Trou noir : la région déçue du budget fédéral

Par Steeve Paradis 1 mars 2018
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Après l’occupation des bureaux du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social Jean-Yves Duclos il y a un an (photo), la CSN et Action-chômage occupent présentement le bureau de circonscription du premier ministre Justin Trudeau. Photo archives Le Manic

Baie-Comeau – Sur la Côte-Nord, les réactions au budget fédéral à propos des mesures adoptées pour combler le trou noir de l’assurance-emploi vont toutes dans la même direction : la déception. Les principaux intervenants estiment qu’Ottawa ne règle en rien la problématique.

Ainsi, le fédéral déboursera immédiatement 10 M$ en aide au revenu et à la formation, 80 M$ durant l’année financière 2018-2019 et 150 M$ l’année suivante, le tout après entente avec les provinces concernées en ce qui concerne la formation.

« C’est vraiment insultant, ils n’ont rien compris », a été la première réaction de Line Sirois, d’Action chômage Côte-Nord, qui juge la somme de 10 M$ pour l’ensemble du pays plutôt ridicule. « Le trou noir, c’est 18 millions juste pour la Côte-Nord », a-t-elle déclaré.

« Le problème avec le trou noir, ce n’est pas que les gens manquent de formation, c’est qu’ils occupent des emplois saisonniers, a enchaîné la porte-parole. Avec ce qui est proposé, les gens ont aujourd’hui le même problème que la semaine passée, que le mois passé, que l’an passé. »

On se souviendra que Line Sirois était du groupe qui a occupé durant 36 heures le bureau de circonscription du ministre Jean-Yves Duclos, à la mi-janvier, afin que celui qui est ministre responsable de l’assurance-emploi fasse adopter des mesures d’urgence pour contrer le trou noir, dans lequel se trouve actuellement des milliers de travailleurs.

«On avait plein d’espoir après avoir rencontré le ministre, il nous avait dit qu’il avait compris nos revendications, mais aujourd’hui ça a tout l’air qu’il voulait tellement qu’on parte de son bureau qu’il nous a dit n’importe quoi», a-t-elle ajouté.

Irresponsable

Un autre qui estime que le gouvernement fait fausse route avec ces mesures est le président du conseil central Côte-Nord de la CSN, Guillaume Tremblay, qui était lui aussi de l’occupation du bureau du ministre.

« Le ministre Duclos ne peut pas plaider l’ignorance, on l’a très bien informé mais visiblement, il n’a rien compris. Il agit de façon irresponsable envers les familles victimes du trou noir », a-t-il lancé.

« Les employeurs veulent ravoir les travailleurs qu’ils ont formé, c’est normal », a poursuivi M. Tremblay, qui estime que la façon de faire actuelle « force les gens à quitter leur emploi saisonnier pour aller dans les secteurs où il y a pénurie de main-d’œuvre ».

La députée bloquiste de Manicouagan partage sensiblement le même avis.

Détruire l’industrie

« Si je prends quelqu’un qui travaille dans une usine de Baie-Trinité et je l’envoie faire de la formation à Baie-Comeau dans je ne sais quel domaine, on détruit une industrie saisonnière en envoyant des gens en dehors de leur communauté pour faire autre chose, de soutenir Marilène Gill. Ça ne règle pas la question du trou noir et ça met en péril nos entreprises saisonnières, qui ont besoin de leurs travailleurs qualifiés dans leur domaine. »

« C’est l’employeur qui a payé pour former son personnel, pas Service Canada», enchaîne pour sa part Line Sirois en rappelant que travailleur saisonnier n’est pas synonyme de travailleur non qualifié. «Un travailleur forestier, par exemple, c’est quelqu’un de très qualifié, mais son travail n’est pas à l’année.»

La députée Gill considère toutefois comme une petite victoire le fait que le budget mentionne l’expression trou noir. « C’est quand même quelque chose parce qu’il (le gouvernement) n’en parle pas habituellement. Je pense qu’on a touché une corde sensible », a-t-elle conclu.

Selon le décompte d’Action chômage Côte-Nord, on compterait autour de 6 500 travailleurs occupant des emplois saisonniers dans la région. La coalition réclame un seuil d’admissibilité à l’assurance-emploi fixé à 420 heures travaillées pour 30 semaines de prestations pour tous les travailleurs concernés de l’Est-du-Québec.

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