Action-Chômage n’accepte pas de se faire passer un sapin

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 19 décembre 2022
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Des groupes de partout sur la Côte-Nord sont venus manifester à l'invitation d'Action-Chômage.

Action-Chômage Côte-Nord a manifesté son mécontentement de ne toujours pas compter sur une réforme en profondeur du régime d’assurance-emploi telle que promise cet été par le gouvernement libéral du Canada. « Un Noël sans réforme, c’est nous passer un beau sapin », déclare l’organisme.

C’est lors d’une journée de mobilisation tenue le 19 décembre à Forestville que l’organisme a rappelé à Justin Trudeau ce qui est exigé des chômeurs, soit « qu’il assure sa promesse d’une réforme ».  Un sapin de Noël à l’image du trou noir a été installé devant le bureau de Service Canada au centre d’achat de Forestville.

Cette action était réalisée en simultané avec plusieurs membres de l’Alliance interprovinciale pour l’assurance-emploi à travers le Québec, les provinces de l’Est et l’Ontario. La mobilisation s’est poursuivie au restaurant Le Danube bleu alors que les résultats de l’enquête effectuée par SEGMA recherche auprès des entreprises de la région sur l’emploi saisonnier ont été dévoilés.

Des employés et employeurs de l’industrie saisonnière sont aussi venus témoigner de ce qu’ils vivent année après année. Finalement, la journée s’est conclue avec une manifestation pacifique aux feux de circulation sur la route 138.

« Nos constats sont alarmants. Avec la crise économique qui s’annonce et la tendance à la dévitalisation, ce sont l’ensemble des régions qui sont menacées, leurs entreprises et les employés », a clamé Guillaume Tremblay, président de la CSN Côte-Nord, lors de la manifestation.

Selon Line Sirois, directrice d’Action-Chômage Côte-Nord, « le régime d’assurance-emploi actuel contribue à appauvrir ceux qui sont déjà dans des situations difficiles à l’approche du temps des fêtes ». « Plusieurs familles n’arrivent même pas à payer leurs factures en ne recevant que 55 % de leurs revenus habituels et de nombreuses personnes n’auront plus de prestations en janvier 2023, les plaçant dans une situation de grande précarité », a-t-elle ajouté.

Mme Sirois qualifie d’inacceptable « qu’un régime de protection social auquel tous les travailleurs cotisent soit aussi peu efficace en 2022 ». « Les chômeurs de l’industrie saisonnière qui doivent faire face à plusieurs mois sans prestations à cause du fameux trou noir, c’est inacceptable », a-telle lancé.

La réforme de l’assurance-emploi est donc une nécessité qui ne peut plus attendre, de l’avis des différents groupes sur place lors de la journée d’action.

« Le gouvernement a le devoir de nous assurer un régime d’assurance-emploi accessible, juste, universel et non discriminatoire. Nous devons protéger l’ensemble des Canadiens en cas de perte d’emploi, plus particulièrement ceux qui ont des emplois précaires (temps partiel, temporaire, de l’industrie saisonnière, etc.) », a conclu Line Sirois.

Les préjugés quant à l’assurance-emploi sont encore bien présents au sein de la population puisque certains employeurs se demandent pourquoi ils ne réussissent pas à trouver de la main-d’œuvre, alors que des personnes bénéficient du chômage.

« L’industrie saisonnière est là pour rester. Elle a besoin d’employés, elle aussi. Ceux qui ont des métiers spécialisés l’été n’ont pas nécessairement les compétences pour travailler dans le domaine de la santé ou dans la restauration, par exemple. Ce n’est pas une solution de remplir les postes vacants avec les chômeurs, ça va plus loin que ça. C’est pourquoi la réforme est importante », rappelle Mme Sirois.

« Il y a les réalités territoriales également, enchaîne Guillaume Tremblay. Ce n’est pas comme à Montréal où tout est proche. Quelqu’un de Tadoussac ne peut pas se rendre travailler à Baie-Comeau et ça dépend aussi des conditions de travail offertes par les employeurs à l’année. »

Les vrais chiffres

L’enquête effectuée par SEGMA recherche auprès des entreprises de la région sur l’emploi saisonnier a permis de dresser un portrait plus juste de cette industrie, selon Action-Chômage Côte-Nord. Au total, 450 entrevues téléphoniques et web ont été complétées dans les six MRC du territoire ainsi que dans les communautés autochtones.

  • 32,4 % des établissements sur la Côte-Nord affirment avoir eu recours au travail saisonnier au cours des 12 derniers mois.
  • 61 % des employeurs du secteur Hébergement et restauration comptent sur l’emploi saisonnier.
  • 77,8 % des heures saisonnières sont travaillées de mai à septembre.
  • Un emploi saisonnier a une durée moyenne de 15,9 semaines et génère 585,2 heures travaillées par année.
  • Sur les 5 875 emplois saisonniers recensés sur la Côte-Nord, 78,3 % sont à temps complet.
  • D’ici deux ans, les besoins en travailleurs saisonniers augmenteront de 1 796 emplois. Parmi cette hausse, 955 emplois proviennent d’entreprises qui, actuellement, n’embauchent pas de travailleurs saisonniers.
  • La masse salariale de l’ensemble des emplois saisonniers sur la Côte-Nord se situe dans une fourchette entre 82 et 114 M$ par année.

Recommandations

  1. L’élimination pure et simple du critère « taux de chômage »;
  2. Un critère d’admissibilité fixé à 420 heures ou 12 semaines de 15 heures, en fonction de ce qui est le plus avantageux pour le travailleur
  3. Une durée de prestations de 35 semaines;
  4. L’instauration d’un projet pilote de 15 semaines de prestations supplémentaires pour les travailleurs de l’industrie saisonnière;
  5. Une augmentation du taux d’indemnisation à 70 % de la rémunération assurable;
  6. Que le calcul des prestations se fasse sur la base des 12 meilleures semaines travaillées;
  7. Que tous les prestataires puissent gagner jusqu’à l’équivalent de 40 % du taux de prestations maximum sans que le montant de leurs prestations ne soit réduit. Les sommes gagnées au-delà de ce seuil devraient être déduites du montant des prestations, à raison de 0,50 $ pour chaque dollar excédentaire.
Un sapin aux couleurs du trou noir a été décoré devant le bureau de Service Canada à Forestville.