Transport aérien : « On est juste déçu que ce service, le seul qu’on a, soit si inadéquat »

Par Charlotte Paquet 7:00 AM - 8 mars 2023
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Air Liaison est le seul transporteur à desservir l’aéroport de Baie-Comeau. Photo courtoisie

Odette Lapointe-Dubé a toujours été fière de Baie-Comeau, mais elle avoue qu’aujourd’hui, sa fierté a pris passablement le bord et des événements récents liés à la problématique du transport aérien en sont la cause.

La dame de 80 ans, employée de bureau retraitée de la Ville de Baie-Comeau et ex-présidente de son syndicat, a elle-même connu sa part de désagréments avec le transport par avion ou même par autobus pour aller visiter sa fille, ses petits-enfants et ses arrière-petits-enfants à Gatineau. Toutefois, c’est par l’entremise de sa fille en visite à Baie-Comeau que l’ampleur réelle du problème lui est apparue. Ce fut suffisant pour qu’elle décide de dénoncer publiquement la situation.

Le dernier événement vécu par Odette Lapointe-Dubé avec le transport aérien à Baie-Comeau a été la goutte qui a fait déborder le vase. Elle a décidé de raconter son histoire.

« Personne ne chiale jamais et on est pris dans une enclave (à Baie-Comeau). On est prisonniers, on ne peut pas sortir », a lancé Mme Lapointe-Dubé d’entrée de jeu. « On est juste déçu que ce service, le seul qu’on a, soit si inadéquat. Ça pas de bon sens », d’ajouter la dame en pointant Air Liaison, le seul transporteur qui dessert Baie-Comeau, pour son je-m’en-foutisme, comme elle le dit.

« Je ne suis pas la seule personne âgée sur la Côte-Nord qui voyageait. Mais là, on a peur », a admis la volubile dame.

Trois semaines plutôt qu’une

Le 30 janvier, sa fille est arrivée à Baie-Comeau pour assister à des funérailles. Elle avait prévu passer une semaine dans sa ville natale avant de retourner chez elle pour reprendre son poste d’infirmière. Elle y sera restée jusqu’au 21 février.

Quand elle a enfin réussi à partir, elle a lancé à sa mère que ça allait prendre du temps avant qu’elle revienne. « Moi, quand je suis arrivée la dernière fois (en octobre 2022), j’ai dit ça va me prendre du temps avant que j’y retourne. »

Pourtant, dès le 6 février, sa fille tentait de réserver un vol à destination de Montréal le plus tôt possible, sachant déjà qu’elle devra faire le reste du trajet par train puisque Air Liaison ne se rend pas plus loin. « Il n’y avait pas de place. C’était non disponible avant le 17 février », a indiqué la maman.

Ce fameux vendredi 17 février aura été rempli de rebondissements. Le vol prévu à 13 h 30 partira finalement à 20 h. Quand tout ça s’est confirmé vers 17 h 30, mère et fille ont décidé de quitter l’aéroport puisqu’il n’y avait plus de correspondance possible vers Gatineau.

Le grand départ aura finalement lieu le mardi 21 février, en l’absence de vol vers Montréal le samedi, d’un congé le dimanche et d’une non-disponibilité le lundi. Et pour ajouter l’insulte à l’injure, il s’en est fallu de peu pour que la fille de Mme Dubé ne puisse s’envoler avec ses bagages.

« Son employeur n’est pas content. Il était fâché après elle. Quand elle est rentrée travailler, personne ne comprenait pareille expédition. À Baie-Comeau, on n’est pas en Afrique », a déploré Odette Lapointe-Dubé.

Honteuse

Par fierté et amour pour sa ville, Odette Lapointe-Dubé a toujours fait son possible pour laisser une bonne impression de Baie-Comeau. Or, la honte s’est bel et bien installée par la situation vécue par les deux autres voyageurs qui eux, le 17 février, ont patienté jusqu’à 20 heures pour prendre un vol prévu initialement à 13 h 30.

Selon Mme Lapointe-Dubé, il n’y a absolument rien à manger ou à boire à l’aéroport. Or, après plusieurs heures à patienter, les deux personnes, un touriste espagnol et une infirmière d’agence, qui venait d’enfiler quatre quarts de travail de 16 heures, avaient faim et soif. Ils étaient à l’aéroport depuis midi.

