Climat: nouvelle formation pour les enseignants
Une rencontre avec un castor lors d'une sortie en nature pourra ouvrir la porte à de multiples apprentissages, en plus de 'reconnecter' le jeune à la nature. (AP Photo/Manuel Valdes)
Une formation développée par une équipe de l’Université du Québec à Montréal propose aux enseignants du préscolaire-primaire et du secondaire des outils pédagogiques qui visent à reconnecter leurs jeunes à la nature en contexte de changements climatiques, tout en générant des apprentissages.
Force est ainsi de constater que plusieurs jeunes sont déconnectés de la nature et obnubilés par leurs écrans, et que plusieurs témoignent des symptômes d’écoanxiété qui peuvent avoir un impact sur leur réussite éducative, a dit la responsable du projet, la professeure associée du département de didactique Virginie Boelen.
«C’est une pédagogie qui est à contre-courant de ce qu’on fait, qui est positive et constructive», a-t-elle déclaré lors d’une longue conversation avec La Presse Canadienne en marge du Jour de la Terre, lundi.
«Il faut arrêter de taper (sur les jeunes) avec les problèmes de changements climatiques. On est en train de les assommer et de les détruire. (Les problèmes) sont là, on ne les évite pas, mais on va travailler d’abord quelque chose de constructif et de positif pour que le jeune nourrisse quelque chose qui soit fort, qu’il développe une solidarité écologique. Et à ce moment-là, face à ces enjeux-là, il va trouver les ressources et il sera beaucoup plus constructif.»
Mme Boelen a jusqu’à présent accompagné une quinzaine d’enseignants provenant de trois écoles primaires de la région de Montréal dans le cadre d’activités de plein air.
Les activités qu’elle propose peuvent se dérouler dans un parc, une forêt, à la montagne, mais aussi à proximité des écoles, ce qui exige moins de temps et de logistique.
«La sortie que l’on fait à un moment donné est née de la sortie précédente et elle nourrira la sortie suivante», explique Mme Boelen dans une des vidéos produites pour ce projet et disponibles sur la plateforme ecoleouverte.ca.
«C’est ainsi qu’on crée une certaine continuité, un continuum entre les sorties et finalement une certaine cohérence. Ainsi se tisse un lien entre l’enfant et le lieu, le jeune commence à connaître le lieu et il remarque les moindres changements avec l’envie d’en prendre soin.»
Il ne s’agit donc pas de déplacer le cours de français et de mathématiques à l’extérieur, a-t-elle précisé. L’objectif est plutôt de permettre au jeune d’entrer en relation avec la nature, et à partir de ce qu’il aura vécu avec cette nature, de générer des apprentissages en lien avec le programme de formation de l’école.
«On appelle ça une forme d’éco-conformation, de laisser la nature être cette partenaire d’apprentissage qui va nous apprendre des choses, a dit Mme Boelen. Donc de travailler cette réceptivité par rapport à cette nature, dans laquelle on entretient une relation de réciprocité, comme si on s’adressait à un ami avec qui on va jouer.»
«Être connecté à la nature» signifie d’aimer passer du temps dans la nature, de se sentir bien dans cette nature, de choisir d’aller jouer dehors plutôt que de rester à l’intérieur, a-t-elle expliqué. C’est aussi le fait d’aimer prendre soin de cette nature, de vivre un sentiment d’unité et d’harmonie avec cette nature, et de sentir qu’on fait partie d’un tout.
«L’intention pédagogique première, c’est de reconnecter le jeune au territoire, et ça dans une perspective de contrer le phénomène d’écoanxiété, a dit Mme Boelen. L’écoanxiété, c’est une émotion qui a un impact sur la santé mentale, et reconnecter le jeune au territoire avec ce sentiment de faire partie de la grande famille du vivant, ça aussi c’est une émotion, c’est le sentiment de ne pas être seul.»
Des recherches ont d’ailleurs montré que le contact direct avec la nature produit des effets bénéfiques sur la santé mentale et physique des jeunes, en plus de favoriser des apprentissages.
«Et la recherche a démontré que ça générait un sentiment de bien-être, de faire partie de ce ‘grand corps du vivant’, a renchéri Mme Boelen, et aussi une attitude beaucoup plus constructive et positive à l’égard de l’avenir, à l’égard des enjeux de changements climatiques.»
Quand on parle d’environnement dans les écoles, a-t-elle fait remarquer, on en parle trop souvent comme d’un «problème» ou comme de quelque chose qu’on doit «gérer». La nouvelle pédagogie qu’elle propose vise plutôt à aider le jeune à réaliser qu’il fait partie du «vivant».
Le programme ne travaille pas seulement avec le cognitif, a dit Mme Boelen, mais aussi sur le registre des émotions qui accompagnent le fait de «se sentir vivant».
«Et l’idée c’est justement de contrer ce phénomène d’écoanxiété qui pour plusieurs a été généré aussi par l’éducation, a-t-elle dit. Il y a cette intention de développer une nouvelle compétence qui serait une compétence verte, une capacité à entrer en relation avec cette nature, cette capacité à développer son identité écologique.»
Cette identité mènera à l’acquisition de ce qu’elle appelle une «éco-citoyenneté», le désir de prendre soin de la nature et de se mobiliser pour elle.
Les gestes qui seront posés pour la nature, poursuit Mme Boelen, ne le seront plus par peur, «parce qu’on se dit que tout va mal et qu’il faut bien faire quelque chose», mais par amour, parce qu’on est attachés à la nature.
«Dans cette pédagogie, on apprend au jeune à réapprendre de cette nature qui est son partenaire de vie, qui est avec lui tout le temps, qui l’accompagne et qu’il a complètement oubliée», a conclu Mme Boelen.
Horizon
Horizon, des contenus marketing présentés par et pour nos annonceurs.