Stanley Vollant raconte les traumatismes de la tuberculose

Par Marie-Eve Poulin 5:00 AM - 19 septembre 2023
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Le Dr. Stanley Vollant parle de la tuberculose dans les commaunautés autochtones par le biais de son expertise de médecin et de son expérience personnelle. Photo courtoisie archives

Le docteur Stanley Vollant est bien placé pour raconter l’histoire de la tuberculose chez les Autochtones. Il en a subi les traumatismes qui restent encore aujourd’hui bien gravés dans sa mémoire. Malgré tout, il a bon espoir qu’une approche de sécurisation culturelle et d’interventions sociales pourra limiter la propagation dans les communautés.

Le Dr Stanley Vollant indique que la tuberculose au Canada touche principalement deux populations, soit les Autochtones et les immigrants. 

« On a une prédisposition. Je pense qu’il y a des facteurs sociaux, comme la surpopulation dans les communautés. Quand tu habites de cinq à dix personnes dans une maison, il y a plus de chances que tu te contamines », dit-il.  

« On sait que la tuberculose arrive dans les milieux plus pauvres économiquement parlant, donc les communautés autochtones en font partie. Il y a des milieux où les conditions de vie sont plus difficiles et ça contribue aux éclosions », ajoute-t-il. 

Dr Vollant explique que les communautés autochtones plus urbaines ne connaissent pas autant de propagations, en raison de leurs conditions de vie. 

« Ils sont plus urbains, les conditions de vie sont meilleures et les maisons ne sont pas surpeuplées », explique-t-il. 

Il croit aussi qu’une sensibilité génétique pourrait être en cause, mais cela n’a pas été confirmé jusqu’à maintenant. 

La tuberculose chez les Autochtones ne date pas d’aujourd’hui. « On retrouve des traces de la tuberculose même au 19e siècle chez les Autochtones », note-t-il. « La tuberculose a toujours été là et avec les conditions sociales qui ne s’améliorent pas, c’est sur que c’est plus présent. »

Un passé difficile à oublier

Il fut une époque où l’absence de traitement a décimé bien des communautés. La maladie s’attaquait à d’autres organes « et ça faisait beaucoup de dégâts ». 

« Les Autochtones ont servi beaucoup de guinea pig (cobayes) à cette époque. Il y a eu des traitements non consentis », souligne Dr Stanley Vollant.

Si on remonte quelques années en arrière, au temps des grands-parents et des parents de Stanley Vollant, qui est aujourd’hui âgé de 58 ans, on se retrouve au temps des sanatoriums.

Les gens positifs à la maladie y étaient amenés pour y séjourner pendant un à deux ans et parfois plus. Ils se retrouvaient loin de leurs familles et dans certains cas, sans possibilité d’être informés du sort de leurs proches. Dans des communautés plus au nord, un bateau passait, embarquait à bord les gens positifs et on perdait parfois leur trace à tout jamais. 

Sur la Côte-Nord, les malades étaient envoyés à Mont-Joli, ou à Gaspé. La mère du Dr Stanley Vollant y a passé plus d’un an et demi. Selon lui, plus de la moitié des aînés pourraient nous raconter qu’ils y sont allés eux aussi. 

« Pour les Autochtones, c’est un épisode assez triste. C’est une institution où l’on te garde et qui est étrangère à toi, loin de ta famille. »

Cauchemar

« Quand on parle des pensionnats, je pense que la tuberculose représente aussi un traumatisme pour les Autochtones », avance le Dr Vollant. 

Il a lui-même été atteint de la tuberculose, vers l’âge de sept ans. Sans avoir subi le passage au sanatorium, il a quand même dû prendre l’ancien traitement qui n’était pas sans douleur. 

Maux de ventre, hypersensibilisé. « On se sent comme un vampire qui brûle au soleil » illustre-t-il.

L’isolement social et l’impossibilité de faire ce qui lui plaisait en tant qu’enfant, pendant cette période, ont aussi été difficiles. 

Ayant vu sa famille aller au sanatorium, le petit enfant qu’il était à cette époque avait une peur bleue de passer par là, de force, lui aussi.

« J’ai fait des cauchemars pendant des semaines et des semaines. Je rêvais que des gens venaient m’enlever dans ma maison », raconte-t-il. 

« Ce spectre-là découle d’une histoire longue avec la tuberculose et d’une histoire triste des sanatoriums. »

Soigner les patients 

Peu importe la nationalité, devoir prendre un traitement avec des effets secondaires, ce n’est pas facile. La méfiance qui découle de l’histoire des Autochtones vient aussi rendre le traitement plus difficile à faire accepter par les patients, explique le Dr Vollant.  

La clé, selon lui, est de prendre le temps avec chacun d’entre eux et de bien expliquer les choses. La raison de la prise du traitement, éliminer les craintes face à celui-ci, puisque la médecine a évoluée, faire de la sécurisation culturelle, comprendre l’histoire derrière qui apporte cette méfiance, simplifier le charabia médical. 

Il faut aussi mettre en place des interventions sociales, estime-t-il.