Côte-Nord : 20 patients transférés, dont 4 bébés

Par Karianne Nepton-Philippe 12:15 PM - 3 juin 2024 Initiative de journalisme local
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Dr Youssef Ezahr, président du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de la Côte-Nord. Photo courtoisie

Depuis le 19 mai, ce sont pas moins de 20 patients qui ont été transférés de Baie-Comeau vers l’extérieur en raison des ruptures et fermetures de services dans les centres de santé, informe Dr Youssef Ezahr, président du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de la Côte-Nord. 

Cela inclut les cas pédiatriques. « Je n’ai pas encore les données Sept-Îles. Ça bouge beaucoup, car souvent quand les patients ont une petite particularité d’un spécialiste qu’on n’a pas sur la Côte-Nord, on va le transférer », précise Dr Ezahr.

Les capacités au niveau de l’urgence sont actuellement coupées de moitié, ce qui augmente le risque de transfert. 

« Avec l’été et les vacances, il pourra y avoir des fermetures d’urgence et des risques de rupture un peu partout. À Sept-Îles aussi, du côté du CME, le centre mère-enfant », ajoute celui qui constate un épuisement chez le personnel. « Le moral est à terre. Les gens sont anxieux. »

Quatre bébés

« Au dernier compte, il y en avait autour de quatre enfants qui ont été transférés à l’extérieur de Baie-Comeau », mentionne Dr Youssef Ezahr. 

C’est le genre de situation qui avait été anticipée par le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de la Côte-Nord. 

« J’ai dit que la fermeture de la pouponnière et de la pédiatrie vont amener des détresses familiales. Et il faut savoir qu’il y a beaucoup de résilience du côté de la population. Les parents, quand ils rentrent à l’hôpital, il y a une conscience d’être possiblement transférés », soutient Dr Ezahr.

Cependant, dans la grande majorité des cas, les soins auraient bien pu se donner à Baie-Comeau, déplore-t-il. « Ce sont des soins qu’on aurait pu leur donner ici, à Baie-Comeau, auprès de leur famille. »

« Les Nord-Côtiers sont habitués d’avoir cette résilience-là, mais je crois qu’en 2024, il ne faut plus accepter ce genre de situation », dénonce ce dernier. 

Équipe volante

Le néant. C’est ainsi que Dr Youssef Ezahr décrit la situation du côté de l’équipe volante, solution amenée par le gouvernement. 

« En réalité, l’équipe volante n’existe pas pour l’instant. Oui, il y a eu un début d’embauche, d’appel de poste, mais est-ce qu’il y en aura assez pour fournir ? Nous, on a minimum besoin de 500 infirmières et préposés. Je ne pense pas qu’on pourra avoir le minimum avec une équipe volante », affirme-t-il. 

« On essaie de nous dire qu’avec l’équipe volante, la situation est réglée, poursuit-il. L’idée de l’équipe volante est bonne, mais c’est un pansement et non un traitement qui est permanent. »

Notons que la date du 20 juin a été avancée en ce qui a trait à l’arrivée des membres de l’équipe volante dans les régions qui en ont besoin, dont la Côte-Nord.

Recrutement

Une proposition au sujet du recrutement a été soumise au coordonnateur de première ligne, Michel Delamarre, rencontré vendredi dernier par le Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens de la Côte-Nord. 

« On lui a demandé d’établir des incitatifs pour faire le recrutement et la rétention localement. […] C’est censé avoir été apporté au premier ministre, mais on n’a pas eu de retour. On a eu une rencontre avec quelqu’un du cabinet ministériel, mais sinon plus rien », informe Dr Youssef Ezahr. 

« Ce genre de crise fait parfois un wake-up call auprès du ministère et je l’espère. Vous savez, c’est aussi important de prendre soin des soignants », conclut-il. 

Manque de soutien du politique

Dr Youssef Ezahr déplore le manque de soutien de la classe politique. « La direction générale est laissée à elle-même. On leur promet une équipe volante qui a beaucoup de points d’interrogation », lance-t-il d’entrée de jeu. 

Les seules informations proviennent du compte du ministre de la Santé sur le réseau social X, se désole-t-il. « Ce n’est pas par Twitter ou Facebook que vous allez diminuer la grogne », décrit-il. 

Alors qu’il fallait s’attendre à vive une crise, Dr Youssef Ezahr soulève : « On l’avait mentionné au ministre et à nos députés locaux, mais personne n’est venu après nous rencontrer. »

« D’une certaine façon, on a été trahi par nos députés. Ils ne sont pas venus nous voir. Ils n’ont pas rencontré les médecins sur la Côte-Nord, aucune équipe soignante ni syndicat », ajoute ce dernier. 

Conscient que dans la gestion d’une crise, il y a beaucoup à faire et que dans les plans, il peut y avoir des erreurs, Dr Ezahr croit toutefois que les députés et le ministre devraient offrir plus de soutien au personnel du milieu de la santé sur la Côte-Nord. 

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