Été pourri pour l’astronomie

Par Émélie Bernier 8:01 AM - 22 août 2023 Initiative de journalisme local
Temps de lecture :

Istock

Les amateurs d’astronomie sont au nombre de ceux pour qui l’été 2023 aura été une suite de déceptions. Fumée et smog des feux de forêt, nuages, précipitations ont plus souvent qu’autrement compliqué les rendez-vous avec les étoiles, planètes et autres constellations.

Le site web du Parc nature de Pointe-aux-Outardes présente l’animation Les yeux vers les étoiles comme « une activité phare ». Les visiteurs qui y participent ont la chance, si le ciel le permet, de découvrir planètes, nébuleuses et autres constellations via un télescope de 45 cm de diamètre.

« Apprentissages et rêveries garantis » n’auront malheureusement pas été au rendez-vous en cette saison beaucoup plus pluvieuse que la normale saisonnière. »On a peut-être réussi à observer quatre ou cinq fois cet été… Ce n’est réellement pas bon ! On fait ça depuis 2005 et c’est la première fois que c’est difficile à ce point », indique Frédéric Bénichou, responsable du Club d’astronomie et membre de l’équipe du Parc nature.

En début d’été, les feux de forêt ont énormément nui à la visibilité. « On a rien vu du tout ! On ne voyait pas le soleil, alors les étoiles, on oublie ça », lance avec humour le passionné d’astronomie.

La courte période d’obscurité profonde en juin n’a pas favorisé les observations, mais ici, rien de nouveau sous le soleil… ou la lune. « On n’y pense pas toujours, mais le mois de juin n’est vraiment pas idéal pour l’observation sur la Côte-Nord. À 22 h 30, il fait encore clair, et à 2 h du matin, il fait déjà clair. Normalement, à partir de mi-juillet, c’est intéressant surtout pour le grand public quand les gens arrivent avec de petits enfants », explique M. Bénichou.

Mais juillet, comme août, n’aura guère rempli leurs promesses, la faute, entre autres, aux précipitations quasi quotidiennes. 

Une partie des équipements du Parc Nature de Pointe-aux-Outardes. Courtoisie

« On a commencé aux alentours du 15 juillet et ce n’était pas si pire, mais le temps était très très souvent couvert », précise-t-il. Normalement, l’activité d’observation débute vers 21 h. « On accueille surtout les campeurs sur le site, mais la population peut venir aussi. On débute par une animation sur le ciel durant un petit 20 ou 30 minutes. Ça laisse le temps à la noirceur de s’installer et on prépare les gens à observer en donnant de l’information sur quoi regarder, par exemple. S’il ne fait pas beau, on a un plan B. »

Ce plan B implique davantage d’interprétation à l’aide d’un planétarium numérique sur grand écran et d’autres animations qui laissent entrevoir la vastitude de l’univers.

La nébuleuse du Lagon. Courtoisie Benoît De Mulder

« On sait qu’on est petit dans l’univers, mais on ne sait pas à quel point ! On est largement plus petit qu’un grain de poussière ! Les enfants aiment bien savoir que notre soleil est perdu parmi 500 milliards de galaxies, les adultes, un peu moins… Ils se sentent parfois mal à l’aise », rigole Frédéric Bénichou qui aura dû avoir recours à ce plan B beaucoup trop souvent à son goût cet été. Une rare éclaircie a toutefois permis un heureux tête-à-tête avec les perséides, dans la nuit du 12 au 13 août.

Les animations au Parc nature sont terminées pour la saison, mais on peut suivre les activités du Club astronomique sur les réseaux sociaux.

La mode des « super lunes »

Cet été plus que jamais, les « super lunes » ont fait la manchette. Sont-elles plus « super » qu’à l’habitude ? Nous avons demandé au spécialiste Frédéric Bénichou de répondre à cette question « spatiale ».

« C’est un peu du sensationnalisme ! La lune tourne autour de la terre selon une orbite légèrement elliptique, pas parfaitement égale et, à certains moments, elle est un peu plus proche de la Terre. À l’œil nu, la lune, c’est le diamètre de votre pouce. Quand c’est une super lune, ça va légèrement dépasser le pouce, mais c’est subtil… »

Lune des Esturgeons, des moissons, des fraises… Les “super lunes” sont à la mode! Photo Istock

Il attribue tout le bruit autour des super lunes à un « effet de mode ». « C’est une mode astronomique et c’est tant mieux ! La lune qui se lève sur le fleuve, c’est beau ! Sur la Côte-Nord, on a de la chance, c’est vraiment impressionnant ! »

La lune, pourtant, n’est pas une favorite des astronomes amateurs. « Quand on fait de l’astronomie, une pleine lune est comme un soleil au zénith ! On ne voit plus rien. Mais c’est le moment où les gens lèvent les yeux vers le ciel. La lune fascine ! Toute l’histoire de l’humanité a été modifiée par la lune, toutes les civilisations ont des légendes avec elle », conclut Frédéric Bénichou.

Le buzz astro de 2024

Frédéric Bénichou, comme des milliers d’astronomes de sa trempe, a marqué d’une croix la date du 8 avril 2024. L’enseignant a d’ailleurs depuis près de 2 ans indiqué à son employeur qu’il prendrait 2 jours de congé à ce moment. La raison? Une rare éclipse totale de soleil, un phénomène bonbon pour les amateurs d’astronomie!

« Une éclipse totale de soleil, vous n’en avez jamais vu… La prochaine sera dans des centaines d’années. J’en ai vu une en Europe en 1999 et j’ai encore la chair de poule… La luminosité est exceptionnelle, c’est comme si le soleil ne brûlait plus! Comme si on mettait une ampoule de 20 watts au lieu d’une 100 watts! Les étoiles sortent en plein jour, on voit un disque noir dans le ciel entouré de blanc… », s’emballe M. Bénichou.

Le silence risque d’étonner. « Il n’y a plus un son, les animaux sont partis dormir, les oiseaux ne chantent plus… ça dure quelques minutes, mais c’est impressionnant! »

Sur la Côte-Nord, environ 95% du soleil sera bouché, assez pour faire frémir d’excitation les Frédéric Bénichou de ce monde!

Partager cet article