Paracyclisme : Le vrai sens du dépassement de soi

Par Steeve Paradis 17 août 2018
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Damian Lopez Alfonso (sur son vélo) et Alejandro Ricard Jimenez forment la délégation cubaine à cette épreuve de la Coupe du monde de paracyclisme. Ils sont accompagnés par Robert Leblanc et Fabiola Vielma Gangas, qui ont aimablement assisté Le Manic en traduisant les propos des deux Cubains. Photo Le Manic

Baie-Comeau – Les histoires de courage ne manquent pas parmi les quelque 200 athlètes qui prennent part aux épreuves de la Coupe du monde de paracyclisme sur route de Baie-Comeau. Celle du Cubain Damian Lopez Alfonso est particulièrement poignante.

Le résilient sportif n’est pas tout à fait un inconnu ici car il a pris part aux compétitions de la Coupe du monde de paracyclisme en 2011 et 2012 dans la région. À l’époque, il affrontait des cyclistes qui, comme lui, avaient leurs deux jambes. Damian a perdu ses deux avant-bras après une électrocution alors qu’il avait 13 ans. L’accident, qui l’a laissé entre la vie et la mort durant trois mois, l’a aussi défiguré et brûlé sur la majeure partie de son corps.

Aujourd’hui, Lopez Alfonso n’est plus dans la même catégorie. Il se retrouve désormais avec ceux qui n’ont plus qu’une jambe. Le 22 novembre 2017, alors qu’il s’entraînait, il a été heurté par un autobus et traîné sur plusieurs mètres. Les médecins ont dû se résoudre à lui amputer la jambe droite.

Après une période d’adaptation à sa nouvelle condition, le Cubain de 41 ans a repris l’entraînement il y a tout juste trois mois, de sorte qu’il n’a pas encore affronté ses nouveaux adversaires et il ne sait donc pas à quoi s’attendre. Il participera en après-midi vendredi à l’épreuve du contre-la-montre dans la catégorie C4.

Toutefois, le plus grand malheur n’avait pas encore frappé le cycliste. Quelques semaines avant son passage à Baie-Comeau, il a perdu sa plus grande partisane, sa mère, décédée. « C’est beaucoup plus facile de s’adapter à l’absence d’une jambe qu’à l’absence de sa mère », a confié Lopez Alfonso par le biais d’une interprète, Fabiola Vielma Gangas.

«Ma mère était très fière de ma carrière sportive et c’est important pour moi de poursuivre. Ces courses (le contre-la-montre de vendredi et la course sur route de dimanche), je les dédie à ma mère», souligne-t-il en ajoutant qu’avec tout ce qui lui arrive, il a aussi «le goût de vivre ma vie à fond».

Un support financier

Le lecteur aura probablement compris qu’en plus d’être marqué à ce point par la vie, Damian Lopez Alfonso ne roule pas sur l’or. Il reçoit bien une aide du gouvernement pour pouvoir s’entraîner à Cuba, mais pas un sou pour ses déplacements à l’étranger.

« On a une aide pour la coordination du voyage et des gens financent le voyage de façon privée », explique le physiothérapeute Alejandro Ricard Jimenez, des propos cette fois traduits par Robert Leblanc.

À Baie-Comeau, Damian et Alejandro, qui représentent à eux deux la totalité de la délégation cubaine à cette Coupe du monde, sont de nouveau hébergés par la Famille Myriam Beth’léhem. Les deux hommes se disent d’ailleurs enchantés à chaque fois qu’ils s’arrêtent sur la Côte-Nord, autant au chapitre de l’hébergement que du transport et de la nourriture, où tous peuvent manger ensemble à la cafétéria de l’école secondaire Serge-Bouchard.

« La vie en compétition est plus facile ici qu’en Europe, où on est plus laissés à nous-mêmes. On a toujours un très bon accueil à Baie-Comeau », souligne Lopez Alfonso. « C’est toutefois plus compliqué pour le transport et la logistique », tempère Ricard Jimenez. Son large sourire fait cependant croire que cette complication n’est pas suffisamment grande pour gâcher son plaisir d’être à Baie-Comeau avec un athlète vraiment hors du commun.

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