L’aéroport de Baie-Comeau en situation précaire

Par Raphaël Hovington 10:43 AM - 11 avril 2023
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Photo : Archives

La situation financière de l’aéroport de Baie-Comeau est loin d’être rose. On qualifie même son horizon de sombre. Au mois de novembre dernier, la MRC de Manicouagan, qui est propriétaire de l’aéroport, a adopté son budget annuel de 9 M$, dont un montant de 1,4 M$ est consacré à l’aéroport. Pour le financer, elle compte sur quatre sources de financement.

En effet, elle anticipe des revenus d’opération de 599 000 $, auxquels s’ajoutent la quote-part des municipalités (110 000 $) et l’espérance d’une subvention de 130 000 $ du gouvernement du Québec. En fait, il s’agit du Programme de soutien aux aéroports régionaux (PAAR) mis de l’avant durant la pandémie qui a secoué le monde. 

Or, ce programme n’a pas été reconduit par Québec. Le gouvernement a préféré mettre sur la table 10 M$ pour soutenir les transporteurs aériens plutôt que de venir en aide aux propriétaires d’aéroports comme la MRC de Manicouagan. La pilule est sans doute difficile à avaler même si le préfet Marcel Furlong espère une aide financière par la bande. Rien ne la garantit, mais chose certaine le manque à gagner pour 2023 s’élève maintenant à 690 811 $. Si Québec ne trouve pas un fond de tiroir, la MRC devra combler l’écart (130 000 $) en plus de puiser une somme de 560 811 $ dans son surplus accumulé comme elle le prévoyait au moment de l’adoption de son budget de fonctionnement pour l’année en cours.

D’un optimisme à toute épreuve, le préfet Furlong compte sur le soutien et « l’ouverture » du député de René-Lévesque devenu adjoint gouvernemental de la ministre des Transports du Québec, Geneviève Guilbault, et président du tout nouveau Comité permanent sur le transport aérien régional, dont la première rencontre a eu lieu le 28 mars dernier. Le député ne possède pas de baguette magique pour faire pleuvoir les milliers de dollars dont a un urgent besoin la MRC pour éloigner le nuage qui s’annonce très sombre en 2024 si rien n’est fait pour corriger la situation dès cette année.

Rentable jusqu’en 2019, avant que la COVID-19 ne vienne brouiller les cartes, l’aéroport de Baie-Comeau se retrouve aujourd’hui dans une bien fâcheuse position. Air Canada n’y assure plus le service et son monopole ailleurs au Québec, entre autres à Sept-Îles, soulève la colère des édiles municipaux. Il ne reste plus qu’Air Liaison pour desservir Baie-Comeau, avec un vol quotidien qui ne décolle pas toujours et qu’il est difficile de réserver comme l’a vécu la fille d’une ancienne employée de la Ville de Baie-Comeau, Odette Lapointe-Dubé, dont la sortie a mis en évidence les lacunes qui existent dans la desserte aérienne de Baie-Comeau et de la Côte-Nord.

 L’histoire vécue par sa fille a de quoi faire la manchette et soulever l’indignation. La compagnie aérienne pourra trouver mille excuses, même si elle est demeurée silencieuse, le fait est qu’il y a un manque cruel de services pour les gens de la Côte-Nord sur la Côte-Nord. Mme Lapointe-Dubé a déclaré avoir honte de sa ville, ce que le député réprouve, mais elle a tiré une sonnette d’alarme que l’on ne peut écarter du revers de la main. Le gouvernement a consenti un effort louable avec son programme aller-retour à 500 $, permettant ainsi de réduire le coût exorbitant des billets d’avion, mais cela ne suffit pas. 

Le programme est loin de créer l’affluence nécessaire pour sortir la Côte-Nord du tiers-monde en matière de transport aérien. La régularité, la constance et la fréquence des vols de même que les services aux aéroports s’avèrent essentiels pour que la population retrouve le goût de voyager en avion. Elle l’a perdu et cela s’explique facilement. Il est temps de ranger les lunettes roses dans leurs étuis pour régler les vrais problèmes. 

Tous souhaitent que le Comité permanent sur le transport aérien régional trouve de vraies solutions, au-delà des mots savants qui font saliver les intellectuels et les experts. La proposition de la MRC de Manicouagan d’intéresser un nouveau transporteur en s’unissant avec l’aéroport de Mont-Joli me semble une voie intéressante à explorer. Faudra-t-il le subventionner ? Pourquoi pas ? Et puis si on aidait Air Liaison à s’équiper d’avions de plus de 19 places, cela serait-il une voie à considérer pour permettre aux Nord-Côtiers de voyager et aux autres Québécois d’enrichir notre région de leur présence?

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