Je suis tanné des jokes de chaloupe

Par Vincent Rioux-Berrouard 11:45 AM - 23 avril 2025
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Le Saaremaa. Photo Société des traversiers du Québec

Comme de nombreuses personnes, je profite des longs congés pour aller rendre visite à mes proches. Toutefois, cette tradition s’en accompagne d’une autre : devoir gérer les aléas des traversiers.

Depuis cinq ans, je vis sur la Côte-Nord, à Sept-Îles. J’adore ma région d’adoption. Je ne me tanne pas des paysages qu’on côtoie et des plages de sable qu’on peut parcourir en saison estivale.

Par contre, chaque fois que je dois utiliser un des traversiers, je me pose la question à savoir pourquoi je vis dans cette région.

Pour la fin de semaine de Pâques, je suis allé visiter ma famille. Par miracle, le Saaremaa, qui avait connu des problèmes mécaniques dans les jours précédents, a repris le service. Ça m’a permis d’être avec mes proches pour manger un peu de chocolat durant le congé pascal.

Le retour, lui, a été compliqué. Je devais revenir le dimanche 20 avril sur la Côte-Nord, mais les forts vents ont empêché la traverse. À ce moment, normalement, je ne suis pas inquiet : j’ai encore le lundi pour traverser.

Malheureusement, la traverse Matane-Côte-Nord affiche complet le lundi 20 et le mardi 21 avril. Pas de panique, je me rabats alors sur mon plan B. Le traversier NM Trans-Saint-Laurent qui effectue la liaison entre Rivière-du-Loup et Saint-Siméon, à Charlevoix.

Mauvaise surprise, elle ne fonctionne pas. Le début de saison a été repoussé à la dernière minute et le bateau ne traverse pas en cette fin de semaine si achalandée qu’est Pâques.

Je me rends alors à l’évidence, à nouveau, je suis pris sur la côte sud et incapable de traverser.

S’il s’agissait de la première fois qu’une telle mésaventure m’arrivait, je pourrais mettre le tout sur le compte de la malchance, ou de circonstances exceptionnelles. Mais ce n’est pas le cas. Comme de nombreux Nord-Côtiers, je suis confronté à des difficultés de transports pratiquement une fois sur deux, lorsque je dois quitter la Côte-Nord, puis y revenir.

Ce qui était un irritant au début devient une source d’exaspération. Et je n’ai pas encore parlé de la traverse Baie-Sainte-Catherine-Tadoussac, qui elle aussi est source de frustration pour les Nord-Côtiers.

De mon côté, j’ai la chance d’avoir un emploi qui permet le télétravail. Mais ce n’est pas le cas pour tout le monde. Ce manque de fiabilité a des conséquences pour nos employeurs et notre économie. J’ajoute que cela affecte également l’attractivité de la région.

Je me pose la question à savoir si tous les efforts sont véritablement déployés pour offrir enfin un service efficace pour traverser le fleuve Saint-Laurent. Faut-il le rappeler que la traverse Côte-Nord-Matane est notre seul lien pour traverser durant une bonne partie de l’année ?

L’idée soulevée par le député de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, d’offrir une « assurance traversée » est légitime dans les circonstances que les régions de l’Est-du-Québec connaissent depuis plusieurs années.

Elle consisterait à offrir un dédommagement pour le kilométrage, nuitée et repas pour une personne qui devrait faire la boucle par Québec, pour se rendre à sa destination. 

Par contre, une telle mesure ne viendrait pas faire qu’on accepte l’inacceptable.

Imaginer l’indignation qui serait provoquée, si on disait à des citoyens du reste du Québec qu’ils doivent parcourir des centaines de kilomètres, parce qu’une société gouvernementale ne peut assurer efficacement un service, qui même si le Tribunal du travail ne le reconnaît pas, est essentiel.

Je ne suis pas un spécialiste en transport. Il y a des gens à la Société des traversiers du Québec (STQ) qui sont bien plus compétents que moi, je l’espère. Je n’ai pas la solution pour assurer un service de traverse efficace. Mais tout ce que je demande à nos dirigeants est d’arriver à enfin régler cette situation et de donner à la Côte-Nord et à la Gaspésie/Bas-Saint-Laurent, un service de traversiers qui nous rendra fiers et qui ne serait plus un sujet récurrent de blague.

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Jean Lemieux
Invité
Jean Lemieux
25 jours il y a

Il est vrai que dans les années 1960 et 1970, les traversiers comme le N.A. Comeau et le Sieur D’Amours jouaient un rôle essentiel pour assurer la connectivité, malgré leur équipement plus rudimentaire et les conditions hivernales souvent difficiles. Ces bateaux, bien que moins modernes, permettaient de maintenir un service continu même lors des hivers rigoureux avec beaucoup de glace sur le fleuve, ce qui était crucial pour la région.

Aujourd’hui, avec des navires comme le F.A. Gauthier et le Saaremaa, certains estiment que la qualité du service a diminué, notamment en raison de limitations en termes de capacité ou de fiabilité, ce qui peut contribuer à l’enclavement de la Côte-Nord. La situation est d’autant plus préoccupante si l’on compare cela aux traversiers de Tadoussac à Baie-Comeau ou à Baie-Saint-Catherine, qui rencontrent aussi des difficultés ou des limites qui affectent la mobilité et l’économie locales.

Il est important de continuer à évaluer et à améliorer le service de traversier afin d’assurer une meilleure connectivité, surtout dans une région aussi isolée et dépendante de ces liaisons pour le transport, l’économie et la vie quotidienne des résidents.