Un été agricole à oublier pour Pointe-aux-Pommes

Par Émélie Bernier 6:01 AM - 15 août 2023 Initiative de journalisme local
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Frédéric Dallaire est découragé par la saison agricole 2023. Photo Julien Choquette.

Jovial, Frédéric Dallaire des Vergers Pointe-aux-Pommes, n’en est pas moins un peu découragé. « Disons que ça ne se passe pas très bien », résume celui qui cultive fraises, framboises, bleuets et pommes à Pointe-aux-Outardes. Ou du moins, essaie de cultiver dans des conditions météorologiques difficiles…

L’été 2023 sera un été à oublier pour les agriculteurs de la Côte-Nord, aux prises, comme ailleurs au Québec, avec des précipitations diluviennes, des vents importants et des feux de forêt de surcroît.

À Pointe-aux-Pommes, certaines cultures offrent de meilleurs rendements que d’autres, mais ce n’est certainement pas le cas des fraises. « Les fraises étaient belles au début, mais ensuite, elles étaient si petites que c’était comme cueillir des fraises des champs. Puis, j’ai arrêté d’en ramasser parce qu’il y en avait trop de pourries en même temps. J’ai eu le quart de mes rendements annuels pour ce fruit », lance M. Dallaire qui remet même en question l’avenir de cette production sur sa ferme.

Les résultats ne sont guère plus encourageants dans la framboise, mais la saison n’est pas finie et le producteur ne perd pas espoir. « Au début, c’était bien parti, mais là, il y a trop d’eau. Je dois secouer les plants pour les débarrasser des fruits abîmés. Dans les fraises et les framboises, mes ventes jusqu’ici n’ont même pas payé les fertilisants, et là je ne compte pas le temps mis sur le désherbage et la cueillette. »

Le producteur fonde beaucoup d’espoir dans les bleuets, sa production la plus importante. « Jusqu’ici, c’est un peu au ralenti, mais ça va quand même bien parce que les terrains sont bien drainés et le surplus d’eau finit par s’en aller. Le problème que j’anticipe, c’est le gel. La pleine lune arrive le 29 août, ça va être des nuits où on va moins bien dormir. »

Mais même dans le bleuet, la manne est loin d’être assurée. « Dans le bio, ils nous offrent 50 sous la livre, mais ça en coûte 60 à produire. Pendant l’année, les transformateurs vont probablement nous faire des paiements, mais tout dépend des ventes. »

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Il lui est difficile, voire impossible, d’obtenir de l’aide. Hormis pour le bleuet, les cultures des Vergers Pointe-aux-Pommes ne sont pas d’assez grande envergure pour réclamer de l’assurance récolte.

« L’assurance récolte, elle est faite pour les gros producteurs ! Il faut faire 300 000 $, 400 000 $ pour obtenir du support de la Financière agricole. Moi, je suis seul employé, je ne rentre pas dans les barèmes… Je n’ai aucune assurance », résume-t-il.

Même si son métier le passionne, il songe parfois à quitter. « J’irais travailler chez Alcoa, je ferais 100 000 $ par an ! C’est beau, aimer ce qu’on fait, mais on a une maison à payer, des enfants à faire vivre… Juste pour les tracteurs, j’ai 30 000 $ de paiement. Si je ne pouvais pas compter sur ma conjointe et sur son salaire à l’extérieur de la ferme, je ne pourrais pas continuer. »

Les beaux discours sur le développement de l’autonomie alimentaire dans les régions éloignées le font sourire. « Ça passe par les petits agriculteurs, mais on dirait qu’on préfère aider ceux qui font du maïs pour le bétail », lance Frédéric Dallaire, avant de retourner au champ faire ce qu’il aime. À perte.

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