Pire année pour la saison touristique?

Par Renaud Cyr 6:30 AM - 27 juillet 2023
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Le début de la saison touristique sur la Côte-Nord a été chamboulé en termes d’achalandage avec ses réservations annulées et l’absence d’automobiles sur ses routes. Photo Tourisme Côte-Nord

Les multiples cataclysmes qui se sont abattus sur la Côte-Nord depuis le début de l’été font craindre le pire pour l’achalandage touristique dans la région. Alors que Tourisme Côte-Nord compte sur les vacances de la construction pour sauver ce qu’il reste de la haute saison, l’Association des pourvoiries de la Côte-Nord croit que s’en est fait de la manne des pêcheurs et jette le blâme sur nos représentants politiques à Québec.

Entre la fermeture du pont Touzel à Rivière-au-Tonnerre à la fin du mois de mai jusqu’aux importants feux de forêt qui ont décimé une partie de notre territoire forestier, marqué le ciel et la qualité de l’air durant le mois de juin, il va sans dire que la Côte-Nord a subi un énorme choc en ce début de saison touristique.

Un choc qui semble avoir eu raison de l’attractivité de la région, du moins pour le moment.

Pour Johannie Francœur-Côté, directrice générale de Tourisme Côte-Nord, la médiatisation en continu des cataclysmes qui ont affligé la région n’a pas été bénéfique pour l’achalandage touristique.

« Les médias qui ont fait beaucoup de sensationnalisme autour des événements, et ça pas beaucoup aidé l’image de la Côte-Nord auprès du public », indique-t-elle.

Même son de cloche du côté de Charles Pinard, président de l’Association des pourvoiries de la Côte-Nord.

« Les gens restent sur l’impression que les problèmes ne sont jamais réglés. Il n’y a aucun téléphone qui sonne, et pour moi l’été est terminé », tranche-t-il.

Un mois de juin à oublier

Le mois de juin a débuté sur les chapeaux de roues pour plusieurs entreprises touristiques comme les pourvoiries, les forçant à annuler bon nombre de réservations prises antérieurement.

« Quand les gens annulent leur voyage de pêche ou leur visite en forêt, ils vont ailleurs et découvrent autre chose pour se revirer de bord et profiter de leurs vacances », ajoute-t-il du même souffle.

Pour ce qui est de l’achalandage en général, Johannie Francœur-Côté fait valoir qu’il y a « plusieurs discours et plusieurs perceptions » qui se côtoient dans l’espace public.

« Certaines personnes voient beaucoup de visiteurs, et d’autres non », fait-elle remarquer.

« Il faut dire que ça fait un mois qu’on annonce de la pluie sur la Côte-Nord presque tous les jours », ajoute-t-elle.

Pourvoiries : grandes perdantes ?

Les voyages de pêche, source profitable de revenus pour les pourvoiries, ont été fortement perturbés par la friabilité du climat.

L’écart persistant entre les chaleurs extrêmes et les épisodes de pluie au climat plus tempéré ont « mélangé le poisson », souligne Charles Pinard.

Les membres de l’Association des pourvoiries de la Côte-Nord ont bénéficié d’un grand programme d’aide de 24,6 millions de dollars en 2021 pour leur développement et leur croissance.

« Cette aide a généré plus de 150 millions d’investissements. Cependant, les pourvoyeurs ont des hypothèques sur le dos et certains se demandent comment ils vont s’en sortir avec leurs nouvelles installations qui ne sont pas occupées », déclare le président.

Manque d’écoute du politique

Pour Charles Pinard, l’absence du politique pendant les crises du mois de juin a empiré la situation.

« Il semblerait qu’au gouvernement du Québec malgré nos deux députés de la région, dont une ministre, on n’a vu aucune sortie publique », s’indigne-t-il.

Le gouvernement du Québec a récemment mis sur pied un programme d’aide de 50 millions de dollars pour les entreprises touchées par les feux de forêt avec Investissement Québec et les MRC.

« Le gouvernement compense avec des prêts » soulève sèchement le président. « Même si le taux d’intérêt est ridiculement bas, ça reste un prêt avec une mensualité et un remboursement », conclut-il.

Mais pour le président de l’association, c’est trop peu trop tard.

« À force de tout fermer, le gouvernement n’envoie pas le bon message alors que certains pourvoyeurs auraient pu continuer à opérer. C’est sûr qu’il va y avoir des impacts, et ce n’est pas plaisant pour nous », mentionne-t-il.

« Nous sommes devenus le tiers-monde de la province. Nos députés devront s’activer, car il y a quelque chose qui ne fonctionne pas », conclut-il.

Se refaire pour la suite

Même si le début de la saison touristique a été difficile, la directrice générale de Tourisme Côte-Nord fait valoir que tout n’est cependant pas perdu pour les années à venir pour la Côte-Nord, qu’elle qualifie de « région en émergence ».

« L’engouement initial du temps de la pandémie reste, car nous avons beaucoup gagné en popularité durant les dernières années », exprime-t-elle.

« Il faut se rattacher à ça et se dire que le potentiel est toujours là pour faire la promotion de la région », termine la directrice générale.

Les vacances de la construction amènent toutefois leur lot d’espoir.

« On s’attend à ce que ce soit très achalandé. J’entends beaucoup parler qu’il y a des gens sur la route, certains avec des plaques d’immatriculation de l’extérieur de la province », estime Johannie Francœur-Côté.

De son côté, Charles Pinard reste dubitatif : « C’est pas en deux semaines qu’on va se refaire et s’en sortir », laisse-t-il entendre.

Les statistiques sur l’achalandage seront connues en fin d’année, comme les résultats sur les impacts réels du mois de juin sur les opérations des pourvoiries.

« Il y a certaines entreprises touristiques qui disent qu’elles sont en péril. Il est difficile de savoir si c’est une réalité, mais il y a beaucoup d’inquiétude », dévoile Johannie Francœur-Côté.

Pour Charles Pinard, la chasse à l’orignal sera garante d’un succès assuré pour la suite, mais le président estime qu’il « va falloir que les élus sortent en public pour rassurer les gens quand le genre de situations que nous avons connues se résorbent et reviennent à la normale ».

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