Mine du lac Bloom: 7 lacs dans la mire pour l’entreposage de résidus miniers
Les installations de minerai de fer Québec au lac Bloom. Photo archives
Minerai de fer Québec, gestionnaire de la mine du Lac Bloom, souhaite utiliser sept plans d’eau pour l’entreposage des résidus miniers générés par l’exploitation de la mine. Des représentants d’Environnement et Changement climatique Canada (ECC) se sont déplacés à Fermont et à Sept-Îles les 21 et 23 février dernier pour mener à bien deux consultations publiques sur le projet et le plan de compensation prévu.
La longévité des activités de la mine est tributaire de cette augmentation de la capacité d’entreposage des stériles, ces roches extraites par l’exploitation minière afin d’accéder aux minerais, soutient l’entreprise.
La firme WSP Canada a été mandatée pour évaluer les alternatives de gestion des résidus et les mesures compensatoires à mettre en place, principalement sur l’habitat des poissons. Les différentes mesures du plan compensatoire sont évaluées à 14 millions de dollars et incluent sept projets au Québec, dont l’ajout d’infrastructures (ponceaux, frayères) et la recherche sur le saumon atlantique.
Les écologistes très préoccupés
Selon le plan envisagé, près de 156 hectares de lacs et de cours d’eau seraient utilisés pour entreposer les stériles, ce qui fait soulève l’ire des groupes environnementaux.
Ce projet pourrait créer un dangereux précédent, selon le directeur de la Fondation Rivières, André Bélanger. « C’est une exception qui risque de devenir la règle et c’est ce qui nous inquiète », indique-t-il. Il estime que la façon de faire de Minerai de fer Québec, qui troque un plan de compensation pour l’entreposage des déchets de la mine du Lac Bloom, s’inscrit « dans une grande mode ».
« On peut détruire des milieux naturels, tant qu’on fait de la compensation. C’est vrai pour les milieux humides, c’est vrai pour les mines», déplore-t-il.
Mais «la prémisse n’est pas bonne à Bloom», ajoute M. Bélanger. «On dit qu’il faut mettre les résidus dans des lacs naturels qu’on va ainsi détruire parce qu’il y a une trace de minerai dans le trou où normalement, comme partout ailleurs, les stériles seraient entreposées. Mais ce potentiel, est-ce que la mine va l’exploiter un jour? Elle n’en fait pas la preuve! On ne peut pas dire qu’autour de cette mine, il manque de potentiel. Cette trace peut-elle justifier de détruire l’environnement?»
La Fondation Rivières fait des démarches auprès de la commission d’accès à l’information pour tenter de comprendre ce qui a pu mener à un tel revirement (voir mise en contexte plus bas). Son porte-parole lance un cri du cœur. « Le danger est que ça crée un précédent. Jusqu’à quel moment l’environnement va être protégé de visées « extractionnistes »? C’est vrai partout. Ils vont mettre 10, 15 millions en compensation pour faire 100 millions de profit supplémentaire. Ce n’est pas un enjeu de rentabilité, ils vont juste faire plus d’argent. Mais on ne peut pas compenser la destruction de l’environnement! »
Des résidents qui habitent près de certains sites envisagés pour le dépôt de résidus s’inquiètent des désagréments qui pourraient être engendrés. Minerai de fer Québec soutient que des mesures d’atténuation sont prévues, ainsi que d’éventuelles compensations.
Mise en contexte
Rappelons que le projet avait reçu un avis défavorable du BAPE en février 2021 en ce qui a trait à l’augmentation de la capacité d’entreposage des résidus et stériles miniers de la mine de fer du lac Bloom. Le rapport du BAPE indiquait que la minière n’avait « pas fait la démonstration que les solutions retenues pour la gestion des rejets miniers sont celles qui minimisent les impacts sur les milieux humides et hydriques.» « Dans son analyse [la commission d’enquête du BAPE] constate – et elle a même fait appel à un expert pour le confirmer – qu’il y a d’autres solutions que de remblayer des lacs », déclarait Alexandra Barbeau, conseillère en communications du BAPE, à Radio-Canada.
Le 9 mars 2022, le gouvernement du Québec allait cependant de l’avant avec une autorisation à Minerai de fer Québec tout en exigeant le respect de plusieurs conditions, dont un plan compensatoire pour les pertes d’habitats du poisson et des milieux humides et un bilan d’émissions de gaz à effet de serre. On estime que l’expansion du parc de haldes à stériles permettrait de prolonger les opérations minières sur une période de 20 ans.
On saura à l’automne si le projet ira de l’avant.
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