Les inspecteurs municipaux sont aussi la cible d’insultes

Par Charlotte Paquet 6:00 AM - 10 février 2021
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Inspecteur municipal depuis 10 ans, Érik St-Gelais rappelle que les employés des municipalités sont aussi la cible d’insultes et d’intimidation de la part de citoyens. Le cas des élus n’est pas unique, souligne-t-il en référence à des témoignages publiés dans l’édition du 27 janvier du Manic.

Si les élus sont sujets aux insultes et à l’intimidation de la part de citoyens mécontents, les employés municipaux ne sont pas en reste. Parlez-en notamment aux inspecteurs chargés de l’application de la réglementation de zonage et d’urbanisme en plus de plusieurs lois provinciales.

La série de textes concernant la violence verbale face aux élus, publiés dans l’édition du 27 janvier du Manic, a interpellé Érik St-Gelais, qui travaille comme inspecteur municipal depuis 10 ans.

Après avoir œuvré à Tadoussac et à Pointe-Lebel, il occupe un poste à temps plein pour la municipalité de Baie-Trinité depuis la mi-janvier, après y avoir travaillé depuis 2018 à raison d’une journée par semaine.

« On entend souvent parler de situation qui se sont passées dans les grandes villes, mais ça se vit aussi en région ce phénomène-là de violence physique et verbale à l’endroit d’employés municipaux », fait remarquer celui qui a vécu trois événements majeurs à ce jour. Il parle de voies de faits ainsi que de menaces de se faire casser le nez et de se faire faire la peau. À deux occasions, il a porté plainte à la police.

Et plus la municipalité est petite, plus la victime risque évidemment de croiser la personne qui l’a menacée au dépanneur ou ailleurs.

Même si de telles attaques sont rares, elles laissent des traces. « Si les menaces ne sont pas envers toi, elles sont envers la famille immédiate. Ça touche, c’est sûr. On est des êtres humains. Ça laisse des traces. On se demande s’il va vraiment mettre ses menaces à exécution », explique l’inspecteur qui, avant d’embrasser cette carrière, travaillait en génie civil sur les chantiers de construction.

Des gens fâchés

Les inspecteurs municipaux interviennent auprès des citoyens lorsqu’ils remarquent le non-respect de la réglementation, à la suite d’une plainte ou non. Ça peut être une cour malpropre, un chien qui jappe jour et nuit ou un cabanon non conforme, entre autres choses. Il y a aussi toute la question des zones à risque ou encore des zones inondables à faire respecter.

Mais les inspecteurs, poursuit Érik St-Gelais, ont aussi un rôle de conseiller auprès des propriétaires qui souhaitent réaliser des travaux de construction dans le respect de la réglementation. Il y aura toutefois des permis qui seront refusés.

« Les gens sont fâchés quand on leur refuse de quoi et, en fait, c’est normal », reconnaît l’employé municipal. Ce qui est anormal, par contre, c’est l’attitude de certains qui y vont d’insultes, de menaces avec le doigt en l’air ou même d’un objet empoigné et dirigé vers l’inspecteur, sans nécessairement être lancé. Et cela, c’est sans compter les messages violents laissés sur la boîte vocale.

« Les gens ont tendance à penser qu’on a une petite boîte sur notre bureau et qu’on tire un nom et qu’on se fait sa tête ce jour-là », illustre Érik St-Gelais.

Malgré tout, l’homme de 50 ans affirme aimer son métier. « Il faut aimer travailler avec les lois, aimer le contact avec le citoyen avoir de l’entregent et être compatissant aussi, car parfois, on rencontre des situations de détresse. Il faut être humain. »

Même pression dans les MRC

(CP) « Je le confirme, les inspecteurs municipaux font l’objet de pression », lance Jacinthe Maloney, qui évolue dans ce milieu depuis une quinzaine d’années.

Directrice du service d’urbanisme et d’aménagement du territoire à la MRC de Manicouagan depuis quelques mois, Jacinthe Maloney admet que les inspecteurs municipaux ne l’ont pas toujours facile, ce qui entraîne un bon roulement de personnel. « La plupart des métiers ont leur pour et leur contre. C’est un beau métier, mais de temps en temps, ça arrive qu’il y a de la pression et que le ton monte. »

Elle peut comprendre que des gens qui ont économisé et planifié un projet de construction puissent être déçus de se faire dire non à leur demande de permis, mais ce n’est pas une raison pour y aller d’insultes et d’intimidation.

Celle qui a déjà enseigné au programme de Techniques en aménagement et urbanisme au cégep de Matane se souvient de l’existence d’un cours sur la gestion de la clientèle difficile.

Jacinthe Maloney a aussi en tête son premier emploi en urbanisme voilà plusieurs années. Elle remplaçait alors une personne qui, à force de menaces, avait souffert du syndrome d’épuisement professionnel.

« Ce n’est pas une job pas le fun, mais c’est vrai qu’il y a une clientèle difficile. Et la pression ne vient pas toujours du citoyen », fait-elle remarquer, en indiquant que des citoyens mécontents interpellent parfois des élus. « Il y a des élus qui défendent le travail de leurs inspecteurs, mais d’autres vont tenter de faire changer la décision », confie Mme Maloney en conclusion.

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