Les radios de la Côte-Nord prêtes pour la musique autochtone
La chanteuse innue Kanen, au Festival Innu Nikamu 2022.
La demande déposée par Mathieu McKenzie devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) en a fait sourciller plusieurs dans les radios commerciales de la Côte-Nord, entre autres parce que certaines de ces radios ont de la difficulté à mettre la main sur le produit fini des artistes autochtones.
Pour qu’une chanson soit jouée à la radio, elle doit être rendue disponible ailleurs que sur les plateformes de streaming, c’est-à-dire que les stations doivent être en mesure d’obtenir le fichier informatique contenant le morceau, si elles veulent pouvoir l’ajouter à leur rotation. À en juger par les dires de Stéphan Martel, directeur général de la Radio CHLC, de Baie-Comeau, ce partage ne semble pas toujours évident sur l’ensemble de la Côte-Nord.
« On accueille très bien cette nouvelle-là, les autochtones font partie de notre région et il faut les inclure à notre radio », débute-t-il. « Par contre, il va falloir qu’ils nous fournissent de la musique, si on veut en faire jouer, parce qu’en ce moment, nous n’avons rien dans notre système », poursuit-il.
Le contenu musical peut être acheminé aux radios directement par la maison de production, par l’artiste lui-même, par des plateformes de partage conçues à cet effet, ou bien par le biais de « trackers »; des entreprises engagées par les maisons de production qui s’occupent de partager le nouveau contenu aux différents médias de diffusion.
Certaines stations de radio communautaires innues ont également de la difficulté à se procurer la musique de leurs artistes. C’est notamment le cas de CHME, la radio communautaire d’Essipit, qui tente de présenter du contenu autochtone à ses auditeurs matin et soir.
« Ç’a été longtemps difficile d’avoir accès à cette musique », note Marc-Antoine Labine Labonté, animateur et responsable musical pour CHME. « C’est beaucoup mieux avec [la maison de production] Musique Nomade, mais avant ça, le contenu autochtone était rare sur les plateformes de partage et il n’y avait pas de trackers pour nous envoyer la musique ».
Musique Nomade et Makusham Musique
L’étiquette Musique Nomade, une maison de disques à but non lucratif, s’est donné comme but de donner les ressources nécessaires à ses artistes pour percer le marché. Joëlle Robillard, directrice générale, voit son équipe comme étant des « défricheurs ».
« Au cours des six, ou sept dernières années, nous avons réussi à mettre davantage nos artistes de l’avant sur les plateformes de streaming », note-t-elle. « Notre partenariat avec Sirius Canada s’est aussi grandement amélioré, mais ça demeure difficile avec les radios commerciales », ajoute celle dont l’écurie compte dans ses rangs Kanen et Laura Niquay.
Makusham Musique, mentoré par Florent Vollant, est également un joueur important dans l’alignement de la musique autochtone. L’étiquette a notamment lancé deux albums lors de la même soirée, soient ceux du groupe Maten et de Pascal « Pako » Ottawa, quelques jours après le dépôt du mémoire au CRTC. L’événement mettait également en lumière la sortie de l’album du reggae-man Shauit, représenté par l’étiquette Pasa Musik.
Les 31 chansons composant les trois albums présentés ont été envoyées aux stations de radio de la province.
Inégal combat contre le streaming
L’imposition de quotas, autochtones comme francophones, fait sourciller le directeur des programmes pour le Groupe Radio Simard, propriétaire de la Radio CHLC, Christian Duchesne.
« À la base, je suis contre les quotas, quels qu’ils soient », mentionne-t-il. « Ce qui est le plus triste, c’est qu’on se fait imposer des contraintes alors que les Spotify, Apple Music et autres plateformes de streaming n’en ont aucune », déplore-t-il.
Mathieu McKenzie est aussi d’avis que les plateformes de streaming ne sont pas assez scrutées et croit que l’adoption du projet de loi C-11 aidera beaucoup les artistes à gagner en visibilité. Ce projet de loi donnerait le pouvoir au gouvernement et au CRTC d’intervenir dans les algorithmes des géants du streaming, dans le but d’augmenter la « découvrabilité » des artistes émergents.
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