mérite considération et respect. Sympathies à ses proches!

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