Baie-Comeau : un juge touché par le courage d’une victime de violence conjugale 

Par Anne-Sophie Paquet-T. 11:42 AM - 4 mars 2024
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La sentence de l’accusé Jean-François Boucher a été prononcée par le tribunal vendredi matin au palais de justice de Baie-Comeau. Photo Anne-Sophie Paquet-T

« Depuis le 16 novembre 2023, plus rien n’est pareil et plus rien ne sera jamais pareil, j’ai tellement eu peur […], je n’ai jamais vu autant de rage dans un être humain », a lu Nadia Martel à son bourreau, Jean-François Boucher devant la Cour. 

La victime qui a vécu sept ans avec son ex-conjoint a livré un poignant témoignage en revenant sur les évènements et sur les conséquences de ceux-ci. Yeux larmoyants pour plus d’un, Mme Martel est restée inattaquable en gardant ses yeux plongés dans ceux de l’accusé. 

« Jusqu’à la dernière minute, j’ai essayé de t’aider, mon Dieu que j’ai voulu t’aider », lui a-t-elle déclaré. « Cette fois-ci, j’ai choisi de me choisir […], je suis bouleversée », poursuit-elle. « Je suis fière de moi », lui rappelle-t-elle. 

Celle qui avait déjà subi de la violence conjugale par M. Boucher dit avoir appliqué ce qu’elle a appris par ses intervenantes psychosociales qui lui sont venues en aide.

« Jean-François, je ne suis plus ta victime, je ne le serai plus jamais et je ne serai plus jamais la victime de personne d’autre », lui avait-elle dit avant le sombre soir du 16 novembre 2023 dans sa résidence des Bergeronnes. Malgré son choc post-traumatique, elle lui a répété dans sa déclaration. 

« Je te regarde dans les yeux et je ne t’en veux pas, je me sens libéré de ton emprise et ça fait du bien », lui a-t-elle lancé avant de conclure « j’ai appris que moi aussi je le mérite », faisant référence à un sentiment de paix.  

Le juge François Boisjoli a salué le courage de Mme Martel après sa déclaration. « On a rarement l’occasion de bénéficier d’explications avec tant d’éloquence et de sentiments sur les conséquences de la violence conjugale », a-t-il souligné. « Je vous remercie du courage que vous avez eu », ajoute-t-il lui exprimant être agréablement surpris de la façon dont elle réussit à se relever de ce drame. 

Personne ne devrait avoir peur de mettre fin à une relation

-Juge François Boisjoli

La sentence 

« Avec les antécédents de monsieur, on peut clairement percevoir l’escalade dans la gravité de la violence […] », à plaider la Couronne avant l’annonce de la sentence. Il a rappelé au juge que Mme Martel avait une crainte « sans équivoque » qu’il y aurait pu avoir des morts si l’intervention rapide d’un policier n’avait pas eu lieu.

Le récidiviste en matière de violence conjugale Jean-François Boucher, 41 ans a reçu une peine d’emprisonnement de 32 mois, soit la suggestion commune entre le procureur de la Couronne Me Marc-Antoine Dufour et de son avocat Me Matthieu Métivier. Celui qui a plaidé coupable à neuf chefs d’accusation le 1er mars 2024 dont voies de fait armées, voies de fait avec lésions et séquestration passera 26 mois et 21 jours derrière les barreaux d’une prison fédérale puisqu’il a déjà 161 jours de détention préventive. 

Lorsque L’Honnorable François Boisjoli a demandé à l’accusé avait quelque chose à ajouté, celui-ci a laissé tomber un, « je suis vraiment désolé de ce qui est arrivé » en pleurant. L’accusé a été bref en ajoutant « je vais travailler sur moi (…) et je n’en veux aucunement aux victimes », ce qui a fait réagir le juge Boisjoli lui rappelant « j’espère, c’est la moindre des choses monsieur ».

« Monsieur Boucher, j’éprouve très peu de sentiments pour les larmes que vous versez parce que vous avez fait preuve le 16 novembre 2023 de lâcheté, vous avez été méprisant […] », lui a-t-il dit. Le juge Boisjoli a conclu qu’il lui souhaitait de profiter de cette peine d’emprisonnement afin d’y ressortir avec des enseignements « pour que plus personne revivre ce que madame a vécu ». 

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