56 ans de bénévolat musical pour une Baie-Comoise

Par Anne-Sophie Paquet-T. 3:00 PM - 3 juin 2025
Temps de lecture :

C'est avec simplicité et générosité que Wilfrida Jomphe a ouvert les portes de son foyer au journal Le Manic, partageant les grands chapitres d'une vie dédiée à la musique chorale nord-côtière. Photo Anne-Sophie Paquet-T.

Wilfrida Jomphe est une femme qui a donné une partie de sa vie à deux passions, la musique et le bénévolat. Cette dame a précisément donné 56 ans de son temps et de ses apprentissages dans sa ville d’adoption, soit Baie-Comeau. 

Native de Havre-Saint-Pierre, à 86 ans, Wilfrida Jomphe vient de tourner une page importante de sa vie. Celle qui a dirigé pendant 56 ans la chorale de l’église Saint-Nom-de-Marie à Baie-Comeau a tiré sa révérence, laissant derrière elle un héritage de passion, de rigueur et de partage.

« C’est à la messe que j’ai su que c’était ma dernière. Mon corps me disait d’arrêter. J’ai dirigé une dernière pièce, puis je me suis assise. J’ai dit au Seigneur, c’est fini », raconte-t-elle avec émotions à son domicile.

Son implication bénévole a débuté dans les années 1960, d’abord à l’église Sainte-Amélie, puis à Saint-Nom-de-Marie, où elle a bâti une chorale de toutes pièces. Au fil des décennies, elle a préparé les messes dominicales, les funérailles, les grands moments liturgiques. Sans relâche et sans jamais être rémunérée.

De la chorale paroissiale à la scène provinciale

Mais l’implication de Mme Jomphe ne s’est pas arrêtée aux murs de l’église. En 1971, elle fonde la Chorale La Cantilène, un ensemble profane qui rassemblera plus de 60 choristes à son apogée. Avec eux, elle participe à des concours, remporte des prix dont une première place à Rouyn-Noranda en 1973.

Elle a voyagé aux quatre coins du Québec avec ses acolytes de la chanson. À une époque où les ressources sont limitées, les choristes se débrouillent, organisent des collectes de fonds, et parfois, la Ville de Baie-Comeau leur vient en aide, notamment pour les déplacements en avion.

« On n’avait pas d’argent, mais on avait du plaisir », dit-elle simplement, en feuilletant ses albums remplis de coupures de journaux, de partitions et de lettres de reconnaissance.

Une cheffe, une pédagogue, une bâtisseuse

Au fil du temps, elle devient une référence. Enseignante de formation, elle donne aussi des cours à l’éducation des adultes, puis auprès des détenus de la prison de Baie-Comeau. Une expérience qu’elle qualifie de profondément humaine encore aujourd’hui. « J’ai adoré ça et j’ai toujours été bien traitée », confie-t-elle encore reconnaissante de cette expérience.  

Avec les années, elle forme un autre groupe, Nostalgie, un ensemble composé exclusivement d’hommes, avec lequel elle produit deux spectacles et un album. Le groupe monte sur scène jusqu’à Québec, où il chante notamment Ave Maria dans une grande église de la capitale pour le mariage de la fille d’un député de Baie-Comeau de l’époque.

Un engagement enraciné dans la foi

Fidèle à ses valeurs, Wilfrida Jomphe n’a jamais cessé de servir sa communauté. Son implication était aussi spirituelle que sociale. « Pour moi, l’église, c’était un besoin. J’ai toujours été là, et j’ai toujours été récompensée. Je ne juge personne, mais moi, c’était ma manière d’être en paix », confie-t-elle.

Elle a aussi animé de nombreuses rencontres accompagnées de la chorale dans les résidences pour aînés de la région, notamment à la résidence Boisvert et Le Château, chantant avec ses choristes et créant des moments de joie simples, mais profonds.

Laisser une trace

Lorsqu’on lui demande ce qu’elle retient de ces décennies d’engagement, elle répond sans détour que « ce que j’ai voulu, c’était que les gens soient aussi heureux que moi. Je leur disais toujours que la musique permet de libérer et vivre nos émotions ». 

Aujourd’hui, entourée de ses souvenirs, de son piano qu’elle a eu toute sa vie, de sa musique enregistrée sur CD et des photos de ses enfants, dont un fils, musicien comme elle, décédé prématurément, Mme Jomphe conclut qu’elle a aimé sa vie.

« J’ai eu une vie bien remplie. Merci mon Dieu », lance-t-elle précisant qu’elle sera plus « tranquille » pour les prochaines années à venir.