Spotted : Quand une bonne idée dérape

24 avril 2013
Temps de lecture :

Baie-Comeau – En seulement quelques mois, les pages «Spotted» ont gagné la Côte-Nord. Apparu en début d’année en Europe, ce phénomène consiste en l’utilisation anonyme de pages Facebook afin de publier des messages de drague dans lesquels la personne visée pourrait s’identifier. Une simple visite sur ces pages démontre cependant que les dérapages sont fréquents.

Marlène Joseph-Blais

«À toi, demoiselle blonde en sec. 5, tu me connais mais tu ne sais pas que tu m'intéresses beaucoup… Malheureusement je ne sais comment te révéler mes sentiments… Un jour peut-être!», peut-on lire sur la page Facebook intitulée «Spotted: Baie-Comeau», qui compte près de 900 adeptes. Voici le type de messages qui justifiaient à la base l’émergence du phénomène, se voulant une façon de permettre aux gens plus timides de dévoiler leur attirance pour quelqu’un.

La façon de faire est plutôt simple. Les usagers peuvent envoyer un message privé aux administrateurs de ces pages, qui les opèrent de façon anonyme, afin qu’il soit publié sans qu’on y accole son nom. Ainsi, il est impossible pour un utilisateur de savoir qui opère ces pages. Les adeptes de la page ne sont pas non plus en mesure de savoir qui a fait parvenir chacun des messages aux administrateurs. Une fois les mots inscrits sur Facebook, les adeptes de l’une de ces pages peuvent les lire, les commenter et cliquer sur «J’aime», le tout avec leurs noms et prénoms réels. Plusieurs d’entre eux identifient leurs connaissances sous certains messages lorsqu’ils croient qu’on parle d’eux.

Les publications flatteuses et délicates ont toutefois fait place à des messages parfois méchants, voire même violents. Le langage utilisé est souvent vulgaire et traduit dans un vocabulaire approximatif. On y retrouve de nombreuses publications à caractère sexuel, des moqueries et même des menaces. Si certaines d’entre elles sont teintées d’humour, d’autres suscitent le dégoût et la frustration chez les personnes abonnées à ces pages.

Écoles et cégep

À Baie-Comeau, en plus de la page «Spotted» portant sur la ville en général, on en retrouve une pour le cégep ainsi que pour chacune des écoles secondaires publiques, lesquelles sont toutes suivies par des centaines de personnes. Autant à la Commission scolaire de l’Estuaire (CSE) qu’au cégep de Baie-Comeau, on connaît le phénomène et on le surveille de près. «Les directions des écoles sont au courant. Il y a une surveillance qui se fait et, s’il se passe quelque chose, il y aura des interventions», indique l’agente aux communications à la CSE, Patricia Lavoie.

Au cégep, l’administration avait tenté de faire supprimer une telle page au cours des derniers mois, sans succès en raison du fait qu’il était impossible d’identifier qui l’opérait. Elle s’est finalement fermée d’elle-même, mais une nouvelle page «Spotted Cégep de B-C» a vu le jour le 13 avril. «On sait qu’il faut surveiller ça parce qu’on est un petit milieu et on veut s’assurer qu’il n’y a pas de dérapages. C’est certain que nous, on n’endosse pas ça, l’institution tient à se détacher de ces pages», assure la responsable des communications au cégep, Isabelle Savard.

Noémie Pouliot-Maloney fréquente l’école des adultes. Depuis quelques semaines, elle est bien au fait du phénomène puisqu’elle visite régulièrement les pages destinées à la clientèle des écoles et aux résidents de Baie-Comeau. «C’est un bon concept au départ, mais finalement, il y a des choses méchantes qui se disent. Je n’ai vraiment aucune idée de qui est derrière ça», dit-elle. De son côté, Olivier Arseneault, élève de l’école secondaire Serge-Bouchard, a lui-même été «spotté», alors qu’un commentaire a été émis au sujet de son habillement. «Moi, ça va, je suis capable d’en rire, mais il y a des affaires qui sont vraiment moins drôles. Ça commence à mal tourner», a-t-il admis.

 

Photo : Tirée de Facebook