« Quand on est parties (elle et sa fille vers 17 h 30), le monsieur m’a demandé s’il y avait quelque part aux alentours un endroit pour qu’il puisse aller se chercher à manger, car il avait vraiment faim », a raconté la Baie-Comoise. N’écoutant que son bon cœur et souhaitant laisser au moins un souvenir un peu positif de la région, elle a proposé de reconduire les deux voyageurs jusqu’au Marché du carrefour, à l’entrée du village, et de les ramener ensuite à l’aéroport. Son offre a été acceptée.

Mutisme

Fait à noter, malgré de multiples tentatives effectuées par différents moyens de communication, Le Manic a été incapable d’obtenir une réaction d’Air Liaison aux doléances de la Baie-Comoise. Tous nos messages sont demeurés lettre morte.

Avion et autobus : bien difficile de revenir de Montréal

(CP) Il n’y a pas que les lacunes du transport aérien qui pose problème pour les citoyens de Baie-Comeau, il y a aussi le transport par autobus.

Nelly Arrospide Dumont pourrait en parler longuement après avoir été confrontée aux deux récemment.
La Péruvienne d’origine, Baie-Comoise d’adoption depuis 44 ans, a un fils à Montréal qu’elle visite quelques fois par année, parfois jusqu’à un mois comme tout dernièrement. Elle a profité à quelques reprises du programme des billets d’avion aller-retour à 500 $ avec Air Liaison, mais en février, les ennuis se sont accumulés.

« Moi, je ne suis pas capable de retourner à Baie-Comeau. Je suis bloquée ici », a laissé tomber la dame dans une entrevue avec Le Manic, le 22 février, alors qu’elle se trouvait toujours à Montréal.

Depuis un mois, elle tentait de réserver un siège pour le 1, 2 ou 3 mars, mais c’était complet. « Il faut se prendre six mois d’avance », a déploré la dame au bout du fil. Découragée, elle a lâché prise, pour reprendre ses dires, afin de tenter de trouver une solution du côté des sites de covoiturage, car avec l’autobus, c’est difficile aussi.

Quelques jours plus tard, une bonne nouvelle l’attendait cependant. Son fils venait de lui trouver un vol pour le vendredi 3 mars grâce à une annulation.

Impossible le même jour

Le transport par autocar n’est pas mieux, a poursuivi Nelly Arrospide Dumont. À partir de Montréal, il est maintenant impossible de rallier Baie-Comeau le même jour. Pourquoi? Parce que le transporteur Orléans Express a supprimé le départ de 6 h vers Québec.

Le premier départ du jour, à 7 h, rend impossible l’arrivée à temps à Québec pour le seul départ quotidien de Transco, qui a acheté le circuit d’Intercar vers la Côte-Nord, à 9 h 45 à partir du terminus de la gare du Palais. Selon la voyageuse, Orléans Express lui a indiqué que pour contourner le problème, il faut prendre le dernier départ de la soirée à partir de Montréal pour arriver au terminus vers minuit et y passer la nuit jusqu’au départ vers Baie-Comeau.

La Baie-Comoise de 65 ans ne la trouve pas drôle. « Intercar (Transco), pourquoi il ne met pas son départ un peu plus tard », s’est-elle questionnée. Depuis quelques années, avant même le début de la pandémie, le deuxième départ quotidien a été supprimé faute de rentabilité.

La Péruvienne d’origine a une pensée pour les immigrants que la Manicouagan veut tant attirer, mais qui se buteront aussi aux lacunes du transport aérien et par autocar pour aller visiter éventuellement de la famille ou des amis à Montréal.

Réactions

Le Manic a été incapable d’obtenir une réaction d’Air Liaison, mais y est parvenu avec Intercar, qui assure le service à la clientèle pour Transco.

La directrice de ce service, Vicky Roy, a expliqué qu’avec l’annulation du départ de 6 h de Montréal lors de la reprise post-pandémique, il a fallu faire un choix. Le transporteur ne pouvait plus faire Montréal-Sept-Îles et Sept-Îles-Montréal le même jour comme avant. Or, comme l’achalandage est plus élevé de la Côte-Nord vers Montréal, il a été décidé de conserver cette liaison.

Mme Roy a ajouté que pour respecter les heures de travail du chauffeur qui rallie Sept-Îles, il est impossible de retarder le départ de Québec.

Il y a de l’espoir :

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