Camping du lac Laval : un couple de Forestville se bat pour éviter l’expulsion

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 19 juillet 2022
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Nancy Therrien et Dany Langelier ont érigé leur roulotte au camping du lac Laval en 2004 après avoir obtenu une autorisation écrite de la Zec de Forestville. Malgré tout, ils seront expulsés à compter du 1er janvier 2023. Photo : Courtoisie

Un couple de Forestville, Dany Langelier et Nancy Therrien, est prié de déplacer sa roulotte de camping permanente située au lac Laval, sur le territoire de la Zec de Forestville, en raison de la Loi sur les terres du domaine de l’État, et ce, malgré une autorisation officielle de s’y installer.

En 2016, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) a adopté une mise à jour de la réglementation sur les campings incluant une période de cinq ans pour s’y conformer. Elle sera appliquée de façon formelle le 1er janvier 2023, soit deux ans plus tard que prévu.

« Nous devons donc quitter à l’automne puisque nous sommes considérés comme des squatteurs du territoire public », révèle Nancy Therrien, qui trouve cette situation injuste.

C’est qu’entre 2003 (résolution adoptée) et 2007, la Zec de Forestville avait permis aux personnes intéressées d’installer une roulotte permanente au camping du lac Laval, selon des critères bien précis : construction usinée seulement, certification d’immatriculation du fabricant, sur roues avec un pôle et déménageable, largeur d’un maximum de 12 pieds et longueur maximale de 45 pieds, inspection avant installation.

Mme Therrien et M. Langelier ont saisi l’opportunité comme quatre autres campeurs. « Nous sommes les seuls à avoir respecté tous les critères exigés. Notre installation a été inspectée comme il se doit et nous avons obtenu l’accord de la Zec », ajoute Mme Therrien qui déplore que son dossier ne soit pas traité comme un cas d’exception.

« Avant 2016, il n’y avait pas de règlements pour les habitations motorisées sur les terrains de camping par le MFFP. Il revenait aux Zecs d’en établir. Pourquoi revenir en arrière de 13 ans », se questionne Mme Therrien.

Quand il a été avisé de son éviction, le couple a immédiatement entrepris des démarches afin de faire renverser la vapeur.

« Nous avons dépensé 55 000 $ pour cette roulotte au total, factures à l’appui, commente la principale intéressée. Nous n’obtiendrons jamais cette valeur en la revendant. On nous a permis de s’installer là, maintenant on nous chasse et on devra en payer les frais. »

Une demande de délivrance de bail de villégiature a été réalisée auprès du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN) « afin de répondre aux normes exigées en déplaçant la roulotte ailleurs, mais sur le lac Laval ».

« Nous avons reçu un appui de Zecs Québec, qui qualifie notre dossier comme un cas d’exception. Mais, la Zec de Forestville s’est opposée à notre demande », se désole la Forestvilloise.

Le MERN et le MFFP se lancent la balle à savoir qui analysera le dossier des Forestvillois, selon Nancy Therrien.
« On a eu plusieurs rencontres, on attend une réponse prochainement pour confirmer si on doit quitter ou si on peut demeurer sur place. »

Si le résultat s’avère encore une fois négatif, les campeurs n’entendent pas baisser les bras. Ils entameront des démarches judiciaires.

« Nous avons été honnêtes, nous avons respecté les conditions établies à la lettre et notre franchise ne nous a rien apporté de plus que ceux qui n’avaient pas construit leur roulotte selon les critères », clame la porte-parole du couple.

Pour Nancy Therrien et son conjoint, le camping du lac Laval est une deuxième maison. Ils en sont les gardiens, été comme hiver.

« On l’entretient sans rien demander à personne. On répare les ponceaux, on avise la Zec s’il y a des bris, on s’investit pour cet endroit depuis 19 ans parce qu’on y tient. On ne sent pas leur appui pour nous garder sur leur terrain. »

« Nous sommes vraiment déçus de cette situation en raison du travail et de l’argent mis sur cette roulotte ainsi que de notre emplacement que nous adorons. C’est comme si l’entente écrite entre la Zec et nous n’était que du vent. Nous ne sommes pas plus soutenus qu’un squatteur entré de nuit, qui s’installe n’importe où avec son autobus désaffecté », conclut Nancy Therrien.

Réactions

Du côté de la Zec de Forestville, le président Jacques Brousseau n’a pas voulu commenter le dossier, mentionnant que son organisation « doit se plier aux exigences du ministère ».

Le MFFP n’a pas été en mesure de répondre aux questions du Journal après plus de 10 jours d’attente « compte tenu du fait que la demande nécessite plusieurs vérifications et qu’elle touche un certain nombre d’intervenants », selon le porte-parole Stéphane Desmeules.

Dany Langelier et Nancy Therrien sont déçus d’être considérés comme des squatteurs. Photo : Courtoisie

55 évictions en un an

Selon ses plus récentes données, le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN) a réalisé 55 évictions d’occupants sans droit durant la période d’avril 2021 à mars 2022 sur la Côte-Nord. Quant au nombre de squatteurs, il est estimé à 272.

Notons qu’en vertu de la Loi sur les terres du domaine de l’État, toute utilisation permanente du territoire public n’est possible qu’à la suite de l’attribution d’un droit accordé par le MERN ou par une MRC délégataire.

Un bail est requis pour tout bâtiment permanent sur une terre publique. Les modalités pour obtenir un bail de villégiature varient selon les régions.

Il est possible d’obtenir un tel bail par la participation à un tirage au sort, par le transfert d’un bail qui a déjà été octroyé ou en déposant une demande au premier requérant pour certains secteurs de la région.

En ce qui concerne le camping, en plus de devoir quitter l’emplacement occupé au terme d’un séjour d’au plus sept mois, d’autres conditions doivent être respectées, soit l’utilisation d’un équipement mobile, temporaire et non attaché au sol et le retrait, à la fin du séjour, de tout équipement de camping.

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