La Disquerie 33/45 ferme ses portes

Par Steeve Paradis 7:00 AM - 12 août 2019
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L’heure est venue pour Ervin Di Piazza de mettre fin à l’aventure de la Disquerie 33/45. Le commerce fermera définitivement ses portes d’ici la fin août. Photo Le Manic

Baie-Comeau – À la fin août, peut-être un peu avant, un commerce qu’on peut qualifier d’institution fermera ses portes à Baie-Comeau. Ce sera la fin des émissions pour la Disquerie 33/45. Le dernier commerce spécialisé en musique de la localité mettra ainsi définitivement la clé dans la serrure.

Propriétaire du commerce depuis le début, Ervin Di Piazza ne verse pas trop dans la nostalgie, quelques jours avant de tourner la page sur une aventure qui s’est amorcée en 1981. En fait, ce sont les clients qui versent une larme.

«  Quand j’ai annoncé ça (la fermeture), je n’avais jamais prévu que les gens seraient aussi nostalgiques. Ils viennent au magasin et il faut pratiquement que je les console! », a lancé M. Di Piazza avec un sourire en coin.

« Les astres se sont alignés pour ça », a ajouté le disquaire pour expliquer sa décision. Personne ne tombera en bas de sa chaise en lisant que la vente de disques a périclité au cours des dernières années et que l’écoute musicale a considérablement changé depuis le début des années 80, où la cassette 8 pistes tenait encore le haut du pavé.

« Il y a beaucoup de choses qui font en sorte que le disque se vend moins. Avant, il n’y avait pas de PlayStation, de cellulaire, d’Internet ou de films en continu. Le temps de loisir était plus consacré à l’écoute de la musique, lance-t-il. Si t’écoutes un film de deux heures, ça fait deux heures de moins à écouter de la musique. »

Spotify change la donne

Les habitudes de consommation se sont aussi grandement modifiées. « Quand tu t’abonnes à 10 $ par mois à un service comme Spotify et que tu as accès à un catalogue mondial… », a fait valoir Ervin Di Piazza sans compléter sa phrase. « Aujourd’hui, les gens consomment de la musique. Avant, ils l’écoutaient. »

Le disquaire met aussi en lumière le fait que le geste d’écouter de la musique a lui aussi changé. Les 50 ans et plus se remémoreront sûrement le rituel qu’il évoque.

« Avant, on se réunissait dans le sous-sol chez quelqu’un, on apportait nos disques vinyle et on jouait à des jeux de société ou on écoutait la musique, tout simplement. Maintenant, c’est un geste individuel. On ne fait plus ça en gang », soutient celui qui dit apprécier tous les styles musicaux. « Il n’y a pas de mauvaise musique, il n’y a que des mauvaises oreilles », clame-t-il.

Un peu d’histoire

La Disquerie 33/45 a ouvert ses portes le 22 mai 1981, sur la rue De Puyjalon. Dix ans plus tard, soit le 1er juin 1991, il déménageait ses pénates à son emplacement actuel aux Galeries Baie-Comeau.

D’aussi loin qu’il se souvienne, Ervin Di Piazza a toujours voulu baigner dans cet environnement. « En secondaire 3, je disais déjà que je voulais avoir un magasin de disques. Avant d’ouvrir la Disquerie, j’ai passé quatre ans chez Sherman à Place Laurier, à Québec. Le gars qui m’a essayé a rapidement vu que j’étais un passionné. »

Au fil des ans, l’homme d’affaires a fait son petit bonhomme de chemin dans cet univers, refusant de s’allier à une bannière, qui ont pullulé à une certaine époque. « J’ai toujours voulu être indépendant. Si j’avais été avec une chaîne, je n’aurais pas pu me tourner vers les vêtements », a-t-il souligné.

La vague hip hop a en effet amené la Disquerie 33/45 à offrir une ligne de vêtements associés à ce style. « J’ai réussi à me diversifier avec les vêtements de marque mais là aussi, les choses sont devenues plus difficiles. Tu serais surpris de voir à quel point il y a des gens qui viennent ici pour essayer les vêtements et qui repartent ensuite chez eux pour les commander sur Internet », balance-t-il au représentant du Manic.

Mais ne comptez pas sur Ervin Di Piazza pour sombrer dans l’amertume. Il a bien été approché pour vendre son commerce il y a quelques années, mais les choses ne sont pas allées plus loin. À 65 ans, l’heure est venue de prendre une retraite bien méritée.

En terminant, le disquaire tient particulièrement à souligner l’engagement de deux de ses fidèles employées, soit Sylvie Bard, en poste durant 11 ans, et Nancy Méthot, qui aura passé rien de moins que 27 ans à ses côtés. « J’ai vraiment eu des employés extraordinaires », a-t-il conclu.

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