Tout porte à croire que la montaison de grands saumons sera encore une fois « très en deçà de la normale » en 2025, craignent les experts, qui demandent à Pêches et Océans Canada d’agir rapidement.
Le saumon atlantique a connu des montaisons historiquement basses en 2024. Dans ce contexte critique, « il est essentiel de poser des actions dès ce printemps, afin d’assurer sa pérennité et revenir à la normale », plaide la Fédération québécoise pour le saumon atlantique (FQSA), dans un communiqué, jeudi.
Le 21 février, une rencontre de la Table technique Saumon a eu lieu, à l’initiative du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).
Plusieurs intervenants et spécialistes du monde du saumon se sont rassemblés, pour dresser un portrait des enjeux de mortalité en mer et des actions à mettre en œuvre dans les prochains mois.
Les problèmes ont commencé en 2023. Une diminution drastique du nombre de madeleineaux a alerté les biologistes. Il s’agit des saumons de moins de 63 cm ayant passé un an en mer. L’année suivante, la situation s’est répétée, voire aggravée, mais en plus, les grands saumons ont aussi vu leur nombre diminuer. Ceux qui passent au moins deux ans en mer ont connu une réduction de l’ordre de 20 à 80 %, selon des données préliminaires fournies par les gestionnaires de rivières.
Le bilan printanier du ministère de l’Environnement permettra d’obtenir des données plus précises sur ce déclin anticipé.
« Suite à l’analyse de plusieurs recherches, dont celles issues de projets en télémétrie, le constat est clair : les cohortes de saumoneaux qui ont fait leur migration à l’été 2022 et 2023 ont vécu une mortalité soudaine et importante, vraisemblablement dans le Golfe du St-Laurent, probablement un peu avant ou près du Détroit de Belle-Isle », explique la FQSA. « Cela signifie aussi qu’en 2025, tout porte à croire que la montaison de grands saumons sera encore une fois très en deçà de la normale », poursuit l’organisation.
Quant aux madeleineaux, il est encore trop tôt pour savoir s’ils seront nombreux cette année.
Les experts ont mis en lumière quelques pistes d’explications, lors de la rencontre. Les changements de températures de l’eau dans la région du Golfe et de l’Atlantique Nord, ainsi que dans l’abondance des proies et des prédateurs en font partie. L’hypothèse de la présence de maladies virales entraînée par le passage de saumoneaux près des cages d’aquaculture présentes du côté des provinces Maritimes a aussi été explorée.
Les conditions de température des rivières figurent aussi parmi les éléments à surveiller. Il en va de même pour celle d’une augmentation des prises accidentelles par les pêches aux poissons de fourrages (hareng, capelan).
« Considérant l’ampleur de l’enjeu et les conséquences pour le saumon atlantique, la FQSA demande au MPO d’agir rapidement pour mettre des observateurs sur les bateaux de pêches commerciales susceptibles de prendre accidentellement des saumoneaux, afin de documenter la situation, en plus de limiter fortement ces pêches pendant les quelques jours critiques où passent la vaste majorité des saumoneaux dans le Golfe jusqu’à l’est du détroit de Belle-Isle », demande la Fédération.
Elle espère aussi que Pêches et Océans lancera sa Stratégie de conservation du saumon atlantique.
Au Québec, la FQSA note qu’il est trop tôt pour exiger une fermeture des pêches récréatives et traditionnelles. Des consultations sont en cours auprès du ministère de l’Environnement, mais « les modalités de pêche récréative seront vraisemblablement plus axées vers la remise à l’eau intégrale », indique-t-elle.