Baie-Comeau – Pour une première fois, l’artiste en art visuel Richard Ferron dévoilait son travail sur les empreintes corporelles, une exposition intitulée Chair-Mémoire comprenant trois parties d’une démarche de longue haleine, qui exigeait de l’art sur soi, sur l’autre et sur les autres.
Julie-Andrée Verville
À l’occasion d’un vernissage qui se déroulait le 28 août au 27, place La Salle, Richard Ferron, a pu expliquer l’envergure de l’œuvre qu’il a amorcée à l’aube des années 2000. Composée de photogrammes et d’impressions numériques de grands formats, l’exposition montre différentes parties du corps humain. Le procédé consiste à enduire une poudre de fusain sur les membres du corps choisis par l’artiste ou proposés par les sujets. La suie est ensuite déposée sur une pellicule adhésive, appliquée sur un plexiglass. Cet objet devient alors le négatif qui sera transféré sur le papier photo, créant ainsi le photogramme.
Ni blanc ni noir, chaque exemplaire, produit sans appareil-photo, crée des jeux d’ombre et de lumière, qui rappellent les grains du bois. Bouches, oreilles, poings, doigts, pieds, bras et torse, pour ne nommer que ces parties de l’anatomie, sont présentés seuls ou juxtaposés pour créer d’autres formes et parfois des fresques de plusieurs dizaines de fragments.
Pourquoi s’intéresser au corps? L’artiste répond à cette question en partageant son vécu. «J’ai accompagné ma mère jusqu’à la toute fin. J’étais seul avec elle lors de son décès et cette expérience par rapport à la mort et au corps m’a questionné sur qui on est, d’où on vient, où on s’en va et, surtout, sur qui je suis. Finalement, je suis le fragment de mon père et de ma mère, mais également un tout. J’ai commencé à travailler sur moi, ensuite sur l’autre, puis sur les autres, la collectivité, en jouant sur cette bivalence du fragment et du tout», précise M. Ferron.
Pour commencer son projet, en 2002, Richard Ferron a d’abord produit plusieurs impressions en utilisant les parties de son propre corps. Cette étape constituait la première phase du projet, soit l’art sur soi. En 2006, les prochaines œuvres se sont inspirées d’autrui, alors qu’il utilisait le corps de sujets en particulier. Cette démarche l’a conduit, quelque temps plus tard, à se consacrer à la collectivité de Baie-Comeau. Plus de 300 personnes ont offert leur corps à l’art. Réunies, ces trois parties du puzzle créent une œuvre collective, qui permet à M. Ferron de faire ce qu’il aime le plus, de l’art en lien avec les gens.
La relation par l’art
Quand il travaille, cet artiste en art visuel accorde une grande importance à l’art relationnel, ayant toujours en tête d’encourager les autres à user de créativité dans leur propre vie. «L’idée est que l’artiste entre en contact avec le public de façon directe. Quand j’ai réalisé une mosaïque à Baie-Trinité, j’ai demandé aux gens de me donner leurs matériaux. Ils ont aimé de pouvoir me parler et avoir ce contact. C’est différent de l’artiste qui crée en atelier. Je peux inciter les gens à mettre de la créativité dans leur quotidien, leur montrer que tout le monde peut s’exprimer à sa façon», souligne-t-il.
Dans Chair-Mémoire, la relation avec le public est prédominante, surtout dans la dernière portion de la création. Pour produire les photogrammes qu’il expose, Richard Ferron travaille en lien étroit avec des personnes. «En fait, on me donne une empreinte. J’en fais une œuvre et la personne qui m’a fourni cette empreinte devient elle-même une œuvre d’art. Elle me donne une partie d’elle», précise ce dernier.
Même si c’est le corps que l’on voit en premier, en contemplant Chair-Mémoire, les interprétations sont multiples lors du second regard. Quand il s’attarde, l’observateur peut voir autre chose : une flèche, un animal, le cosmos ou la molécule d’ADN. La créativité peut s’exprimer sous toutes ses formes.
Photo : Le Manic
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