L’activité physique contre la dépression post-partum
«Quand on a un nouveau-né, un bébé, souvent on va se promener avec la poussette à l'extérieur, a rappelé la professeure Stephanie-May Ruchat. Donc on est capable d'y jumeler un effet bénéfique pour notre santé mentale, et aussi de prendre l'air puis d'aller se promener, ce qu'on fait de toute façon assez souvent avec une poussette quand on vient d'accoucher.» (AP Photo/Charlie Riedel)
La pratique d’une activité physique modérée après l’accouchement réduit considérablement le risque de dépression post-partum, démontre une méta-analyse à laquelle a participé une chercheuse de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
Les meilleurs résultats étaient obtenus lorsque l’activité physique était entamée pendant les 12 semaines après l’accouchement, et au moins 80 minutes d’activité physique modérée par semaine étaient nécessaires pour obtenir un bénéfice.
«L’idée c’est d’y aller graduellement et d’y prendre du plaisir, a dit la professeure Stephanie-May Ruchat, du département des sciences de l’activité physique de l’UQTR. Si la femme est fatiguée, ou si l’accouchement a été difficile, on peut commencer par du léger. Sortir prendre une petite marche, ça compte.
«Mais le message que je donne, c’est vraiment d’aller marcher à l’extérieur (ou) dans un centre d’achat avec la poussette… L’idée c’est de sortir de la maison, de se remettre à bouger parce qu’on sait que pour la santé mentale, c’est vraiment important. Ça brise l’isolement aussi si on est capable de le faire avec d’autres mamans, avec d’autres personnes.»
La professeure Ruchat et ses collègues ont analysé les résultats de 35 études regroupant un peu plus de 4000 participantes provenant de 14 pays.
Ils ont constaté qu’en comparaison avec aucune intervention, les interventions basées uniquement sur l’activité physique étaient associées à des symptômes moins intenses d’anxiété et de dépression après l’accouchement. Ces interventions réduisaient pratiquement de moitié, soit 45 %, le risque de symptômes dépressifs majeurs post-partum.
«On voit vraiment un impact majeur», a dit la professeure Ruchat.
Une intervention débutée dans les trois mois après l’accouchement a entraîné une plus grande réduction des symptômes dépressifs qu’une intervention entamée après ce délai.
Plus la quantité d’exercice pratiquée était importante, plus l’impact sur les symptômes dépressifs était marqué. Le seuil minimum pour obtenir une réduction modérée de la sévérité des symptômes était toutefois de 80 minutes d’activité physique modérée ― marche rapide, aquagym, vélo stationnaire, entraînement à la résistance avec des bandes, des poids ou le poids corporel ― par semaine, à raison de quatre séances par semaine.
«Quand on a un nouveau-né, un bébé, souvent on va se promener avec la poussette à l’extérieur, a rappelé la professeure Ruchat. Donc on est capable d’y jumeler un effet bénéfique pour notre santé mentale, et aussi de prendre l’air puis d’aller se promener, ce qu’on fait de toute façon assez souvent avec une poussette quand on vient d’accoucher.»
Il n’est pas inhabituel pour une femme de ressentir une certaine anxiété ou même de présenter des symptômes dépressifs après un accouchement. On estime que la problématique touche entre 9 % et 13 % d’entre elles, même si l’ampleur de la situation est fort probablement sous-estimée.
Si de multiples études ont démontré que l’activité physique peut contrer efficacement les symptômes dépressifs et anxieux en général, cette méta-analyse complète la littérature scientifique qui porte spécifiquement sur ce qui se produit après l’accouchement, une période délicate pour la mère et pour son enfant.
«La dépression et l’anxiété maternelles sont associées à une diminution des soins maternels et à un affaiblissement des soins et de l’attachement de l’enfant, avec d’autres liens avec un retard dans le développement cognitif, émotionnel et social de l’enfant», écrivent ainsi les auteurs de l’étude.
«On a aussi des études qui démontrent que les enfants qui ont eu une maman dépressive ou très anxieuse quand ils étaient tout petits vont, ou peuvent, développer des problèmes cognitifs, émotionnels ou sociaux plus tard dans leur vie, a complété la professeure Ruchat. Le traitement est donc fondamental.»
Les interventions classiques face à une dépression post-partum, comme la médication ou la thérapie, ne sont pas accessibles à toutes les mères en raison d’obstacles comme le coût ou le manque de temps. Certaines préoccupations existent aussi quant à la prise d’anti-dépresseurs pendant l’allaitement en raison de la transmission possible des molécules au bébé.
Compte tenu de l’efficacité comparable observée de l’exercice post-partum dans la réduction de la gravité des symptômes dépressifs par rapport aux traitements conventionnels, «l’exercice pourrait offrir aux mères des solutions de rechange relativement sûres, accessibles et peu coûteuses pour traiter les problèmes de santé mentale», notent les auteurs.
«Le message clé, c’est vraiment de dire que l’activité physique est une thérapie au même titre que la thérapie pharmacologique, avec des effets similaires, a conclu la professeure Ruchat. Si on compare les deux, on est capables d’aller chercher les mêmes effets.»
Les bienfaits de l’activité physique sur la santé mentale des femmes enceintes ou en post-partum passeraient entre autres par une amélioration de l’estime de soi (par le biais de l’image corporelle et de la perception physique de soi); par une amélioration de l’auto-efficacité (par la croyance en soi et une participation soutenue); par une réorientation de l’attention vers d’autres pensées angoissantes; et par l’adoption de stratégies d’adaptation psychologique à l’exercice.
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le British Journal of Sports Medicine.
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