Transport régional aérien : toujours pas de réforme à l’horizon

Par Vincent Rioux-Berrouard 3:00 PM - 11 mars 2021
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En juillet 2020, la compagnie Air Canada a annoncé qu’elle suspendait ses liaisons dans plusieurs régions, ce qui a causé une onde de choc. Huit mois plus tard, où en est rendu le dossier?

À l’époque, le ministre des Transports du Québec, François Bonnardel, avait annoncé la création d’un groupe d’intervention réunissant plusieurs acteurs du milieu pour trouver des pistes de solutions visant à assurer une certaine pérennité au transport régional aérien.

Le ministre devait annoncer ses recommandations à la fin du mois de janvier, mais en ce début mars, rien n’a encore été annoncé. D’ailleurs, le ministère des Transports n’a pas répondu à notre requête médiatique pour savoir quand le ministre allait présenter un rapport.

Les maires ont hâte

Pour le maire de Sept-Îles, Réjean Porlier, la solution au problème du transport régional aérien passe par l’initiative de la Coop TREQ, qui est selon lui la solution qui aura le plus d’impact dans la région. Pour le maire, c’est ce type de solution qui fera que plus de gens envisageront de prendre l’avion parce que les prix seront abordables.

« Actuellement, les services aériens sont principalement utilisés par les gens d’affaires. Je pense qu’avec une coopérative comme TREQ, cela pourrait intéresser une clientèle touristique et des personnes qui doivent se rendre dans les grands centres, par exemple pour des soins médicaux. »

Pour ce qui est du rapport et des recommandations du ministre, Réjean Porlier souhaite par exemple la mise en place d’un prix plancher. Il craint que, comme cela est déjà arrivé, Air Canada revienne en région et tente de tuer la compétition avec des prix ridiculement bas.

De son côté, le maire de Baie-Comeau, Yves Montigny, a très hâte de connaître les recommandations du ministre des Transports. Il demande d’ailleurs que M. Bonnardel donne un échéancier à savoir quand il présentera ses recommandations.

Il y a actuellement des négociations entre le gouvernement fédéral et Air Canada pour que le transporteur puisse bénéficier d’une aide économique. M. Montigny précise que le gouvernement fédéral tenterait d’obtenir des garanties auprès d’Air Canada pour que celui-ci s’implique plus dans les dessertes régionales.

Le maire de Baie-Comeau émet donc l’hypothèse que le gouvernement du Québec attend de connaître le rôle d’Air Canada dans le transport régional aérien avant de divulguer ses recommandations.

Il pense qu’avec la pandémie, étant donné qu’il y présentement très peu de gens qui voyagent, il s’agit du meilleur moment pour mettre en place des réformes dans le transport régional aérien. « Les solutions qui seront présentées par le gouvernement du Québec doivent permettre d’avoir un service aérien stable et abordable », affirme Yves Montigny.

Il souhaite aussi que les réformes au transport régional aérien permettent à celui-ci d’être un outil de développement alors qu’une relance économique se pointe à l’horizon. Un autre point important pour M. Montigny est que la vision du gouvernement du Québec fasse que la Côte-Nord ait deux pôles de transport aérien, soit Sept-Îles et Baie-Comeau.

« Il faut que les deux villes les plus populeuses de la Côte-Nord puissent chacune bénéficier d’un service aérien de qualité. Si je prends l’exemple de ma ville, les citoyens ne se rendront pas à Sept-Îles pour prendre un vol en direction de Québec ou Montréal. Ils vont préférer prendre leur automobile.»

Des défis nombreux

Pour Yani Gagnon, copropriétaire de Pascan Aviation, il est préférable que le groupe d’intervention mis en place par le ministre des Transports prenne son temps avant d’émettre des recommandations parce que les solutions pour améliorer le transport régional aérien sont parfois complexes, surtout avec la pandémie qui a frappé durement ce secteur de l’économie.

L’enjeu principal, selon lui, pour améliorer les services aériens en région tient à la demande. « Il y a plusieurs régions où il y a de la demande à certains moments de l’année, comme la période touristique, mais après, les passagers ne sont plus au rendez-vous, c’est donc difficile de maintenir certaines liaisons», explique-t-il.

Le copropriétaire précise aussi que les frais pour les transporteurs ont continué d’augmenter malgré la crise, il est donc difficile pour ceux-ci de réduire le coût des billets.

Pour ce qui est des recommandations qui devraient être formulées par le ministre Bonnardel, M. Gagnon propose une formule de partage de risques. Comme il le dit, « les transporteurs ne peuvent pas prendre tous les risques. Peut-on mettre en place une sorte de filet de sécurité qui puisse assurer que la plupart des liaisons restent en place même quand la demande diminue ».

M. Gagnon croit aussi que pour améliorer le transport aérien en région, les transporteurs devraient arrêter de travailler en silo et favoriser la connectivité entre eux. Il conclut en affirmant que « les perspectives dans le monde de l’avion sont difficiles, mais je crois que les transporteurs peuvent jouer un rôle important dans la relance économique notamment en participant au développement touristique du Québec ».

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