« Au lieu de m’apitoyer sur mon sort, je mords dans la vie »

Par Charlotte Paquet 24 mai 2017
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Jennifer Gagnon refuse de baisser les bras face à la fibrose kystique. Photo courtoisie

Baie-Comeau – Jennifer Gagnon est une fille remplie de guts. Elle a bien cru y passer en janvier, mais a eu le dessus sur sa maladie, la fibrose kystique. Avec l’arrivée imminente de la saison estivale, elle se dit une chose : « Ouf, je vais revoir l’été. »

En ce mois de mai, consacré à la sensibilisation à la fibrose kystique, une maladie qui s’attaque au système digestif et aux poumons, la Baie-Comoise d’origine, exilée en banlieue de Montréal en raison de la proximité des soins de santé spécialisés, a accepté de témoigner de sa vie avec la maladie.

Ce qui ressort des propos de Jennifer Gagnon, c’est justement sa soif de vivre. De vivre surtout le moment présent, malgré les tourments liés à la fibrose kystique, dont les deux heures de traitements quotidiens à domicile dont elle a besoin.

« Moi, honnêtement, je ne connais pas d’autre chose. Ma maladie, j’ai appris à l’apprivoiser. Au lieu de m’apitoyer sur mon sort, je mords dans la vie. Je voyage beaucoup. J’ai toujours beaucoup de projets et même s’ils ne se réalisent pas, ils me gardent en vie », raconte-t-elle.

La trentenaire tente d’aller au bout de ses rêves le plus possible, en étant bien consciente qu’on ne sait jamais de quoi demain sera fait. La dégradation majeure de son état en début d’année a été pour elle un signal de plus de l’importance de ne pas remettre à demain ce qu’elle peut réaliser aujourd’hui.

Si Jennifer Gagnon avait un seul message à lancer à des jeunes atteints de fibrose kystique (et à leurs parents), c’est de ne pas lâcher. « Il faut toujours continuer et persévérer. La recherche, ça avance beaucoup. Les gens se demandent beaucoup si la recherche, ça marche. La réponse est oui. Il y a des médicaments qui s’en viennent », dit-elle.

Près d’y passer

Pourtant, en janvier 2017, Jennifer Gagnon a vraiment cru y passer après avoir été atteinte de ce qu’elle décrit comme un mélange d’influenza et d’infection. « J’ai été très malade. Je suis restée six semaines et demie à l’hôpital. Dans ma tête, c’était fini. Mes poumons ne fonctionnaient plus qu’à 20 %. Ce que j’ai vécu après Noël, je ne pense être capable de repasser au travers », confie-t-elle.

La greffe pulmonaire est dans l’air de plus en plus aujourd’hui, même s’il s’agit d’une étape qu’on tente toujours de repousser, affirme-t-elle. Il y a quatre ans, elle était sur le point d’être greffée lorsqu’elle a entendu parler d’un traitement expérimental lancé aux États-Unis pour régulariser la molécule qui est en partie responsable de la fibrose kystique.

« J’ai fait l’étude et ça m’a permis de retarder le temps d’avoir besoin d’une greffe. Aujourd’hui, le médicament vient tout juste de sortir au Québec. Il est très difficilement accessible, car il coute très cher, près de 300 000 $ par année », souligne celle qui y a toutefois accès.

Malgré les quatre années de traitement, Jennifer Gagnon a gardé son nom inscrit sur une liste d’attente pour une greffe, mais plutôt en stand by, dit-elle. Elle doit revoir son médecin spécialiste en greffe bientôt et elle s’attend de recommencer alors à gravir les rangs qui la mèneront à la chirurgie.

Selon la dame, la greffe améliore énormément la qualité de vie, mais elle ne règle pas tout. « C’est une deuxième chance de vivre, mais on reste atteint de la fibrose kystique quand même », souligne celle dont la cousine Julie Gagnon, atteinte de la même maladie, est décédée en janvier dernier, un an et demi après avoir reçu une greffe.

Revenir vers les siens

La trentenaire espère qu’une fois greffée, elle pourra revenir vers les siens, notamment sa mère Line Desbiens et son père Jean-Claude Gagnon. « C’est difficile pour moi d’être loin de ma famille. Je descends le plus souvent possible. C’est la maladie qui a fait en sorte que je m’éloigne », raconte celle dont les proches sont à Baie-Comeau et à Forestville.

Après des études universitaires en environnement et en géographie, qu’elle a réussi à faire malgré des hospitalisations fréquentes, Jennifer Gagnon est revenue à Baie-Comeau en 2007. Elle a cependant dû s’expatrier à nouveau peu de temps après. En raison de sa fibrose kystique, ses poumons peuvent se mettre à saigner, et à saigner beaucoup. On appelle ça de l’hémoptysie. Il faut alors une embolisation d’urgence, ce qui ne se pratique pas à Baie-Comeau.

 

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