Nouvelle tuile pour l’industrie du papier journal – « On ne se laissera pas abattre et on va se défendre » – Karl Blackburn

Par Charlotte Paquet 17 janvier 2018
Temps de lecture :
Karl Blackburn estime à 22 M$ l’impact de ces nouveaux droits compensatoires pour les usines de Produits forestiers Résolu au Québec. Photo archives Le Manic

Karl Blackburn estime à 22 M$ l’impact de ces nouveaux droits compensatoires pour les usines de Produits forestiers Résolu au Québec. Photo archives Le Manic

Baie-Comeau – « On n’a pas le choix. On ne se laissera pas abattre et on va se défendre », martèle le porte-parole de Produits forestiers Résolu (PFR), Karl Blackburn, face aux nouveaux droits compensatoires imposés par le département américain du Commerce sur les importations canadiennes de papier journal et d’autres types de papier non couché.

On se souviendra que la décision a été confirmée le 9 janvier. Après le bois d’œuvre et le papier surcalendré, voilà que PFR et les autres entreprises canadiennes font face à un nouveau coup de semonce des États-Unis lié à des allégations de dumping de leur production à un prix inférieur au marché et à des subventions gouvernementales dont elles bénéficieraient.

Pour l’industriel forestier, les nouveaux droits compensatoires à l’exportation en sol américain se situent à 4,42 %. Sur une base annuelle, cela représentera 22 M$ en taxes versés aux États-Unis, qui demeurent son principal marché. Même si une proportion de sa production est aussi destinée à des clients américains, l’usine de Baie-Comeau dessert aussi des marchés en Europe, en Asie et en Amérique du Sud grâce à la proximité de son port de mer.

Ces nouveaux droits compensatoires viennent s’ajouter à ceux déjà exigés pour le bois d’œuvre et pour le papier surcalendré. D’ici à la fin de 2018, une somme totale de 237 M$ en taxes sera ainsi versée par Résolu aux Américains.

Rappel des faits
Rappelons que cette décision fait suite à une plainte déposée par la North Pacific Paper Company (Norpac), une usine qui emploie environ 260 travailleurs dans l’État de Washington. « La plainte de Norpac est totalement injuste et injustifiée et vise juste à nuire à leurs compétiteurs canadiens », affirme M. Blackburn.

Selon ce dernier, l’entreprise américaine espère probablement se donner ainsi « une dernière arme pour sortir la tête de l’eau », elle qui semble faire face à des difficultés importantes après les sacrifices demandés à ses employés en mai dernier et la fermeture d’une machine à papier trois mois plus tard.
Il n’y a pas que les entreprises canadiennes qui rejettent les prétentions de Norpac. Comme le souligne le porte-parole, une coalition d’entreprises représentant 600 000 emplois aux États-Unis a été mise sur pied au cours des derniers mois afin de faire pression sur le département du Commerce afin qu’il ne tienne pas compte de la plainte.

Cette coalition est d’ailleurs sortie publiquement en décembre pour exprimer ses craintes face à une éventuelle augmentation du prix du papier journal. Comme le souligne Karl Blackburn, ses membres craignent que cela vienne accélérer le transfert des médias traditionnels vers les médias numériques.

Chez Unifor
Au sein du syndicat Unifor, qui représente les travailleurs des usines de papier journal de produits forestiers Résolu, de Kruger et de White Birch, l’annonce de cette nouvelle tuile sur une industrie déjà fragilisée par la baisse de la demande est dénoncée.

Par la voix de son président Renaud Gagné, Unifor dit comprendre mal qu’une telle décision majeure puisse découler d’une seule plainte. Dans un communiqué, M. Gagné rappelle d’ailleurs que « 34 membres de la Chambre des représentants ont interpellé le secrétaire au commerce américain, Wilbur Ross, afin de l’aviser que la vision de Norpac ne correspondait pas à celle de l’ensemble de l’industrie du papier aux États-Unis ».

Les élus dénoncent
Le maire de Baie-Comeau, Yves Montigny, et le préfet de la MRC de Manicouagan, Marcel Furlong, dénoncent aussi l’imposition de ces nouveaux droits compensatoires et réclament l’intervention d’Ottawa.
« Nous invitons le gouvernement fédéral à intervenir afin de soutenir les entreprises de la Manicouagan, notre communauté en plus de l’ensemble des entreprises des autres communautés forestières affectées par ce nouveau conflit commercial », a lancé M. Furlong.

M. Montigny rappelle que l’usine de Baie-Comeau fait surtout affaire avec des clients outre-mer, ce qui diminue l’impact de la décision des États-Unis. Par contre, lui et M. Furlong se disent solidaires avec l’ensemble des élus du Québec.

Fait à noter, le dossier de ces nouvelles taxes à l’exportation a été abordé, en urgence, vendredi matin lors d’une conférence téléphonique des membres du Comité sur la forêt de l’Union des municipalités du Québec, qui réunit les maires et mairesses des principales régions forestières.

Le sujet sera aussi à l’ordre du jour de la prochaine rencontre des membres du comité, le 1er février, à Lévis.

Partager cet article