Les ambulanciers veulent être reconnus à leur juste valeur

Par Johannie Gaudreault 11:30 AM - 3 mai 2023
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Les ambulanciers de la Haute-Côte-Nord et de Baie-Comeau veulent être entendus.

La Côte-Nord prend la tête du classement des régions ayant enregistré le plus de démissions de techniciens ambulanciers paramédics au cours des 20 derniers mois avec un total de 18 départs volontaires. Pas de quoi être fiers diront certains, mais pour le syndicat qui les représente, c’est une bonne raison pour déclencher une grève illimitée.

« Ce sont des gens qui ont quitté pour la plupart pour aller travailler dans des entreprises privées dans d’autres secteurs d’activité. On a l’exemple d’Alcoa. On a beaucoup de gens qui sont partis travailler pour cette compagnie parce qu’ils avaient un salaire avantageux, des conditions de travail avec des horaires fixes, des congés, des fins de semaine de congé, une conciliation travail-famille plus facile à faire », commente d’entrée de jeu le président de la Fédération des employés du préhospitalier du Québec (FPHQ), Daniel Chouinard. 

Le milieu préhospitalier perd de plus en plus de plumes depuis les dernières années. La pénurie de main-d’œuvre entraîne d’ailleurs de hauts taux de découverture ambulancière dans la région. 

« Dans le réseau préhospitalier, c’est pratiquement impossible d’avoir ce genre de conditions de travail. Les gens se font annuler ou reporter leurs vacances. Ils ne peuvent pas prendre les fériés, ils sont toujours en temps supplémentaire. C’est un peu les mêmes problématiques que les infirmières vivent dans les centres hospitaliers » compare M. Chouinard. 

Négociations sans avancement

En négociations depuis janvier 2022 avec le gouvernement et les employeurs, les ambulanciers affiliés à la  (FPHQ) en Haute-Côte-Nord et à Baie-Comeau sont à bout de souffle. Aucun avancement ne s’est produit depuis le début des pourparlers. 

« La partie patronale nous revient avec des choses qu’on ne demande pas. Il n’y a pas d’écoute sur les demandes que l’on fait. Tout ce qu’on nous rétorque, c’est l’entente qui eu lieu avec la CSN à Montréal et Laval, alors que nos paramédics ne vivent pas la réalité de Montréal et Laval. La prime urbaine, ça ne touche pas personne à part Montréal et Laval », soutient le président de la FPHQ. 

L’entente qui a été conclue avec la CSN ne concorde donc pas avec les intérêts des ambulanciers des autres régions, selon lui. Les employés de Sept-Îles et Havre-St-Pierre ne sont pas touchés par la grève puisqu’ils sont représentés par la CSN. « Leur convention collective est échue depuis le 31 mars qui vient de passer. Éventuellement, eux aussi, ils vont tomber en négociations dans la prochaine année », précise M. Chouinard. 

Des décennies avec les mêmes irritants

Quand il se penche sur la situation du milieu préhospitalier qui vit de nombreuses difficultés, le président de la FPHQ déplore que les mêmes irritants persistent depuis des décennies. « On les traîne de convention en convention, ajoute-t-il. On a de la difficulté à faire reconnaître la profession au niveau du gouvernement. »

Toutefois, les paramédics ont été sollicités à de nombreuses reprises « pour en faire plus ». « À ce moment-là, on fait partie du réseau. Mais quand c’est le temps de bonifier les conditions de travail, on ne fait pas partie du réseau. Ce sont les employeurs privés qui doivent régler ça », témoigne Daniel Chouinard qui spécifie que les entreprises ambulancières se font dire non par le ministère. 

Rappelons que le ministère de la Santé et des Services sociaux finance les soins ambulanciers à plus de 90 %. Le pourcentage restant est quant à lui assumé par la facturation des services ambulanciers comme les transports. 

« On est toujours dans une impasse. On veut être reconnu pareillement aux autres travailleurs de la santé du réseau, par exemple, les infirmières d’urgence. On a la même formation, soit un DEC. La tâche est différente parce qu’on travaille à l’extérieur, on a des accidentés de la route et aussi, beaucoup de soins maintenant, comme donner des médicaments et les moniteurs/défibrillateurs », souligne le représentant syndical. 

Les techniciens ambulanciers souhaitent obtenir des conditions salariales équivalentes aux autres métiers d’urgence du réseau de la santé, soit les policiers et les infirmières. « C’est un rattrapage salarial qu’on vise entre 12 et 14 % pour avoir une parité avec les travailleurs d’urgence », de faire savoir M. Chouinard.

Dénouement positif

La grève, déclenchée le 25 avril, met en place des moyens de pression sur des tâches administratives et n’affecte aucunement les services à la population puisqu’ils sont considérés comme des services essentiels. « Nos membres veulent que la profession fasse le virage auquel elle a droit », poursuit le paramédic de profession. 

Celui-ci aimerait également que les problèmes vécus par les paramédics soient autant dénoncés que ceux des centres hospitaliers.

« C’est toujours enfoui sous le tapis. Les gens n’ont pas connaissance de ça. Le ministère de la Santé, on le sait qu’il est au courant, mais il ne l’avoue pas, du bout des lèvres à tout le moins et il ne fait rien de concret pour résorber la situation », conclut Daniel Chouinard, qui ne lésinera pas sur les moyens pour faire entendre les demandes des membres qu’il représente.

 Sans être sûr qu’un dénouement positif résulte des négociations, Daniel Chouinard garde espoir et se dit « résilient ». « Nos membres sont déterminés à maintenir la grève le temps qu’il faudra », divulgue-t-il. 

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