Violence à Sept-Îles : Claude Poirier s’attend à une riposte des Hells Angels

Par Emy-Jane Déry 12:14 PM - 24 avril 2024
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La résidence d’un couple d’aînés à Moisie a été fusillée par erreur, mardi soir. Photo Sylvain Turcotte

La guerre de territoire pour le trafic de stupéfiants continue d’être à l’origine d’événements violents sur la Côte-Nord. Le sentiment de sécurité des citoyens diminue, tandis que les balles perdues et les erreurs se multiplient. Pour le chroniqueur judiciaire Claude Poirier, la solution pour un retour au calme passera immanquablement par les tribunaux. 

Les enquêtes des autorités tendent à démontrer que les événements de violence sont exécutés par des « indépendants » qui ramassent des contrats. Ça se traduit par des individus peu expérimentés de Montréal, qui viennent dans la région avec des armes à feu. Résultat : des balles perdues, des erreurs sur la personne, des victimes collatérales. 

« Il n’y a aucun leader là-dedans. Les gangs de rue, il n’y a rien de pire que ça. Les porteux de valise, c’est dangereux », lance le populaire chroniqueur judiciaire, Claude Poirier. 

Selon la Sûreté du Québec, All Boivin et le Pic Turmel du Blood Family Mafia sont liés aux événements de violence qui se déroulent sur le territoire nord-côtier.

Le premier est le deuxième criminel le plus recherché au pays, pour des histoires de trafic de stupéfiants. Le Programme Bolo, une initiative visant à encourager les citoyens à garder l’œil ouvert, offre jusqu’à 100 000 $ de récompense pour All Boivin. 

Le second serait toujours caché en Europe. À 27 ans, Dave Turmel mène une improbable rébellion contre les Hells Angels. Selon le Bureau d’enquête du Journal de Montréal, il aurait rallié derrière lui une bande de trafiquants indépendants, ou issus des gangs de rue refusant de payer des redevances aux motards. 

Ça va peut-être finir dans la violence et ces jeunes-là, il y en a qui vont se ramasser à manger les pissenlits par la racine.

Claude Poirier

« Je m’attends qu’à un moment donné, il va y avoir une riposte [des Hells Angels]. Ça va peut-être finir dans la violence et ces jeunes-là, il y en a qui vont se ramasser à manger les pissenlits par la racine », a commenté Claude Poirier, au Nord-Côtier. « Les Hells Angels n’ont pas besoin des petits gangs de rue pour régler ça. C’est puissant les Hells Angels, la journée qu’ils vont décider de régler le cas, ils vont le régler », a-t-il poursuivi. 

D’innocentes victimes

En décembre, une maison a été criblée de balles au parc Ferland. L’une d’elles s’était perdue sur une résidence voisine. En janvier, un homme a eu toute frousse dans le canton Arnaud lorsqu’il a vu une balle de fusil traverser un mur de sa maison, tandis qu’il se tenait devant la porte-patio. 

La semaine dernière, deux individus, dont un mineur, ont été arrêtés après qu’un homme ait été blessé par arme à feu à Gallix. Mardi soir, la résidence d’un couple d’aînés à Moisie a été fusillée par erreur. 

« Il y a de maudites têtes folles qui ont des armes à feu, c’est aussi simple », s’est exclamé le chroniqueur judiciaire. « Ce sont d’innocentes victimes. Ces gens-là n’ont pas à vivre ça. Il va falloir qu’ils [les tribunaux] mettent le paquet, ça vient de finir. Ça passe, je vous le dis, par le Directeur des poursuites criminelles et pénales, les soutanes rouge et noire au niveau du Québec et le ministre de la Justice. » 

La situation n’est en rien comparable aux événements de violence survenus à Montréal dans les dernières années, relativement aux guerres de gang de rue, souligne M. Poirier. Cependant, ce sont les tribunaux qui devront agir pour ramener un climat de sécurité, a réitéré le chroniqueur judiciaire et négociateur. 

« Je me souviens à l’époque, il y avait des cas d’enlèvement. À un moment donné, le ministre de la Justice de l’époque avait passé un message clair et précis, à l’effet que ce serait tolérance zéro. Pour des affaires d’enlèvement, les gars se ramassaient avec 12 et 15 ans de pénitencier, donc ça a diminué de 80 % », a-t-il illustré. 

La présence policière aide, mais les policiers « n’ont pas de boule de cristal », a-t-il dit. « C’est bien beau faire des opérations d’envergure et publiciser ça, mais à un moment donné, ça passe par les tribunaux », a-t-il insisté. « La Couronne doit s’opposer à la remise en liberté quand ils accusent des gars comme ça. La Couronne doit demander des sentences exemplaires. » 

Pas de contrôle

Sans leader dans le milieu du crime organisé, c’est le chaos, explique Claude Poirier. 

« D’abord, il n’y a plus de leader. Je l’ai toujours dit et je le répète, et je ne suis pas le seul à le dire, je me rappelle avoir parlé avec des gars de la GRC, la journée que Vito Rizzuto, celui qui était le parrain à Montréal, a été amené aux États-Unis pour purger sa peine, c’est là que les troubles ont commencé, parce que Vito Rizzuto, il avait le contrôle. Que ce soit au niveau des gangs de rue, au niveau des motards, du crime organisé québécois ou italien. La journée qu’il n’était plus là, on a vu ce que ça a donné. »

Vito Rizzuto a été arrêté en 2004 et extradé aux États-Unis en 2006. Libéré en 2012 d’une prison du Colorado, il a repris le contrôle des activités avant de mourir subitement des complications d’une pneumonie en 2013.

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