Une forêt figée dans le réservoir Manicouagan

Par Charlotte Paquet 3:00 PM - 5 octobre 2021
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L’exploratrice et cinéaste Nathalie Lasselin a pu observer des arbres debout et d’autres couchés, mais sans leurs feuilles ou leurs épines. Photo Nathalie Lasselin

Les profondeurs du réservoir Manicouagan ont livré des secrets à l’exploratrice et cinéaste sous-marin Nathalie Lasselin au cours de l’été. Grâce à 20 plongées effectuées en deux expéditions, elle peut aujourd’hui témoigner de la face méconnue de l’un des endroits au monde les plus photographiés à partir de l’espace, également appelé l’œil du Québec

L’exploratrice l’avoue : le réservoir Manicouagan l’a toujours intriguée par le fait que le site s’agit d’abord du quatrième plus gros cratère d’impact au monde, créé par la chute d’une météorite voilà plus de 214 millions d’années.

« On a plusieurs images prises de l’espace, mais pas sous la surface. Mon travail, c’est d’aller dans ces endroits-là et de les documenter avec des images pour pouvoir partager de nouvelles informations avec un large public. Quand personne n’a rapporté d’images de ces endroits-là, ça devient mon terrain de jeux », illustre la cinéaste.

Sa soif d’informations pour la production d’un documentaire n’a pas été complètement étanchée en août et en septembre. Elle compte donc y retourner avec sa caméra en 2022, vers la fin du printemps ou le début de l’été, pour plonger cette fois-ci jusqu’à 300 à 400 pieds de profondeur, plutôt que les 150 pieds de cette année.

Une forêt figée

« Au début, quand on plonge, l’eau est noire comme du café amer. On descend, on est dans le noir et subitement, ça apparaît devant nous », raconte Nathalie Lasselin, en faisant référence à des arbres encore debout, et d’autres couchés, un peu comme en forêt, mais sans leurs feuilles ou leurs épines.

Au départ, dit-elle, l’environnement qu’elle a découvert aurait pu effrayer plus d’une personne par son côté très lugubre. Mais en même temps, la cinéaste dit y avoir perçu un côté poétique. « C’est un paysage arrêté dans le temps, où les arbres ont arrêté de pousser. On ne sait pas, peut-être que dans 1000 ans, cette forêt sera encore là. »

Parmi les nombreuses observations faites d’une plongée à une autre, la cinéaste note l’absence de processus de décomposition dans l’eau. Elle parle aussi de la surprenante rareté de poissons.

« Ce qui m’a surpris, y compris en faible profondeur, c’était extrêmement rare de croiser un poisson », souligne-t-elle en indiquant en avoir aperçu deux seulement en 20 plongées.

Du repérage

L’expédition du mois d’août a permis en quelque sorte de faire du repérage. « Pour débroussailler un peu le terrain, car on n’avait vraiment pas d’information sur la visibilité », dit celle qui a réalisé son projet en compagnie d’un autre plongeur responsable de l’éclairage et d’un capitaine d’embarcation.

En septembre, Nathalie Lasselin est retournée dans le réservoir, cette fois-ci en compagnie d’une équipe multidisciplinaire d’artistes réunis avec Le projet Manicouagan, du Français Paul Duncombe. Elle en a ramené de nouvelles images.

Depuis le début octobre, la cinéaste, qui fait de l’exploration sous-marine depuis plus d’une vingtaine d’années, présente des conférences sur ses découvertes dans le réservoir Manicouagan. Souvent, ce sont les écoles, les bibliothèques municipales et les organismes qui font appel à ses services.

Son documentaire sur l’exploration du réservoir Manicouagan devrait sortir en 2023. À ce jour, elle a produit et réalisé 10 documentaires sous-marins à partir d’expéditions réalisées un peu partout dans le monde. La goutte de trop, de Jérémie Battaglia, qui raconte son odyssée sous-marine effectuée à Montréal en 2018, sera présentée à Télé-Québec le 13 octobre.

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