CHRONIQUE | Hé mon gars, ça va !

Par Raphaël Hovington 12:00 PM - 21 novembre 2024 Chroniqueur
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Photo courtoisie

Même si j’ai été actif dans le monde des communications pendant près de 40 ans, je viens tout juste de faire une découverte extraordinaire en feuilletant le Journal Le Manic de la semaine dernière. Il existe une Journée internationale de l’homme et elle est célébrée le 19 novembre. Je connaissais la Journée internationale des femmes, mais pas celle des hommes.

En fouillant un peu sur Internet, j’ai appris que la première Journée internationale de l’homme a été créée le 7 février 1992 à l’initiative du professeur Thomas Oaster. Cinq ans plus tard, Jérome Teelucksingh choisissait le 19 novembre en hommage à l’anniversaire de son père pour célébrer la Journée internationale de l’homme dans la République de Trinité-et-Tobago. Il souhaitait lutter pour l’égalité des sexes et supprimer l’image négative qui est associée à l’homme dans notre société.

Depuis 1999, cette célébration s’est répandue à d’autres pays comme l’Inde, le Royaume-Uni, l’Australie, et j’en passe. Au Québec, elle s’inscrit dans le cadre de la Semaine québécoise pour la santé et le bien-être des hommes. L’UNESCO lui a accordé une certaine reconnaissance en 2001, mais l’ONU ne la reconnaît toujours pas. Voilà pourquoi, cette journée passe pour ainsi dire inaperçue.

En lieu et place, l’ONU a choisi de célébrer la Journée mondiale des toilettes le 19 novembre. Quelle drôle d’ironie. Oui, les toilettes sont essentielles aux êtres humains, mais il me semble que le sexe fort, comme on le dit de l’homme, mériterait plus d’égard et de considération. On le dit fort, mais en réalité il est tout aussi vulnérable que le sexe dit faible, soit la femme. Les bonzes de l’ONU ne prêteront sans doute aucune attention à cette chronique et, fort humblement, je m’en moque comme de ma première chemise.

Chez nous, on n’a pas attendu qu’une journée soit décrétée pour réaliser que certains hommes avaient autant besoin d’aide que certaines femmes. Je pense, entre autres, à Sœur Yvonne de la Mirande qui a mis en place Point-de-Rencontre au milieu des années soixante-dix. On décrie souvent les communautés religieuses, mais on ignore aussi à quel point elles furent bénéfiques dans des milieux comme les nôtres. Un soir, Sœur de la Mirande, qui avait quitté la direction de l’Hôpital de Hauterive, a répondu à l’appel d’un homme en détresse. Elle, si fragile et si petite, est allée à la rencontre de l’individu en cause. Elle aurait pu avoir peur, mais non, son désir d’aider était plus grand que tout et lui a donné la force de foncer et de défoncer ces barrières qui nous empêchent souvent de tendre une main secourable.

On pourrait aussi parler des AA et des autres groupes d’entraide anonymes. Ils touchent aussi bien les hommes que les femmes. Mais les hommes ont toujours été discriminés dans notre société. Ils sont forts ; ils sont les pourvoyeurs ; ils sont à l’origine de tous les maux ; qu’ils se débrouillent. Mais ce n’est pas le cas. Dans une région comme la nôtre, le taux de suicide est très élevé et frappe particulièrement les hommes. C’est sans parler du nombre de personnes qui se présentent dans les urgences avec des idées suicidaires. Il y en a eu 680 en 2023. C’est énorme, même si c’est en décroissance grâce à l’excellent travail d’écoute et de sensibilisation du Centre de prévention du suicide Côte-Nord.

En 2009, Homme Aide Manicouagan ouvrait officiellement ses portes. Il a commencé à offrir des services d’hébergement l’année suivante. Depuis, il a accueilli une centaine de familles (pères et enfants) pour des séjours pouvant aller jusqu’à six mois, parfois plus. La première cause de détresse chez les hommes de la Manicouagan, c’est la rupture amoureuse, précise cet organisme qui mérite l’admiration et le soutien de tous. D’autres facteurs peuvent aussi contribuer à fragiliser les hommes, comme la perte d’un travail, le décès d’un proche, la maladie, la sédentarité et j’en passe.

La Journée internationale de l’homme est une occasion unique dans l’année de faire valoir les enjeux actuels et de rechercher des pistes de solution. Le manque d’activité physique et l’hésitation à chercher de l’aide constituent autant de pièges qui guettent certains hommes et les rendent si vulnérables. Quelles sont les solutions : développer des modèles masculins à imiter, faire preuve de plus d’ouverture et d’écoute, surtout ne pas craindre de donner une tape sur l’épaule à un ami qu’on connaît et qu’on soupçonne d’être en détresse : hé, mon gars, ça va !